Mais quelle est donc la différence entre la Dordogne et le Périgord ?

Si la Dordogne est le département officiel, beaucoup lui préfèrent le terme de Périgord, ancré dans l'histoire et l'authenticité.

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La vallée de la Dordogne

La vallée de la Dordogne que domine la magnifique bastide de Domme, au cœur du Périgord Noir – Crédit photo: FranceSudOuest

Le Périgord, une très longue histoire

Il faut remonter à la Gaule antique pour identifier les premiers contours du Périgord. Le territoire est habité par une peuplade gauloise d’origine celtique, les Pretocorii (ou « Prétrocores »), dont l’étymologie viendrait du gaulois petru (quatre) et du celte corios (armée, clan). En effet, les quelques tribus vivant sur les rives des rivières Isle, Vézère, Dronne et Dordogne se sont fédérées pour former le peuple des Prétrocores, ou Quatre Armées. Leur capitale est Vesunna, connue aujourd’hui sous le nom de Périgueux.

Lors de l’invasion romaine, en 52 avant notre ère, les Prétrocores envoient 5 000 hommes combattre auprès de Vercingétorix. Le chef gaulois doit déposer les armes et Jules César, tout puissant, redessine le pays, en créant notamment Aquitania, vaste territoire délimité par l’océan Atlantique, les Pyrénées, la Gaule Narbonnaise et la Garonne. En -27, l’ajout des terres conquises au sud de la Loire permet à Auguste d’étendre davantage la possession romaine, qui prend le nom de Gallia Aquitania.

Au 3e siècle, face aux invasions barbares, l’empereur Doclétien découpe la région en trois parties, dont l’Aquitania Secunda, qui intègre le territoire des Prétrocores. Les Wisigoths l’envahissent en 412 et l’occupent jusqu’en 507, date à laquelle ils sont chassés par les troupes de Clovis Ier, roi des Francs.

En 779, Charlemagne érige le Périgord au titre de comté et le confie à un certain Widbode, premier des comtes. Deux ans plus tard, le futur empereur donne naissance au royaume d’Aquitaine, à la tête duquel il place son fils Louis le Pieux.

En 877, le royaume d’Aquitaine se scinde en deux duchés, Gascogne et Aquitaine (ou de Guyenne), auquel est rattaché le comté du Périgord. Presque un siècle plus tard, il rejoint la maison de la Marche, comme dot de mariage.

Des siècles de lutte

Au Xe siècle, en pleine invasion normande, quatre baronnies s’installent en terres périgourdines : Beynac, Biron, Bourdeilles et Beynac. De fait, les barons imposent un pouvoir absolu. Des forteresses sortent de terre, mais aussi des églises, des abbayes et des monastères, bientôt considérés comme des étapes majeures du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle.

À la suite du second mariage d’Aliénor d’Aquitaine avec Henri II Plantagenet en 1152, futur roi d’Angleterre, la province du Périgord tombe dans l’escarcelle des Anglais. Fort mécontents, les comtes mènent bataille contre l’envahisseur, perdant puis reprenant de nombreux châteaux. C’est à cette époque qu’apparaissent les bastides, premiers villages fortifiés.

château de castelnaud

Le château de Castelnaud, édifié au 12e siècle, témoin de la longue histoire du Périgord – Crédit photo: Guy Bettray

La lutte contre les Plantagenets débouche sur la guerre de Cent Ans, que viendra conclure la victoire française à Castillon (Gironde) en 1453. La province du Périgord rejoint le royaume de France et s’impose comme un territoire à la forte identité, à travers notamment la convocation des États du Périgord à partir de 1455.

En 1481, la province rejoint le giron de la maison d’Albret, à la suite du mariage d’Alain d’Albret et la comtesse du Périgord, Françoise de Blois-Bretagne. Le comté revient finalement à Henri III de Navarre, le futur roi Henri IV, à la mort de sa mère, Jeanne d’Albret. Il intègre ensuite le Périgord à la couronne en 1607.

Jusqu’à la fin de l’Ancien Régime, la province est confrontée à de terribles conflits, dont les guerres de Religion à partir du 16e siècle, particulièrement sanglantes en Périgord. Nombreux sont les nobles à épouser les idées de la Réforme, au cœur d’une terre profondément ancrée dans le catholicisme.

Déjà touchés par la famine et les épidémies, les paysans périgourdins se révoltent contre l’augmentation des impôts. Ils forment ce que l’on appelle les croquants et s’attaquent aux seigneurs, aux collecteurs d’impôts et aux officiers de justice. La noblesse locale, qu’elle soit catholique ou convertie au protestantisme, s’unit pour écraser le mouvement en 1595. Le roi finit Henri IV par intervenir en faveur des croquants, qui reprendront pourtant leur mouvement quelques années plus tard.

Et la province devient département

Le 18e siècle apporte fort heureusement la quiétude au Périgord, touché de plein fouet par la Fronde, entre 1648 et 1653. La Révolution, qui ébranle Paris en 1789 et bouleverse l’ordre établi, reste somme toute assez limitée en terres périgourdines.

La fin de la monarchie et l’arrivée au pouvoir des révolutionnaires se traduisent par un redécoupage du pays. En 1790, les députés de l’Assemblée constituante décident de la création des départements, après avoir mis fin aux privilèges de certaines provinces.

Le comité, créé pour l’occasion, envisage dans un premier temps de donner naissance à 81 subdivisions de 70 kilomètres de côté, s’inspirant du découpage des États américains. Au terme de longues négociations politiques, surtout liées à des préoccupations électorales, la délimitation des futurs départements se dessine. Leur nombre est fixé à 83, selon le décret du 26 février 1790. Il est également décidé que le nom de ces départements doit rompre avec celui des anciennes provinces. Les noms de rivières, de fleuves ou de montagnes retiennent l’intérêt des députés révolutionnaires.

C’est donc de cette manière que disparaît le terme de Périgord au profit de celui de la Dordogne, son principal cours d’eau. La nouvelle dénomination est officiellement actée le par décret le 26 février 1790.

fleuve Dordogne

C’est donc la Dordogne qui a donné son nom au département, en 1790 – Crédit photo: Krzysztof Golik – Own work – CC BY-SA 4.0

D’un point de vue géographique, le département épouse à peu près la même délimitation que le Périgord. Il se compose de presque toutes les communautés paroissiales de l’ancienne province, d’une petite partie de l’Agenais, du Limousin et de l’Angoumois.

Tout au long des siècles, depuis les Prétrocores, il est intéressant de constater que le territoire a su conserver son unité et assurer sa continuité.

Pourquoi continue-t-on d’employer le terme de Périgord ?

La longue histoire de ce « petit pays » explique sans doute le maintien du terme Périgord auprès de ses habitants et de bon nombre de ses visiteurs. Le Périgord évoque certes une certaine nostalgie, mais aussi le poids de la culture locale, des traditions et d’une certaine authenticité. La Dordogne, pour sa part, revêt un caractère plus administratif.

Les producteurs locaux n’hésitent d’ailleurs pas à privilégier cette dénomination, un peu comme une appellation. On parle ainsi de « noix du Périgord », de « foie gras du Périgord » et de « truffe du Périgord ».

C’est aussi un argument touristique solide, orienté vers le prestigieux patrimoine et la diversité de ses paysages. D’ailleurs, ne parle-t-on pas des quatre Périgord ? Le Périgord Noir, dans le Sarladais, tient son nom des vastes forêts sombres de chênes. Le Périgord Blanc trouve son origine dans la présence des plateaux calcaires. Le Périgord Vert s’illustre par sa végétation omniprésente, que viennent alimenter de nombreux cours d’eau. Enfin, le Périgord Pourpre est celui du vignoble du Bergeracois.