Inauguré en 1888, le plus grand parc de Bordeaux continue de répondre à sa vocation première : donner une campagne à ceux qui n’en ont pas.
Olivier Sorondo 17 mars 2025 – MAJ le 18 mars 2025
Temps de lecture : 7 mn
Un peu de quiétude et de vert – Crédit photo : FranceSudOuest
La générosité de Camille Godard
Finalement, les 28 hectares de parcelles agricoles, de forêts et de vignes auraient pu disparaître au profit de l’expansion urbaine en cette seconde partie du 19e siècle. À l’Ouest de Bordeaux, la commune de Caudéran (devenu en 1965 un quartier de la capitale girondine) ne cesse de se développer autour du bourg de Saint-Amand. Les riches négociants apprécient le lieu, situé non loin des Chartrons, et y construisent de somptueuses maisons.
En 1864, Frank Cutler, un négociant britannique installé en France, a la bonne idée d’acheter la petite trentaine d’hectares de terres pour y installer un parc et un jardin d’acclimatation. Malgré le soutien de quelques actionnaires regroupés en société anonyme, son projet échoue.
Pour autant, l’ambition de proposer un vaste espace vert aux Bordelais ne s’éteint pas grâce au legs de Camille Godard (1823-1881) à la Ville de Bordeaux. Fils d’une riche famille de négociants en vin et Cognac, propriétaire du prestigieux château Kirwan, réputé humaniste et esthète, Camille Godard lègue toute sa fortune à la commune, aux conditions suivantes : « Faires des créations utiles et profitables pour un grand nombre avec la création de squares, de jardins, de promenades… Et pour commencer, que la Ville crée une école de jardiniers pour les cultures maraîchères, fruitières, pour l’arboriculture et la culture florale. »
La municipalité se porte acquéreuse des 28 hectares en 1882 et respecte la volonté de son généreux mécène. À la fin du 19e siècle, les politiques publiques entament un « mouvement hygiéniste », comme l’explique l’architecte Michel Pétuaud-Létang, cité par Sud-Ouest. « Alors que les villes devenaient de plus en plus insalubres, les espaces verts étaient vus comme la solution pour purifier l’air. »
Trois ans de travaux
C’est aux architectes-paysagistes Denis et Eugène Bühler qu’est confiée la lourde mission de transformer cette vaste superficie en parc d’agrément. Les deux frères jouissent d’une excellente réputation nationale grâce à leurs projets antérieurs, notamment le parc de la Tête d’Or à Lyon et le parc du Thabor à Rennes.
Les travaux débutent en 1885 et se poursuivent jusqu’en 1888. Au départ, les Bühler souhaitent « réunir les spécimens remarquables de la flore et la faune des divers pays du monde », mais y renoncent au regard du coût trop élevé de l’entretien.
Ils doivent aussi prendre en considération les vœux exprimés par Camille Godard, qui voulait que soient plantés des magnolias, des noyers d’Amérique, des cyprès chauves de Louisiane et même des séquoias. Ces espèces végétales avaient été introduites dans la région par le botaniste bordelais Toussaint-Yves Catros au début du siècle.
Les frères Bühler orientent donc leur projet vers un parc plus traditionnel et s’inspirent en partie des parcs parisiens. Ils tracent un axe principal, surnommé le « baladoir », qui permet de rejoindre les espaces boisés, dont certains composés d’arbres antérieurs à la création du parc ou formés de chênaies. Ce sont aussi de multiples itinéraires de promenade plus étroits et discrets, qui renforcent l’impression champêtre.
La construction du plan d’eau, large de plus d’un hectare, ajoute au prestige des lieux. Les paysagistes se servent d’ailleurs des remblais issus du creusement pour créer des parties vallonnées, toujours dans le souci de reconstituer un environnement naturel et authentique. Le petit lac se prolonge d’une rivière que vient enjamber un pont à l’anglaise.
Vue sur le lac du Parc Bordelais, vers 1900.
Ce sont en fait différentes scènes végétales que les deux frères ont réussi à agencer autour du baladoir. « Des salles de verdures et des bosquets, un bois en étoile planté dans la tradition classique, des points de vue sur la rivière, le lac et la cascade » détaille le Comité des Parcs et Jardins de France sur son site Internet.
La campagne en ville
Afin de proposer une expérience nouvelle au public bordelais, Denis et Eugène Bühler ne lésinent sur aucun détail. Ils agencent une vaste aire de jeux pour les enfants, prévoient une largeur conséquente du baladoir (11 mètres) afin de permettre le passage des voitures à cheval, font bâtir un mini-zoo, installent des abris en toit de chaume pour se protéger de la pluie ou du soleil, veillent à la diversité des plantes et arbustes…
Le Parc Bordelais est officiellement inauguré le 28 avril 1888 par le Président de la République, Sadi Carnot, en compagnie du maire de Bordeaux, Alfred Daney.
La Ville dispose de son plus grand parc depuis près de 140 ans, véritable poumon vert au cœur d’un territoire aujourd’hui largement urbanisé. Les plus grands soins lui sont apportés, comme ce fut le cas en 1999, après le passage des tempêtes Lothar et Martin. Plus de 700 arbres ne résistent pas à la puissance des vents, semant la désolation dans le parc. La municipalité fait alors appel à la paysagiste Françoise Phiquepal pour réhabiliter le site. La spécialiste des jardins historiques redonne âme au Parc Bordelais en replantant les essences d’origine. Elle intervient à nouveau entre 2004 et 2006 pour réaménager l’endroit, en veillant à retrouver les grands espaces, libèrer l’eau stagnante du lac, déplacer les jeux d’enfants, installer un parc à chiens et tracer un chemin non goudronné tout autour du parc, aujourd’hui fréquenté par les joggers.
Et demain ?
Le parc fait valoir de nombreux arguments pour apaiser et retenir les visiteurs, comme la ravissante petite auberge où il fait bon siroter un verre en terrasse, le rucher-école chargé de mener des actions d’initiation à l’apiculture, la ferme abritant des espèces endémiques de la région, sans même parler de la faune, à l’instar des lapins, des écureuils (très nombreux), des canards et des oies à proximité du plan d’eau.
Pour leur part, les enfants profitent d’une petite piste dédiée aux voiturettes électriques, assistent aux spectacles de marionnettes du légendaire Guignol Guérin, jettent du pain aux canards ou se défoulent sur les aires de jeux à leur disposition.
La richesse botanique du parc et les soins permanents dont il fait l’objet lui valent le label « Jardin Remarquable » en 2011. La mairie de Bordeaux lui attribue le label « Famille Plus ».
Idéal pour le footing, le sentier forme une boucle de près de 2 km – Crédit photo: FranceSudOuest
Bref, le Parc Bordelais répond à sa vocation originelle d’offrir un peu de campagne aux citadins. Ce n’est pourtant pas suffisant pour l’association « Caudéran mon village », qui veut se montrer plus ambitieuse. Elle mène le combat pour que le site soit inscrit au titre des Monuments Historiques afin d’imposer un cadre pour toute modification, percevoir des subventions et attirer davantage de touristes. Pour argumenter son dossier, « l’association défend à la fois le parc en tant qu’œuvre, celle de l’architecte et paysagiste Eugène Bühler, mais aussi en tant que témoignage historique de l’esprit de philanthropie (un peu paternaliste) du 19e siècle » précise le journaliste Gwenaël Badets dans Sud-Ouest (04/09/2024).
Force est de constater que les magnifiques grilles du parc, notamment celles de l’entrée située rue du Bocage, subissent les outrages du temps et de la rouille. Sans même évoquer les incivilités, toujours plus nombreuses.
En attendant, le parc Bordelais s’est imposé comme une destination incontournable pour la population urbaine, avec ce doux sentiment d’oublier la ville pendant quelques heures.
Pratique
Accès : Quartier Caudéran, à l’ouest de la ville. Accès par les barrières Saint-Médard et du Médoc. Plusieurs entrées: rue du Bocage, avenue Carnot, avenue d’Eysines, avenue Charles de Gaulle, rue Godard… S’agissant des transports en commun (à privilégier, car les places de stationnement à proximité ne sont pas toujours évidentes), la station Courbet la ligne de tramway D et les lignes de bus G, 2, 23 desservent fort bien le parc.
Ouverture : Tous les jours et toute l’année. Ouverture à 7 heures. Fermeture à 18 heures du 1er novembre au 14 février, à 19 heures du 15 février au 31 mars et du 1er au 31 octobre, à 20 heures du 1er avril au 31 mai et du 1er au 30 septembre, à 21 heures du 1er juin au 31 août.
Longtemps considérée comme une cité (trop) calme du temps de Jacques Chaban-Delmas, Bordeaux s’est imposée, au fil des années, comme une capitale régionale dynamique, attirant sans cesse plus d’habitants et de touristes.
Olivier Sorondo 17 septembre 2024 – MAJ le 19 septembre 2024
Temps de lecture : 11 mn
La flèche Saint-André se détache du ciel – Crédit photo : Vincent.RCT – CC BY-SA 4.0
De sacrés arguments à faire valoir
Les grandes villes françaises profitent souvent de surnoms flatteurs ou sympathiques, qui contribuent un peu à leur renommée. Marseille devient la cité phocéenne, Toulouse la ville rose, Paris la ville lumière et Lille la capitale des Flandres. Depuis des décennies, Bordeaux jouit d’une image moins reluisante, celle de belle endormie, due à la torpeur dans laquelle elle était peut-être plongée malgré son statut de capitale régionale.
Mais depuis les vastes travaux lancés par l’ancien maire Alain Juppé et la connexion au réseau TGV, Bordeaux a révélé tout son potentiel : cadre de vie agréable, magnifique patrimoine du 18e, proximité du Bassin d’Arcachon et de l’océan, porte d’entrée des terroirs du Sud-Ouest, accès rapide depuis Paris.
Aidée par une campagne de presse nationale et internationale qui l’a redécouverte et encensée, la ville profite aujourd’hui d’une nouvelle aura, à même de séduire les visiteurs de tous horizons. Le dernier baromètreGlobal Destination Sustainability Indexle montre d’ailleurs clairement, avec 7 millions de nuitées marchandes enregistrées en 2023. Les touristes, composés à 53 % d’étrangers et à 47 % de Français, ont généré 1,4 milliard d’euros de retombées économiques. L’étude précise également que 8 % de l’emploi marchand à Bordeaux dépend de l’activité touristique.
Il est vrai que Bordeaux peut s’appuyer sur sa longue histoire, son offre culturelle et sa beauté architecturale pour séduire un large public. Les opportunités de visite, de balade et de lâcher-prise ne manquent pas.
Ils forment depuis toujours le cœur de la métropole girondine, dont l’économie a longtemps dépendu de son activité portuaire. Surtout voués aux dockers et aux hangars jusqu’au déclin du port, les quais ont été progressivement abandonnés, faisant peine à voir.
« En vingt ans, Bordeaux a retrouvé son sourire et son dynamisme, le coup de génie d’Alain Juppé et de ses partenaires a été de retourner la ville vers le fleuve, son réel axe central et historique. En 1995 le pari était audacieux, les esprits assez conservateurs n’avaient pas accepté la mort du port industriel en centre-ville » indique fort à propos le blogBordAvenir, dédié aux projets d’urbanisme de la métropole bordelaise.
Aujourd’hui, les quais représentent un lieu incontournable de balade pour les Bordelais et les touristes. Depuis le Pont de Pierre jusqu’au pont Chaban-Delmas, ils s’étirent sur plus de deux kilomètres, offrant une vue incomparable sur la Garonne et les immeubles rénovés. Surtout, ils permettent de profiter des nombreux aménagements installés ces dernières années, dont le désormais célèbre miroir d’eau. Situé face à la place de la Bourse, il attire comme un aimant les enfants lorsque le brouillard d’eau se forme grâce au millier d’injecteurs placés dans chaque dalle. Sensation de fraîcheur garantie !
Le miroir d’eau est testé et validé par les enfants – Crédit photo: Michael Foley – Flickr
C’est aussi l’occasion de jeter un coup d’œil à la place de la Bourse, emblématique de Bordeaux. « Cette place Royale qui est tout simplement une moitié de place Vendôme, posée au bord de l’eau » écrivait joliment Victor Hugo. En son centre, la Fontaine des Trois Grâces apporte une touche majestueuse à l’ensemble, comprenant l’hôtel de la Bourse et l’hôtel des Fermes.
Un peu plus loin, c’est l’esplanade des Quinconces qui apparaît. Dotée d’une superficie de 12 hectares, dont la moitié d’espaces verts, elle est considérée comme la plus grande place d’Europe, que vient agrémenter l’immense monument aux Girondins, édifié en 1895.
Entrée de la place des Quinconces – Par Albert Bergonzo — Travail personnel, CC BY-SA 4.0
Outre leurs parcelles de gazon, où il fait bon se poser sous le soleil, les quais proposent une trentaine de boutiques, installées dans les hangars réaménagés, et une quinzaine de bars et restaurants. Largement de quoi profiter de la Garonne.
La Cité du Vin et quelques autres musées
Impossible de rejoindre la Cité du Vin sans apercevoir à ses abords une forêt de smartphones brandis par les touristes, soucieux de prendre la meilleure photo. L’architecture originale du bâtiment ne laisse personne indifférent. Inaugurée en 2016, la Cité du Vin a été conçue par les architectes Anouk Legendre et Nicolas Desmazières de l’agence XTU. Ces derniers ont privilégié la rondeur et donné à leur bâtiment la forme d’un cep de vigne « pour rappeler à la fois un vin tournant dans un verre et les remous de la Garonne, qui borde le site », selon la journaliste Caroline Brenière.
Le lieu vise avant tout à combler une lacune, puisqu’aucune structure ambitieuse ne se consacrait au vin à Bordeaux, un comble. La Cité permet de s’imprégner du monde la vigne depuis l’Antiquité et sur les cinq continents. La visite s’organise en six univers et dix-huit modules, sur près de 3.000 mètres carrés, où les opportunités d’interaction sont nombreuses.
Petite cerise sur le gâteau : le billet d’entrée donne droit à la dégustation d’un verre de vin au belvédère, qui surplombe Bordeaux. On peut aussi se rendre à l’impressionnante cave, au design futuriste, pour espérer trouver une bonne bouteille issue de 70 pays.
D’autres musées accueillent les visiteurs avides de culture. Ainsi, le musée d’Aquitaineoffre un témoignage précieux et fourni (plus de 70 000 pièces) de l’histoire régionale depuis la Préhistoire. Ses expositions temporaires et son programme annuel de conférences suscitent un intérêt toujours renouvelé.
Pour sa part, le CAPC musée d’art contemporain, labellisé Musée de France en 2002, conserve une vaste collection d’œuvres d’art minimal, conceptuel et de land art, que viennent enrichir les expositions temporaires. On y découvre de nombreuses créations d’artistes français (Pascal Convert, Christian Boltanski, Daniel Buren…) et étrangers (Richard Long, Robert Barry, Cristina Iglesias…).
L’ancien entrepôt Lainé s’est transformé en lieu culturel.
Ouvert en 2009, le musée Mer Marine(ou MMM pour les intimes) se consacre tout entier à l’univers maritime, sur presque 8.000 mètres carrés d’exposition. Le parcours permanent retrace l’histoire de la navigation (découvertes, batailles navales, expéditions scientifiques) et laisse voir son riche patrimoine, à travers moult pièces et œuvres d’art.
La Grosse Cloche et autres joyeusetés architecturales
L’on dit souvent que Bordeaux figure parmi les plus belles villes de France. Il est vrai que la cité girondine profite d’un magnifique patrimoine, né de sa période faste au 18e siècle. Cependant, quelques-uns de ses monuments s’enorgueillissent d’un passé bien plus lointain, à l’image de l’imposante cathédrale Saint-André. Édifiée entre le 12e et le 16e siècle, elle écrase de son impressionnante architecture la place Pey-Berland, sensation que vient renforcer la tour de même nom, située juste à côté. Il s’agit en fait du campanile de la cathédrale, et sa séparation de l’église permet de ne pas transmettre les vibrations des cloches, susceptibles de fragiliser l’édifice. On peut bien sûr grimper au sommet de la tour (233 marches quand même) pour profiter d’un superbe point de vue de la ville.
La cathédrale Saint-André accueillit le mariage d’Aliénor d’Aquitaine et du futur roi Louis VII en 1137
S’agissant de cloche, justement, celle que l’on appelle la grosse apparaît indissociable de l’identité bordelaise. Elle est un vestige du Bordeaux médiéval et correspond en fait à la porte Saint-Éloi de l’ancien rempart, notamment empruntée par les pèlerins en marche vers Compostelle. La porte est ensuite devenue beffroi, servant à alerter les habitants sur un incendie ou à signifier le début des vendanges. La Grosse Cloche vaut pour son admirable architecture. Elle figure d’ailleurs sur les armoiries de Bordeaux et retentit chaque premier dimanche du mois à midi pile.
L’un des emblèmes de la ville – Crédit photo : Grand Parc – Bordeaux -CC BY 2.0
Autre monument emblématique de Bordeaux, le Grand Théâtre et ses célèbres colonnes servent souvent de lieu de retrouvailles aux Bordelais avant une soirée dans le quartier Saint-André. Conçu par l’architecte Victor Louis et inauguré en 1780, l’Opéra national de Bordeaux (c’est son autre nom) propose chaque saison un programme culturel étoffé et éclectique. Il illumine aussi la place de la Comédie et offre un décor prestigieux aux clients du Grand Hôtel de Bordeaux, tranquillement assis en terrasse.
La rue Sainte-Catherine, l’interminable plaisir du shopping
Si Bordeaux peut se vanter d’accueillir la plus grande place européenne, elle peut également rouler des mécaniques en citant la rue Sainte-Catherine, plus longue rue commerçante d’Europe. Sur 1,2 kilomètre, des centaines de boutiques, dont un grand nombre échappe encore au dictat des enseignes nationales ou mondiales, s’offrent à la joie et au portefeuille des passants.
La rue, entièrement piétonnisée en 1984, relie la place de la Victoire à celle de la Comédie. Elle est bordée de nombreuses petites rues, qui incitent à découvrir des quartiers ou des places ne figurant pas forcément dans les guides touristiques, mais qui contribuent pourtant à la réputation de la ville (dont la moitié a été classée Patrimoine Mondial de l’UNESCO).
Les amateurs de shopping tranquille éviteront de fréquenter l’endroit le samedi après-midi, lorsqu’il est envahi par une foule (très) nombreuse et (très) compacte.
Il y a foule rue Sainte-Catherine – Crédit photo : Marc Ryckaert – CC BY 3.0
Les enseignes Apple, FNAC, H&M ou McDonald’s se partagent le public avec des magasins plus authentiques, à l’instar de la boutique des Girondins de Bordeaux (un peu secouée quand même par la relégation de son équipe), principalement situés du côté de la place de la Victoire.
On peut même s’échapper un peu de la foule et du temps en se faufilant au sein de la Galerie Bordelaise, un magnifique passage couvert construit en 1834 et inscrit au titre des Monuments historiques. Il donne accès à la rue Piliers de Tutelle et donc à l’épicerie fine Le Comptoir Bordelais, à la devanture ancienne et magique, qui mérite amplement le coup d’œil. On y trouve de nombreux produits locaux et artisanaux, merveilleusement présentés. Le charme d’une ville tient aussi dans ses boutiques.
Les Capucins, le ventre de Bordeaux
Et pourquoi ne pas s’immerger dans la vie bordelaise ? Le marché des Capucins représente à ce titre la destination parfaite. Considérés comme une institution, les « Capus » forment le plus gros marché de la ville, initié en 1744 par le marquis de Tourny. Après la Révolution, il gagne en importance grâce à son activité de vente de bétail puis se diversifie progressivement, accueillant des bouchers, des charcutiers, des herboristes ou encore des drapiers.
Aménagés en 1857, les Capus se délaissent du bétail pour se tourner vers les maraîchers, qui « arrivent en charrettes tirées par les chevaux pour vendre leurs produits : de Macau, avec leurs artichauts ; d’Eysines, avec leurs pommes de terre, leurs courges et leur cresson ; de Gradignan, avec leurs tomates ; de Pessac, avec leurs fraises » précise Cathy Lafon dans Sud-Ouest (11/12/2020).
Ce sont les prémices du marché tel qu’on le connaît aujourd’hui, mais il faut attendre 1881 pour que les Capucins soient recouverts et dotés des deux halles.
Même si l’on dit que l’âge d’or des Capus s’est éteint dans les années 1950, après la mise en place du marché d’intérêt national à Belcier, force est de constater que le marché continue de rythmer la vie gourmande des Bordelais. Il accueille aujourd’hui 91 commerçants (bouchers, boulangers, chocolatiers, ostréiculteurs…), des clients fidèles et de nombreux touristes venus du monde entier.
L’un des nombreux stands du marché – Crédit photo : Marché des Capucins
C’est l’occasion rêvée de s’imprégner de l’ambiance des lieux, de remplir son panier de produits frais et locaux et de se poser dans l’un des petits restaurants qui participent au charme de l’endroit.
En guise de conclusion (pratique)
Bordeaux profite d’une longue histoire et d’un riche patrimoine, qu’il serait trop long de décrire ici. Parmi les lieux justifiant une visite, citons pêle-mêle Darwin, l’écosystème de la rive droite ; les Bassins des Lumières, considéré comme le plus grand centre d’art numérique au monde ; le quartier des Chartrons et son ambiance si particulière ; les places du Parlement, du Palais et de Saint-Michel, qui invitent à se poser ; le Jardin Public ou le Parc Bordelais, havres de nature en ville ; la Porte Cailhau…
La place Saint-Projet et sa jolie fontaine construite en 1715 – Crédit photo : Brenac – CC BY 3.0
Le plus simple consiste finalement à se perdre dans les rues de la cité, qui réservent tôt ou tard une heureuse surprise. C’est peut-être le meilleur moyen de sentir Bordelais et d’approcher la ville sans précipitation, dans toute son authenticité.
Informations pratiques :
Bordeaux dispose d’un chouette réseau de transport en commun, assuré par TBM. Bus et tramways permettent de se déplacer facilement, de l’aéroport Bordeaux-Mérignac jusqu’à la gare Saint-Jean.
L’offre et la diversité des hôtelspermettent de trouver son hébergement en fonction du budget disponible. Et on ne parle même pas des locations ou autre Airbnb.
Le choix des restaurants est pléthorique, offrant l’occasion de se régaler d’une cuisine traditionnelle du Sud-Ouest ou de découvrir le dernier Japonais à la mode.
Quitter Bordeaux sans ramener une bonne bouteille de vin constituerait presque un crime de lèse-majesté. Les dizaines de boutiques spécialiséescombleront facilement cette lacune.
Enfin, tous les attraits de la ville sont dûment référencés sur les sites Bordeaux Tourisme et Visiter Bordeaux, gérés par l’Office de tourisme et des Congrès de Bordeaux. Ils affichent de nombreuses informations pratiques, notamment celles liées aux visites guidées.
Le département est riche d’opportunités de découvertes et de loisirs. Quelques idées de sorties, parmi tant d’autres.
Olivier Sorondo 12 juillet 2021 – Dernière MAJ : le 28 juillet 2022 à 15 h 31 min
Crédit photo : Comité Départemental du Tourisme de Lot-et-Garonne
Bastide de Villeréal
Terre de bastides, le Lot-et-Garonne promet un voyage à travers le temps qui se fige au Moyen-Âge. Ces villes nouvelles, édifiées en quelques années tout au long du 13e siècle, bénéficient d’une fortification. Les rues y sont agencées en angle droit et composent des îlots. La place centrale constitue le cœur de vie de la cité, où se déroule le marché.
Villeréal figure parmi les plus belles bastides du Sud-Ouest. La ville a été parfaitement conservée depuis sa construction en 1267 sous l’impulsion d’Alphonse de Poitiers, frère de Saint-Louis.
Les maisons médiévales à colombage ou à encorbellement attirent le regard et provoquent l’admiration, tout comme les jardins clos à l’ancienne.
L’église Notre-Dame dévoile une architecture défensive, comme le montrent les meurtrières, les deux tours et le chemin de ronde. Elle devait en effet servir de dernier refuge aux habitants en cas d’attaque.
La halle se veut exceptionnelle, notamment grâce à son étage en torchis, réservé aux notables.
C’est un véritable retour vers le passé, authentique et puissant, que propose Villeréal à ses visiteurs. La cité figure parmi les plus beaux villages de France depuis 2018.
Tél. 05 53 36 09 65 (office de tourisme Cœur de Bastides)
Magnifique maison sur cornières – Crédit photo: Par MOSSOT — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=11437883
Base de Loisirs du Lac de Clarens
L’été est particulièrement chaud en Lot-et-Garonne, justifiant une pause rafraîchissante. Certes, les piscines municipales sont nombreuses et variées, mais le plaisir de la baignade sera plus fort au lac de Clarens.
D’abord, le lac profite de ravissantes plages de sable blanc, dont deux sont surveillées. Ensuite, la pinède offre des zones ombragées, où il fait bon pique-niquer et se détendre à l’abri du soleil. Enfin, les activités proposées sont nombreuses et variées : pédalo, stand-up paddle, canoë, flyboard, accrobranche, parc aqualudique, parcours d’orientation, sentier de randonnée…
Bref, largement de quoi y passer la journée. Des bars et des commerces de restauration sont à la disposition du public.
Adresse : Route de Mont-de-Marsan – 47700 CASTELJALOUX Tél. 05 53 93 48 00 Tarifs : 2,50 € de mi-juin à fin août – Gratuit pour les enfants de moins de 12 ans Accessible aux personnes à mobilité réduite.
Une journée à la plage ? Oh oui ! – Crédit photo: Comité départemental du tourisme du Lot-et-Garonne
Œnotourisme en Marmandais
Injustement méconnues, les Côtes du Marmandais révèlent pourtant une grande diversité de profils de vins. Nés de savants assemblages, ils ont permis de sauver et de pérenniser l’abouriou, un cépage endémique, qui apporte tout son fruité et une vraie pointe d’originalité.
Le vignoble du Marmandais, installé sur les deux rives de la Garonne, entre Guyenne et Gascogne, se veut modeste (1350 hectares), presque intime. Il n’en demeure pas moins que la centaine de vignerons chérit sa production, d’ailleurs récompensée par l’AOC en 1990.
Il peut donc s’avérer très intéressant de partir à la découverte de ce terroir, en toute proximité de ceux qui le font vivre.
La Cave du Marmandais propose quotidiennement des visites de caves et des escapades dans le vignoble, à bord d’un combi Volkswagen dans son jus.
Si la dégustation du divin breuvage vous séduit, les boutiques de Beaupuy et de Cocumont vous ouvrent grand leur porte pour prolonger le plaisir.
Adresse : La Cure – 47250 COCUMONT Tél : 05 53 94 19 01 Web : https://cave-du-marmandais.fr/visitez/ Tarifs: 7 € par personne, gratuit pour les moins de 16 ans
Un p’tit combi Volkswagen pour partir à la découverte du vignoble et de ses vignerons – Crédit photo: Cave du Marmandais
Réserve naturelle de l’étang de la Mazière
Classé réserve naturelle nationale, l’étang de la Mazière se situe non loin du village de Villeton et à un jet de pierre de la Garonne.
Sur une superficie de 102 hectares, la réserve propose une vraie diversité de milieux, que viennent composer les prairies humides et sèches, les mares temporaires ou permanentes, l’étang, les roselières et les gravières.
Cet environnement est bien sûr propice au développement d’une faune diverse et variée : milan noir, loriot d’Europe, rousserole effarvatte, grenouille agile, cistude d’Europe… Depuis 1985, les inventaires naturalistes ont permis d’identifier 50 espèces de mammifères, 244 espèces d’oiseaux, 13 espèces de poissons ou encore 356 espèces de plantes. C’est pas rien.
Le site donne aussi à voir une ferme typique du Marmandais entièrement restaurée, un séchoir à tabac, un four à pain et un pigeonnier.
Enfin, un espace muséographique situé au premier étage de la maison de la réserve permet d’approfondir ses connaissances sur la réserve naturelle.
Adresse : Maison de la Réserve – Petite Mazière – 47400 VILLETON Tél. 05 53 88 02 57 Web : www.sepanlog.org/reserve-naturelle-de-la-maziere Visites organisées mensuellement – Se renseigner auprès de la Maison RNN Tarifs : 7 € pour les adultes et 5 € pour les enfants.
L’entrée du jardin d’Eden ? – Crédit photo: Sepanso
Chemin de fer touristique du pays de l’Albret
Et pourquoi ne pas emprunter un petit train brinquebalant à travers des paysages magnifiques ? Ça tombe bien, l’association du Chemin de fer touristique du pays de l’Albret propose un itinéraire enchanté entre Nérac et Mézin.
Le petit tronçon de ligne, long de 13 km, est une portion de l’ancienne ligne qui reliait les gares de Nérac et de Mont-de-Marsan, achevée en 1889.
Le voyage s’entend bien sûr aller et retour (c’est mieux, mais l’aller simple est possible) et il faut compter environ 2 heures de balade à travers champs, exploitations agricoles, coteaux et sous-bois. On ne parle même pas du long tunnel de 1,5 km qui promet quelques sensations et un peu de fraîcheur en plein cœur de l’été.
Les voitures du train, de type « baladeuses », sont semi-ouvertes et permettent de s’imprégner encore plus de la nature environnante.
Adresse : Gare de Nérac – 14 avenue du 19 mars 1962 – 47600 NÉRAC Tél : 06 98 16 55 33 Web : https://chemin-de-fer-touristique-du-pays-de-l-albret.blog4ever.com/ Tarifs : 14 € pour les adultes, 10 € pour les enfants (4 à 12 ans) et gratuit pour les tout-petits. Il est fortement recommandé de réserver.
Forêt d’Art Contemporain : la magie derrière les arbres
Au cœur de la forêt des Landes de Gascogne se cachent des œuvres monumentales ou surprenantes, qui promettent un itinéraire pour le moins singulier.
Olivier Sorondo 19 mars 2021 – Dernière MAJ : le 20 mars 2021 à 14 h 16 min
Crédit photo: Forêt d’Art Contemporain
La renaissance après l’hécatombe
En janvier 2009, la tempête Klaus balaye le Sud-Ouest de la France, provoquant d’immenses dégâts au sein de la forêt des Landes de Gascogne, déjà éprouvée par la tempête de 1999. Au total, 40 millions de m3 de bois sont dévastés, soit quatre fois la récolte annuelle.
Même si une vaste campagne de replantations est initiée, trois acteurs culturels locaux s’interrogent sur l’opportunité de repenser l’environnement, en y apportant un aménagement inédit. C’est ainsi que l’association Culture et Loisirs de Sabres, l’association des Floralies de Garein et l’Écomusée de Marquèze lancent le projet de la Forêt d’Art Contemporain.
La vocation est simple, mais ambitieuse : tracer un itinéraire, entre Gironde et Landes, composé d’œuvres contemporaines commandées à des artistes en résidence.
Afin d’apporter une vision affûtée au projet, la direction artistique est confiée tous les cinq ans à un professionnel de l’art, qui endosse le costume de commissaire. Sa mission ? Assurer la programmation artistique, choisir les artistes plasticiens appelés en résidence, définir en leur compagnie la future œuvre et déterminer le lieu final d’exposition permanente.
Depuis 2018, c’est Irwin Marchal qui occupe les fonctions de commissaire. Après des études de beaux-arts à Bordeaux, il ouvre en 2015 la galerie Silicone, destinée à dynamiser la scène artistique locale.
Une balade enchantée
Ceux qui espèrent admirer les 22 œuvres dans la même journée en seront pour leurs frais. Le parcours artistique s’étend en effet du Bassin d’Arcachon jusqu’aux limites de Mont-de-Marsan. La Forêt d’Art Contemporain se découvre au fil des jours, selon le souhait d’un tourisme culturel, qui privilégie la diversité des lieux et des sensations.
Parmi les créations dispatchées sur les 336 000 hectares de la forêt des Landes de Gascogne, Les Trois sans nom, de Sébastien Vonier, laissent voir à Salles trois figures fantomatiques constituées par un équilibre de poutres autoportantes. Peut-être est-ce la représentation de fagots de bois, de fantômes d’arbres tombés pendant la tempête ou bien de gardiens célestes extirpés d’une légende landaise.
Les Trois sans nom, de Sébastien Vonier. Comme une ambiance du Seigneur des Anneaux – Crédit photo: la Forêt d’Art contemporain
Impossible de rester de marbre face à la création d’Alain Domagala, Aux impétueuses manœuvres de l’imprévu, à Garein. Ici, l’œuvre représente une table gigantesque renversée, en souvenir de la tempête Klaus. L’artiste évoque la vie perturbée des habitants, mais aussi la formation heureuse d’un rempart.
« J’aime l’idée qu’on puisse aborder cette sculpture en étant confronté à cette face qui ressemble à une grande palissade. Qu’elle apparaisse dans un premier temps comme une construction architecturale et diffère ainsi l’appréhension du meuble surdimensionné » déclare l’artiste.
Le souvenir persistant de la tempête – Crédit photo: la Forêt d’Art contemporain
La Forêt d’Art Contemporain permet aussi de découvrir le concept de Stéphanie Cherpin, Vis Mineralis, à Commensacq. L’artiste a ainsi utilisé un ancien wagon de la ligne qui reliait la gare de Sabres à celle Labouheyre.
« Si celui-ci a perdu à jamais sa fonction, il garde en mémoire l’empreinte d’une activité humaine forte au cœur de la forêt. Il ne s’agit pas d’élever un monument ou de magnifier une ruine, mais de raviver un signe vivant de l’union entre l’environnement et les objets techniques, produits et manifestations d’une mémoire humaine » explique Stéphanie Cherpin.
Un wagon figé dans le temps, en souvenir d’une activité disparue – Crédit photo: la Forêt d’Art Contemporain
L’aventure culturelle se poursuit
Si 22 œuvres ont déjà été installées, une dizaine de projets artistiques viendra compléter la Forêt d’Art Contemporain. La volonté des trois acteurs est d’apporter un « enrichissement progressif de l’espace de vie quotidien des habitants des Landes », sans oublier pour autant les amateurs d’art et/ou de nature.
La vie de la Forêt d’Art Contemporain se nourrit également de balades familiales à thème avec un guide-médiateur, de conférences, d’ateliers et de visites scolaires.
Le public peut prolonger son expérience grâce à l’ouvrage La Forêt d’Art Contemporain, publié par les éditions Confluence (14,50 € – 64 pages). Le livre « reprend toutes les données du projet, de la forêt à la production des œuvres, convoquant aussi l’histoire des Landes et la figure tutélaire de Félix Arnaudin, interrogeant les artistes, mais aussi les différents acteurs de l’aventure, en ponctuant cet entretien de photographies et de projets. »
Retrouvons Hélène et sa petite famille en villégiature sur le Bassin d’Arcachon. Seront-ils condamnés à limiter leurs activités aux seules séances de baignade et de bronzage ? Bien sûr que non.
Olivier Sorondo 11 août 2020 – Dernière MAJ : le 14 novembre 2020
La Teste-de-Buch offre un cadre idéal de vacances – Crédit photo: M.Strīķis – CC BY-SA 3.0
Samedi 8 août
Enfin les vacances, le soleil, la plage, le barbecue et le lâcher-prise. Des semaines que vous y pensez, exténuée par le rythme infernal du quotidien parisien. Rien ne change vraiment, si ce n’est la destination estivale. Cette année, ce sera une belle petite location, certes mitoyenne, mais avec piscine, à la Teste-de-Buch, sous les pins.
La voiture est chargée depuis la veille et votre mari, Christophe, enclenche la première à exactement 5 heures 30 du matin. « On va tous les griller ! On déjeune à midi tapant en terrasse à Arcachon, promis juré ! » jubile-t-il. À l’arrière, Guillaume, 15 ans, fait la tronche tandis qu’Alexia, du haut de ses 10 ans, se prépare à se rendormir.
Bon, vous avez quitté votre maison de Gentilly il y a déjà une heure et l’A10 n’est toujours pas en vue. C’est quand même un (très) gros embouteillage. Vite, vous placez vos écouteurs au fin fond de vos oreilles et vous ouvrez votre application Deezer en regardant votre homme. Le jeu est simple : essayer de deviner les insultes qu’il profère devant son pare-brise. C’est un jeu assez marrant.
La rocade bordelaise se rapproche enfin et il n’est que 13 heures 30 ! Alexia, bien réveillée, se montre enchantée.
« On va pouvoir passer sur le pont d’Aquitaine ! »
« Non, on prend la rocade de l’autre côté, c’est plus court » lui répond son père.
Erreur. Parce que la rocade bordelaise, c’est du rouge écarlate l’été tellement elle est saturée, surtout si on privilégie « l’autre côté ». C’est ce que font tous les touristes.
En ayant choisi la rocade Ouest, on aurait un peu mieux roulé et, surtout, on aurait pu emprunter la discrète sortie 13 au niveau de Pessac, suivre l’avenue du Bourg jusqu’à la D1250, qui aurait permis de rejoindre le Bassin d’Arcachon via Marcheprime en évitant une vingtaine de kilomètres d’embouteillages sur l’A63. C’est trop bête.
Mais bon, fichu pour fichu, vous décidez, après 2 heures de collé-serré avec les autres voitures, de faire une pause à l’aire d’autoroute de Cestas. Après tout, la destination finale n’est plus très loin, les pins maritimes sont agréables à regarder et vous vous sentez déjà un peu en vacances.
La volupté est de courte durée puisque Guillaume vient vous annoncer qu’il souhaite récupérer ses affaires et rejoindre le groupe de Christyntje, une jeune touriste néerlandaise qu’il vient de rencontrer sur le parking. Bien sûr, il restera avec elle après les vacances et ira s’installer pour toujours à Amsterdam où il travaillera dans un coffee shop.
Vous le fusillez du regard.
Deux (bonnes) heures plus tard, vous voici enfin devant le portail de la villa. Juste le temps de couper la radio, branchée sur France Bleu Gironde, qui annonce un soleil éclatant pour le lendemain.
Le propriétaire vous accueille chaleureusement.
« Hé, je vous attendais à midi ! »
Dimanche 9 août
C’est un drôle de bruit qui vous réveille vers 9 heures. Curieuse, vous ouvrez le volet pour constater une pluie torrentielle dans le jardin. Au plus profond de votre esprit, vous maudissez Météo France et réfléchissez au nouveau programme de la journée.
Alexia vous rejoint près de la fenêtre, les yeux tristes.
« On ne va plus à la plage ? »
« Non, ma puce, mais on reste quand même proche de la mer. Ça te dirait de visiter Arcachon, en attendant le retour du soleil ? »
Votre proposition est presque adoptée à l’unanimité par les membres de la famille. Seul Guillaume vote contre, préférant passer la journée sur le canapé à échanger des SMS avec Christyntje, qui vient d’arriver en Espagne.
La pluie cesse, le ciel se dégage et Arcachon se pare de ses plus beaux atouts pour vous séduire. La visite de la ville d’hiver, l’un des quatre quartiers, vous impressionne. Chaque ruelle laisse apparaître des rangées de villas plus belles les unes que les autres. Le quartier en compte plus de 300, toutes bâties au 19e selon le mouvement pittoresque et adoptant des styles différents : néogothique, colonial, mauresque, néoclassique. Vous remarquez même une bâtisse épousant l’architecture d’un chalet suisse.
Bien sûr, quelques villas, parmi les plus imposantes ou originales, ont acquis une certaine postérité : Trocadéro, Athéna, Toledo ou encore Brémontier.
Comme un décor de cinéma à Arcachon – Crédit photo: Patrick Nouhailler – Flickr
Le soleil a repris sa place légitime dans le ciel lorsque vous arrivez, presque par inadvertance, au Parc Mauresque. Refuge enchanteur au cœur de la ville, il a été transformé en arboretum en 1992, sans pour autant dénaturer son influence anglaise originale. Arbres centenaires, théâtre de verdure, massifs fleuris, cascades dans les rochers, jardin d’enfants et même un petit kiosque du 19e composent le décor du lieu. Parmi les plantes et les arbres, vous remarquez des pins maritimes, des ginkos et des liquidambars. Depuis 1987, une extraordinaire roseraie complète l’ensemble et contribue encore plus à sa magie.
Vous profitez de la vue magnifique qu’offre l’endroit lorsqu’Alexia vous signale la présence d’un ascenseur, qui vous mène en un rien de temps un peu plus bas, à la ville d’été. Par chance, il s’agit aussi du centre-ville d’Arcachon, qui se prolonge jusqu’à la plage, entre les jetées d’Eyrac et de la Chapelle. Votre curiosité devient alors plus primitive, dictée par la faim, car il est déjà 13 heures. Un seul objectif : un bon petit restaurant, si possible avec terrasse, celui dont rêvait votre mari la veille. Tout vient à point à qui sait attendre.
Lundi 10 août
Journée courses et farniente dans la villa. Il faut beau, il fait chaud, le centre commercial de La Teste déborde de clients, mais vous prenez votre mal en patience, d’autant plus que les merguez et les chipos affichent une promotion toujours bonne à prendre.
De retour dans votre villégiature, vous constatez que si la villa est mitoyenne, le barbecue l’est aussi. Le prétexte est excellent pour nouer contact avec vos co-vacanciers, qui ont eux aussi préparé leur stock de saucisses. À la bonne franquette, les deux familles décident de faire table commune. Pendant que Christophe débouchonne bruyamment une bouteille de Bordeaux rosé, vous vous enquérez de l’origine géographique de vos nouveaux amis. Bon, votre sourire reste figé lorsqu’ils vous apprennent qu’ils habitent à Gentilly, et même à trois rues de chez vous.
« Ah ben, le monde est petit ! » déclare votre homme, la bouteille à la main.
Guillaume, qui vient pourtant de faire ses adieux définitifs par Skype avec Christyntje, retrouve le sourire après avoir été présenté à Margaux, la jolie jeune fille de vos voisins. Pour le coup, vous êtes plutôt contente qu’ils soient originaires de Gentilly.
Tout au long de l’après-midi, les rires des enfants dans la piscine, le chant des cigales et la chaleur du soleil vous apaisent l’esprit et le corps. Seuls les cris caverneux de Guillaume vous obligent à ouvrir un œil de temps en temps. Sa technique de séduction vous échappe complètement.
Mardi 11 août
Passer quelques jours de vacances à La Teste sans même gravir la dune du Pilat paraît inconcevable à Alexia. Grâce aux conseils avisés du propriétaire, vous privilégiez les vélos à la voiture et vous longez, sur une belle piste cyclable, la D259 qui vous mène directement jusqu’au monstre de sable.
Vous esquissez un large sourire en constatant l’embouteillage qui s’est formé, sur plusieurs centaines de mètres, obligeant les automobilistes à patienter de longues minutes.
« Au moins une demi-heure » estime Guillaume, le souffle court à cause du pédalage.
Manque de chance pour les conducteurs, le panneau du parking de la dune annonce complet, obligeant tout ce beau monde à trouver une place en lisière de forêt et assez loin du site.
Gravir la dune vous rappelle vos souvenirs d’enfance. Force est de constater que la magie du lieu opère toujours, à regarder la joie et la précipitation d’Alexia et de Guillaume, lancés dans une course effrénée. Tiendront-ils la cadence sur 107 mètres ? Pas sûr.
Au sommet, malgré la foule, le paysage de l’entrée du Bassin d’Arcachon et du banc d’Arguin se révèle majestueux. Les parapentes multicolores, toujours nombreux en cette période de l’année, donnent parfois l’impression de se frôler dangereusement.
« Il vont crasher, c’est sûr » fait remarquer Guillaume, qui filme avec son smartphone le ballet des oiseaux de toile, en attente d’un improbable accident.
Après la descente du gros tas de sable, plus rapide et plus fun, vous acceptez de bon cœur de poser devant l’objectif de votre mari à l’entrée du camping de la Dune, qui a servi de décor à la série de films populaires Camping, avec Franck Dubosc. D’ailleurs, vous constatez tout de suite que vous n’êtes pas les seuls à avoir eu cette idée.
Mercredi 12 août
Même en vacances, Alexia considère que le mercredi est la journée des enfants. Après avoir épluché la documentation touristique laissée dans la villa, elle procède à une sélection rigoureuse du parc de loisirs susceptible de répondre à ses attentes. La Coccinelle à Gujan-Mestras ? Pas mal, mais on dirait que le parc se destine surtout aux plus petits. L’Aqualand Bassin d’Arcachon, situé juste à côté ? Mouais, mais ça oblige à être mouillée tout le temps.
Sur votre application Google Maps, vous venez à son aide et vous identifiez, dans le même périmètre, Kid Parc Ile d’Aventures, qui propose des attractions, des jeux et même des spectacles. Largement de quoi passer une journée de détente. Alexia se saisit de votre smartphone, ouvre de grands yeux et finit par vous regarder, visiblement conquise.
De son côté, votre fiston Guillaume accepte l’invitation de vos co-vacanciers de s’initier au surf à la page du Grand Crohot. Les quelques écoles présentes sur place assurent les cours et fournissent le matériel et les combinaisons.
Pour vous et Alexia, c’est une vraie journée de vacances, ponctuée de rire et de complicité.
À votre retour à la villa, le bilan est plus mitigé s’agissant de Guillaume.
« En deux heures, j’ai compté 28 chutes dans la mousse ! Il a un don, aucun doute » vous raconte, hilare, le père de Margaux. Un rapide coup d’œil en direction de Guillaume confirme votre crainte : il fait la tronche comme il ne l’a jamais faite, d’autant plus que vous apprendrez plus tard que Margaux s’est parfaitement bien débrouillée, presque prête à partir à l’assaut des vagues. S’il avait nourri l’ambition de l’impressionner sur la planche, c’est raté. Son amour propre accuse une chute d’au moins 40%, mais il s’en remettra.
Jeudi 13 août
Le temps gris et la chute assez brutale des températures vous obligent à improviser. Après un nouveau conseil de famille (bien sûr sans Guillaume, qui essaye de renouer avec Christyntje via WhatsApp), vous optez pour une visite thématique du bassin d’Arcachon, celle des cabanes.
Contrairement à ce qu’auraient pu attendre votre mari et votre fille, ce ne sont pas les cabanes ostréicoles qui ouvrent le bal, mais celles de Biganos.
« Pouah, ça sent pas bon ! » s’exclame Alexia dans la voiture. Effectivement, une odeur de choux mal cuits et d’œuf pourri envahit rapidement l’habitacle. Soupçonneuse, vous tournez machinalement la tête vers votre mari, qui vous regarde, étonné. Allez, une rapide recherche sur Internet vous apprend que Biganos (en fait Facture, située à côté) accueille l’usine Smurfit Kappa, dédiée à la production de papier kraft, mais aussi réputée pour générer cette désagréable odeur, due au sulfure d’hydrogène (oui, celui qui entre dans la composition des boules puantes).
Arrivés au port de Biganos, Christophe continue de renifler ses vêtements et ordonne de laisser toutes les vitres de la voiture baissées. Pour votre part, vous êtes déjà sous le charme de l’endroit.
Le port se situe sur le delta de la Leyre, influencé par le Bassin, qu’il relie, et la rivière, qui l’alimente. Ici, les poissons de mer et d’eau douce se retrouvent dans une eau saumâtre, que l’on dit d’excellente qualité. Les bateaux de plaisance remontent parfois l’Eyre pour rejoindre le bassin, à travers un paysage sauvage et préservé, où les roseaux, les saules et les baccharis se développent en toute quiétude.
« On aurait pu faire une balade en canoë », regrette Alexia en voyant les petites embarcations jaunes rangées sur la rive.
C’est vrai, mais la découverte des cabanes multicolores vous incite plutôt à vous en approcher. Ces petites maisons de bois ont été construites par les paysans de Biganos, qui abandonnaient un peu leurs terres en hiver pour se consacrer à la pêche. Elles permettaient de stocker le matériel, de préparer les repas et de faire face aux intempéries (et plus difficilement aux épisodes de crue).
Les cabanes n’ont été peintes que bien plus tard, lorsque le port a été classé en zone protégée dans les années 1990. Cette multitude de couleurs participe à la beauté de l’endroit, qui cherche à rester confidentiel.
Port de Biganos – Crédit photo: FranceSudOuest
Ce moment de quiétude vous accompagne tout au long du trajet jusqu’à Andernos-les-Bains, réputé pour son port ostréicole de 44 cabanes. La visite vous permet d’en apprendre davantage sur le processus d’affinage et de finition des huîtres. Alexia s’étonne de la présence de ces nombreuses piscines, mais vous lui indiquez qu’il s’agit en fait de bassins dégorgeoirs, remplis d’eau de mer à la qualité irréprochable. C’est d’ailleurs la dernière étape avant la consommation.
« Et si justement on allait en déguster une p’tite douzaine, avec un bon verre de blanc sec ? » propose votre mari.
« Ah beurk, j’aime pas les huîtres ! » proclame Alexia. « J’espère qu’ils ont un menu enfant. »
Vous lui expliquez que les cabanes ne sont pas des restaurants, mais des lieux de vente gérés par les producteurs. Elle pourra quand même se régaler de crevettes, de bigorneaux et même de pâté !
Sur la terrasse en bois, le deuxième verre d’Entre-Deux-Mers vous tourne un peu la tête. Vous appréciez votre repas, la vue magnifique du Bassin, le retour des bateaux de pêche et l’ambiance détendue du lieu. Seule Alexia semble contrariée.
« J’ai encore faim », finit-elle par avouer.
Pas de souci. Après le déjeuner, vous décidez de longer la plage d’Andernos jusqu’à la jetée, derrière laquelle se tiennent suffisamment de crêperies, restos ou pubs pour sustenter un régiment. Votre fille se calme assez rapidement après avoir englouti une crêpe qui déborde de Nutella et de Chantilly.
C’est le moment d’impressionner votre petite famille en lui annonçant le départ imminent du bateau qui vous mènera jusqu’à l’île aux Oiseaux, dernière étape de votre parcours thématique. C’est fois-ci, ce sont les célébrissimes cabanes tchanquées du bassin qui attireront votre curiosité et votre objectif photo.
Juste le temps de recevoir un bisou admiratif de votre fille et vous vous dirigez au petit trot vers la jetée Louis David, qui, par manque de chance, est la plus longue du Bassin avec ses 232 mètres. Au bout, un petit bateau attend ses derniers passagers avant de mettre le cap à l’ouest.
Pendant le trajet, vous expliquez à Alexia que les cabanes tchanquées constituent en quelque sorte l’identité du bassin d’Arcachon. Elles portent ce drôle de nom en référence aux chancas, les échasses en gascon puisque les deux maisons reposent sur des pilotis.
La toute première a été édifiée sur un banc de sable en 1883 par Martin Pibert, ostréiculteur. Elle servait avant tout à surveiller les parcs à huitres, en offrant une impressionnante perspective du domaine ostréicole. Une grosse tempête la désagrège en 1943 et ses quelques vestiges (essentiellement les piliers) se découvrent à marée basse.
Néanmoins, le Bassin ne reste pas longtemps privé de cabane tchanquée puisqu’un charpentier d’Arcachon, Landry, entreprend la construction d’une nouvelle au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Reconnaissable grâce à sa teinte marron et ses volets rouges, elle se situe non loin de la première, dont elle reprend l’architecture.
En 1948, c’est au tour de Julien Longau, maire-adjoint aux travaux de La Teste et entrepreneur, d’ériger la sienne, juste à côté de celle de M’sieur Landry.
Bien sûr, vous les avez vues des dizaines de fois en photo ces fameuses cabanes tchanquées, mais les observer à toute proximité vous impressionne quand même. C’est un peu le sentiment d’approcher une star de cinéma.
« On peut les visiter ? » demande Alexia, elle aussi subjuguée.
« Non, elles sont fermées au public » répondez-vous, un peu désolée.
La maison aux volets blancs – Crédit photo : Grand Parc – Bordeaux – CC BY 2.0
Il s’en est pourtant fallu de peu, puisque la deuxième maison, cédée en 1988 à la commune de La Teste, devait se transformer en musée, après avoir reçu de très importants travaux. Mais le projet n’a pas enthousiasmé le nouveau maire élu en 2008, ce dernier n’envisageant que les contraintes liées aux visites : marées, navettes, nombre réduit de visiteurs.
Si les cabanes tchanquées attirent tous les regards, il convient de rappeler quand même que l’ile aux Oiseaux en accueille une cinquantaine d’autres, réparties entre différents « quartiers » : Port de l’Île, Afrique, Îlot, Saous et Truc Vert. Certes, elles ne sont pas dotées de piliers, mais leur charme reste intact.
De retour à la villa, Alexia se charge de résumer votre journée à vos voisins avant de rejoindre son frère et Margaux dans la piscine. Une douce soirée estivale s’annonce.
Vendredi 14 août
C’est le dernier jour de vos vacances en Gironde et vous constatez que vous n’avez pas encore posé la serviette sur une plage du littoral.
« C’est quand même un peu dommage » fait remarquer votre mari, qui regarde tristement son maillot de bain tout neuf.
Soit, mais vous n’envisagez quand même pas la journée entière sous le parasol. Un compromis s’impose en conseil familial. La matinée se consacrera à la visite de la réserve ornithologique du Teich, située à quelques kilomètres, et l’après-midi permettra de rejoindre la plage de la Lagune, au Sud de la dune du Pilat.
Afin d’inciter votre fiston à vous rejoindre, vous promettez un très bon déjeuner au restaurant de la plage, réputé pour ses gigantesques burgers.
« Est-ce que Margaux peut venir ? » qu’il demande, sans même vous regarder.
« Si elle aime les oiseaux. »
Ouverte en 1972, la réserve s’étend sur une grosse centaine d’hectares. Son environnement se compose de prairies, de petites forêts, de lagunes et bien sûr de marais maritimes, au regard de sa proximité avec le Bassin d’Arcachon.
La réserve offre l’opportunité, pour les visiteurs, d’observer les 363 espèces ou sous-espèces d’oiseaux qui la fréquentent lors des épisodes de migration. On peut notamment y voir des cygnes chanteurs, des bernaches du Canada, des canards à front blanc, des hirondelles rousselines, des goélands et même des chouettes hulottes.
Certes, l’été n’est peut-être pas la saison idéale d’observation puisque deux grandes périodes remplissent le calendrier de réservations de la réserve :
– La migration prénuptiale, de fin janvier à début juin. – La migration postnuptiale, de juin à décembre.
Néanmoins, la diversité des espèces qui viennent souffler quelques heures ou quelques jours à la réserve permet de les admirer tout au long de l’année. La période estivale est également celle de la fin de la nidification, au cours de laquelle les poussins de râle, nés sur place et devenus plus forts, quittent le nid pour affronter leur destin.
Un râle d’eau et son petit, aperçus à la réserve du Teich – Crédit photo : Cédric Deplanque – Flickr
La visite s’organise autour d’un sentier en boucle de 6 km, permettant de traverser tous les types de paysage.
Armée de ses jumelles, Alexia se montre ravie, d’autant plus lorsqu’elle aperçoit la première des vingt cabanes d’observation.
« Maman, tu aurais pu l’inscrire dans notre programme d’hier ! »
Charmante enfant. De son côté, Guillaume fait mine de viser les lointains oiseaux, un œil ouvert, l’autre fermé.
« Avec un fusil de chasse, on ferait un beau carton ici ! » plaisante-t-il.
Vous vous promettez, une fois rentrée à Gentilly, de faire des recherches approfondies sur l’âge bête qui touche les ados, le vôtre en étant particulièrement victime.
Trois heures plus tard, le petit groupe sort enchanté de la réserve. Votre mari a pu profiter de son objectif à longue focale, même si les premières photos qu’il vous montre semblent un peu floues.
« Mais non ! » rétorque-t-il vexé.
En début d’après-midi, après avoir gavé les enfants de hamburgers, de frites et de glaces, vous atteignez enfin votre territoire hautement touristique : la plage. Et vous n’êtes pas déçue. Des centaines de vacanciers ont pris assaut du sable blond, en restant proches de la zone de baignade surveillée. C’est un feu d’artifice de parasols, de tentes Décathlon, de serviettes multicolores et vous vous dites que c’est aussi ça, les vacances.
Ravie, vous trouvez un périmètre à peu près convenable, pas trop éloigné de l’eau.
« Il paraît qu’il y a des naturistes pas très loin d’ici, c’est sympa » annonce Guillaume à Margaux, qui se contente de lever les yeux au ciel.
« En tout cas, il n’y a pas de vagues et tu ne vas pas pouvoir surfer. C’est pas de chance » lui rétorque son père.
Margaux affiche un grand sourire.
Alexia s’est déjà rapprochée de l’océan pour chercher de l’eau et entreprendre la construction d’un château de sable. Votre mari regarde désespérément l’écran de son appareil photo pour constater que TOUTES ses photos sont floues. Guillaume et Marion se précipitent vers la mer, où ils resteront longtemps.
Quant à vous, vous vous réjouissez du spectacle que peut offrir une plage en pleine saison estivale. Des enfants qui rient, d’autres qui courent avec les parents derrière, qui courent aussi en criant, les MNS qui utilisent leur sifflet toutes les 10 minutes (d’ailleurs, l’un d’eux a concerné Guillaume), les familles nombreuses, les jeunes couples qui s’embrassent sous le soleil, les grands-parents qui longent la plage, les pieds dans l’eau, les hommes un peu trop gros qui rentrent le ventre, les femmes qui décident finalement de se passer du haut de leur maillot de bain, les visages rouges frappés un coup de soleil…
Bref, vous nagez en plein cliché et ça vous ravit.
Samedi 15 août
Il est 10 heures et vous terminez l’inspection de votre appartement en compagnie du propriétaire, qui vous rend votre chèque de caution.
La voiture a englouti tous vos bagages.
Guillaume s’attarde auprès de Margaux, dont les vacances se terminent. Peut-être se retrouveront-ils à Gentilly. Peut-être pas.
Pour votre part, une semaine supplémentaire de congés payés vous attend dans les Cévennes. Une charmante location au milieu de nulle part, avec une grande piscine (non mitoyenne cette fois) et, paraît-il, une vue extraordinaire sur les collines et les forêts.
Ce seront des vacances plus paisibles et plus familiales. Bien sûr, vous êtes ravie de cette perspective, mais, bizarrement, après que votre mari ait enclenché la première et que la voiture ait parcouru ses premiers mètres, vous continuez de fixer le rétroviseur, le cœur un peu serré, alors que la villa s’éloigne.
« On pourrait revenir en Gironde l’année prochaine, ici ou dans un autre lieu » proposez-vous enfin à la famille, qui approuve immédiatement votre idée. Seul Guillaume reste complètement détaché, les yeux rivés sur son smartphone. Il faut dire que le père de Margaux vient de lui envoyer les photos de sa session de surf.
Hasparren, la richesse des Pyrénées à proximité de l’Atlantique
Située à 25 km de l’océan et au pied de la chaîne pyrénéenne, Hasparren jouit d’un environnement propice à la découverte des paysages et de la culture basques.
Olivier Sorondo 22 janvier 2020
Crédit photo : Mariano Mantel – Flickr
Histoire de la cité
Situé au cœur d’un site protohistorique, comme en témoignent les grottes d’Oxocelhaya, le village d’Hasparren («Hazparne» en basque) est considéré comme un oppidum (cité fortifiée) au cours de l’Antiquité, habité par la tribu protobasque des Tarbelles.
Hasparren se développe au Moyen-Âge grâce aux activités de tannerie et de buanderie, profitant du passage des nombreux pèlerins en route vers Saint-Jacques-de-Compostelle.
En 1784, la célèbre révolte des femmes, alimentée par des rumeurs de gabelle, pousse l’intendant de Guyenne Néville à se venger en faisant abattre le clocher de l’église, qui ne sera reconstruit qu’en 1816.
Au 19e siècle, l’industrie de la chaussure s’installe dans la commune grâce au savoir-faire séculaire des tanneurs. D’abord locale et destinée à être vendue sur place les jours de marché, la production gagne en ambition au fil des décennies et se diffuse à Bordeaux, Toulouse et même en Afrique du Nord, en Argentine et en Uruguay par l’intermédiaire des Basques installés dans ces régions du monde. L’activité perdure jusque dans les années 1960.
Les frères Elhuyar, à l’origine de la découverte du tungstène (1761) et le poète Francis Jammes (1868-1938) restent les personnalités les plus marquantes d’Hasparren.
Balade en ville
Située au pied des Pyrénées, Hasparren se décompose en un ensemble de onze quartiers bâtis à flanc de collines et parfois distants de plusieurs kilomètres du bourg, très resserré. L’architecture des vieilles maisons («exte») reflète les influences des provinces du Labourd et de la Basse-Navarre. Les façades sont riches de nombreux détails d’ornementation.
Reconstruite en 1879, l’église Saint-Jean-Baptiste figure parmi les plus vastes édifices religieux du Pays Basque, capable d’accueillir plus de 800 fidèles. Les visiteurs peuvent y apprécier la nef et les galeries des hommes, typiques des églises basques.
C’est également à cet emplacement que l’on découvrit, en 1660, la pierre romaine gravée datant du IIe siècle et classée aux Monuments historiques : « Flamine, duumvir, questeur et magister du canton, Verus ayant accompli la mission qui lui avait été confiée auprès de l’empereur, obtint pour les neuf peuples qu’ils se séparent des Gaulois ; à son retour de Rome il dédie cet autel au génie du canton ». L’inscription pourrait faire référence à l’opposition entre les neuf peuples aquitains aux peuples gallo-romains ou bien au contraire évoquer la réunion de la Novempopulanie à la Gaule, selon les historiens.
La nouvelle chapelle du Sacré-Cœur, bâtie de 1928 à 1931 grâce à l’initiative du chanoine Pierre Lopez de la Vega, permet de découvrir des éléments de décor de style Art déco, à l’instar de ses fresques représentant les 46 saints honorés par les Basques. La mosaïque du chœur ne manque pas non plus d’attirer le regard grâce à sa représentation du Christ au cœur apparent, les bras ouverts en signe d’accueil. La chapelle est classée aux Monuments historiques depuis 1996.
Parmi les opportunités de visite, il convient également de signaler la Maison Eyharytzea, au centre bourg, léguée en 1921 au poète Francis Jammes et à sa nombreuse famille. C’est aujourd’hui un musée ouvert l’été.
Pause gourmande et festive
Hasparren, fidèle à la tradition basque, est une terre de bonne chère et de fêtes. L’autorisation d’ouverture du marché, accordée par Louis XIV en 1656, impose la petite ville comme un rendez-vous incontournable pour la population. « Le marché d’Hasparren, dont la position géographique limitrophe de la Basse-Navarre est avantageuse pour les Navarrais, les Souletins, les Béarnais et les Chalossais, fait qu’ils ne vont pas aller chercher un marché dans l’intérieur du pays alors qu’ils en ont un plus proche » écrit ainsi un intendant de la province au XVIIe siècle.
Aujourd’hui, la commune continue de faire vivre cette culture des marchés, dont le marché aux produits fermiers, tous les samedis matin, ou le grand marché, ouvert chaque mardi sur la place des Tilleuls.
Les amateurs de bonnes choses peuvent aussi se tourner vers les producteurs et commerçants locaux, à l’image de la famille Ospital, qui contribue à perpétuer la tradition millénaire du jambon en élaborant le fameux jambon de Bayonne estampillé « Ibaïona ».
C’est aussi l’occasion de déguster le fromage de brebis, fabriqué à partir du lait de la manech tête rousse ou tête noire, une race locale, ou de découvrir le taloa au fromage et à la ventrèche, une galette de farine de maïs.
Parmi les nombreuses festivités, la fête Dieu (ou Besta Berri) est célébrée au mois de juin depuis déjà quelques siècles. Organisée sous la forme d’une procession, elle donne l’occasion aux participants de revêtir des costumes colorés, rappelant l’uniforme des soldats napoléoniens, et de danser au son de la musique.
Découvertes des environs
Route Impériale des Cimes Les férus d’histoire et de chaussures de marche ne bouderont pas leur plaisir en empruntant la route impériale des cimes, à toute proximité d’Hasparren. Longue de 25 kilomètres, elle relie les villes de Bayonne et Saint-Jean-Pied-de-Port. Tracée sur ordre de Napoléon, elle permit aux troupes impériales de rallier Saint-Jean-Pied-de-port lors de la guerre d’indépendance espagnole, au début du XIXe. Elle a toujours été privilégiée par les voyageurs grâce à son accessibilité et sa praticabilité, même en hiver.
Riche de son passée, la voie est également réputée pour offrir des vues exceptionnelles de paysages, notamment de la côte ou des massifs pyrénéens.
La Bastide-Clairence (Bastida de Clarenza) La Bastide-Clairence, construite au XIVe siècle à l’initiative de Louis 1er de Navarre et située en Pays d’Hasparren, est un exemple typique du village navarrais, avec ses maisons aux façades richement dotées de colombages. Son église est classée aux Monuments historiques, notamment grâce à son remarquable porche roman.
Bastida de Clarenza, qui figure parmi les plus beaux villages de France, accueille depuis toujours de nombreux artisans d’art. Chaque année, au début du mois de septembre, le marché de la céramique permet d’exposer les dernières créations locales.
Grottes d’Isturitz et Oxocelhaya Les deux grottes constituent l’un des plus importants sanctuaires du paléolithique en Europe. Les galeries, ornées de gravures et peintures, montrent que ces lieux furent habités de 80 000 à 15 000 avant J.C.
La succession des vastes salles, richement pourvues en concrétions, constitue également un spectacle unique.
Enfin, des randonnées pédestres balisées autour de ce site permettent de prolonger le plaisir.
Le Mont Ursuïa Le Pays d’Hasparren est dominé par les monts Baigura et Ursuïa. Ce dernier, surnommé la « montagne des sources » et d’une hauteur de 698 mètres, offre un vaste panorama sur les Pyrénées, l’océan Atlantique, les forêts de pins landaises et les villages basques situés alentour. L’ascension du mont Ursuïa, à pied ou en VTT, permet de repérer quelques vestiges protohistoriques et d’apprécier la faune, en ayant un œil attentif sur les pottoks, les célèbres petits chevaux du Pays Basque.
Richesses du Pays d’Hasparren
Parmi les dix communes du Pays d’Hasparren, Helette (Heleta) organise tous les ans (mars et novembre) depuis 1750 sa célèbre foire aux pottoks (prononcer pottiok) ou encore les danses de la Fête Dieu, dernier vestige des danses religieuses en Europe. La commune de Mendionde (Lekorne) constitue une étape gourmande idéale avec ses restaurants réputés, sans omettre la coopérative Berria de Macaye (Makae), spécialisée dans la production de fromages de brebis et de vaches. Enfin, Meharin (Mehaine) propose des défis de force basque, étroitement associée à la culture du pays.
La pelote basque est étroitement liée à l’histoire de la cité, qui a donné naissance à de grands champions, dont Gaskoïna et Yats, devenus des figures légendaires. En 1935, la société Noizbaït voit le jour et permet à bon nombre de joueurs et de dirigeants de confirmer la réputation d’Hasparren en matière de pelote. Chaque quartier possède son fronton, sans parler des deux trinquets et du fronton mur à gauche intégré à la salle polyvalente communale, qui sont autant d’invitations à se laisser tenter.
Plus généralement, Hasparren et les communes avoisinantes sont particulièrement actives avec près de 3000 licenciés sportifs et de nombreuses infrastructures.
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