L’Armagnac, sept siècles de tradition gasconne

Produit emblématique du Sud-Ouest, l’Armagnac continue de bénéficier d’une production artisanale qui privilégie la qualité à la quantité.

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Crédit photo: Carlos (Soir d’orage) – Flickr

L’invasion, ça a du bon

Véritable carte d’identité de la Gascogne, l’Armagnac est considéré comme la plus ancienne eau-de-vie de France.

On dit que sa naissance est le fait des différentes invasions qui tourmentèrent le territoire il y a bien longtemps. Les Romains introduisirent tout d’abord la vigne, puis les Arabes firent découvrir l’alambic et les Celtes, enfin, apportèrent leur connaissance de l’utilisation des fûts.

La production de l’Armagnac se développa dès le XVe siècle. L’eau-de-vie connut un succès certain et dépassa rapidement les simples frontières gasconnes.

En 1909, un décret permit de délimiter la zone de production. En 1936, un nouveau décret précisa les conditions de fabrication de l’Armagnac et lui attribua l’Appellation d’Origine Contrôlée (A.O.C.).

Vignoble d'Armagnac, entre Landes et Gers.

Vignoble d’Armagnac, entre Landes et Gers – Crédit Photo: Jibi44 – Wikimedia Commons

Les régions de l’Armagnac

L’appellation Armagnac concerne trois départements : le Gers, les Landes et le Lot-et-Garonne. Près de 15 000 hectares accueillent les vignes, dont les grains mûrissent au sein de trois régions bien distinctes : le Bas-Armagnac, la Ténarèze et le Haut-Armagnac.

Situé à l’ouest, le Bas-Armagnac donne naissance à une eau-de-vie délicate et fruitée.

L’Armagnac issu de la région de la Ténarèze, située tout au centre, se veut plus vigoureux et corsé. On le laisse vieillir plus longtemps en fûts.

Enfin, le Haut-Armagnac, situé dans les environs d’Auch, produit une quantité d’eau-de-vie plus faible, mais à la qualité gustative reconnue par tous.

Les trois régions, leur sol différent et leur personnalité propre contribuent donc à la richesse et à la diversité de l’Armagnac.

Les cépages

Dix cépages ont été autorisés pour la fabrication de l’Armagnac.

Les producteurs ont surtout retenu quatre d’entre eux, car ils donnent à l’eau-de-vie toute sa personnalité et façonnent son identité.

La Folle Blanche reste le cépage le plus fameux, car il existe depuis le tout début, même si on le cultive moins aujourd’hui. La Folle Blanche apporte à l’Armagnac une signature fine et goûteuse.

L’Ugni-blanc est un cépage que l’on retrouve principalement dans la Ténarèze et en Bas-Armagnac.

Le Colombard est utilisé sur l’ensemble des trois régions, grâce à ses arômes épicés.

Enfin, le Baco blanc est apparu après la crise du phylloxéra qui ravagea le vignoble français à la fin du XIXe. Il apporte une touche de rondeur à l’Armagnac et se présente aujourd’hui comme un cépage incontournable pour les producteurs.

Les étapes de la production

Alambic armagnacais de 1936

Alambic armagnacais de 1936 – Crédit photo: Hubert Pingard – Flickr

La récolte a lieu au mois d’octobre. Les raisins sont pressés et le jus obtenu est mis en fermentation.

La distillation est engagée à la fin de l’hiver ou au début du printemps. De toute façon, elle doit obligatoirement avoir lieu avant la date-butoir du 31 mars. Pour cela, on utilise différents alambics, dont l’alambic armagnacais ou l’alambic double-chauffe.

À la sortie, l’eau-de-vie est très alcoolisée. On la met alors rapidement en vieillissement dans des fûts de chêne blanc, qui demandent eux-mêmes un long travail de la part des tonneliers. Les fûts sont généralement d’une contenance de 400 à 420 litres et permettent le mélange harmonieux du bois et de l’eau-de-vie.

Le maître de chais devient alors le personnage central de la naissance de l’Armagnac. Il observe le vieillissement, surveille l’évaporation de l’alcool, supervise le transfert de l’alcool dans d’autres fûts plus âgés, constate la couleur qui apparaît.

Enfin, c’est lui qui décide que l’Armagnac a assez vieilli et qu’il est temps de procéder aux coupes. Cette opération consiste à assembler différentes eaux-de-vie, qui n’ont pas toutes le même âge ou la même origine. La mise en bouteilles peut alors commencer.

Dégustation

Si la production de l’Armagnac est un art, sa dégustation l’est tout autant.

Inutile de se jeter dessus dès la fin du repas, ce serait faire injure aux artisans qui ont donné le meilleur d’eux-mêmes. Il est d’abord recommandé d’attendre un bon moment après la fin du repas (ou du café), afin d’offrir à l’eau-de-vie un palais neutre et réceptif. Les amateurs de bonnes choses choisiront plutôt un verre tulipe, qui se glisse dans la paume de la main et permet de chauffer le précieux alcool.

A savourer en prenant son temps - Crédit photo:

A savourer en prenant tout son temps – Crédit photo: Nick Webb – Flickr

La dégustation doit d’abord s’effectuer avec les yeux. L’Armagnac développe des couleurs somptueuses, dorées ou ambrées. Vient ensuite le plaisir olfactif. Ne pas hésiter à tourner le verre tulipe sur lui-même, afin de libérer les arômes de fruits, de fleurs, de bois qui s’entremêlent judicieusement. L’eau-de-vie doit au moins atteindre les 15 °C avant d’être goûtée.
La première gorgée sera « timide », afin d’habituer le palais et le préparer aux autres gorgées. Les puristes parlent de « queue de paon » lorsque les arômes se détachent doucement en fin de dégustation.