Nature et paysages des Landes

Nature et paysages des Landes


« La forêt, cathédrale sans fin sous le ciel atlantique » – Alain Dubos, Landes de terre et d’eaux (éditions Passiflore).

Si elle constitue l’identité première du département, la forêt des Landes de Gascogne, dont la superficie frôle certes les 70 % du territoire, ne saurait faire oublier la richesse des paysages et la diversité de ses 14 pays, regroupés au sein de trois grandes zones géographiques.

Le plateau landais

Localisé au Nord de l’Adour, le plateau landais, qui englobe les Grandes Landes, est essentiellement composé de forêts, affichant des paysages aux lignes horizontales et droites. Nous sommes ici aux confins des Landes de Gascogne, qui ont remplacé à partir du XIXe siècle, sous l’impulsion du botaniste Chambrelent, la lande pastorale et les zones marécageuses.

La monotonie des paysages, due à la surabondance des pins maritimes, n’est qu’apparence. « Si une vision superficielle de la forêt peut amener l’impression d’une profonde tristesse liée à celle d’une lassante uniformité, cette réaction est le résultat d’une totale méconnaissance du milieu. Dans l’atmosphère paisible de ces grands arbres qui se balancent doucement au gré du vent, il faut suivre les sentiers sinueux de sable fin que bordent les massifs de bruyère et de genêts, ou longer les petits ruisseaux d’eau limpide à travers les fougères. Au creux d’un vallon, découvrir une lagune pittoresque, au détour d’un chemin, une charmante clairière, et par une belle journée d’été, dans cette ambiance de calme et de solitude reposante, écouter le chant gracieux de la cigale ou celui du coucou » écrit avec majesté Philippe Soussieux dans son livre le Guide des Landes (éditions La Manufacture – 1986).

Les Hautes Landes – Crédit photo : Marie Anne ROBERT – Own work, CC BY-SA 4.0

Plus à l’est, la forêt finit par trouver sa limite et laisse la place à des paysages de coteaux, sur lesquels l’homme fait pousser la vigne depuis des siècles. Nous sommes ici dans la région du Bas-Armagnac, célèbre (et célébrée) dans le monde entier pour sa précieuse eau-de-vie.

Au nord du Bas-Armagnac se détache le pays de Gabardan, limitrophe du Gers, où l’on découvre la forêt de pins, appelée ici Petites Landes, mais aussi des terres dédiées à la polyculture. Les rivières y sont nombreuses et serpentent à travers les forêts avant de devenir plus encaissées dans les gorges calcaires à proximité de Roquefort, situées plus à l’ouest. La nature y est omniprésente et préservée, se partageant entre landes humides et landes sèches dédiées à la sylviculture, où genêts et bruyères constituent souvent un sous-bois harmonieux. Le pays peut se découvrir grâce à la dizaine de parcours de randonnées, empruntant parfois les voies de Saint-Jacques-de-Compostelle.

Les pays de l’Adour

À la différence des Landes de Gascogne, les pays de l’Adour profitent d’une terre fertile, où vallons et plaine alluviale dessinent des paysages changeants.

Sur la rive gauche de l’Adour, on embrasse les territoires du Tursan, de la Chalosse et du pays d’Orthe. Le relief y est plus marqué et annonce déjà le massif pyrénéen. Le point culminant se trouve à Lauret, à 234 mètres d’altitude.

Les coteaux forment une grande partie du paysage et ont contribué à développer l’activité agricole, notamment l’exploitation viticole, sous l’appellation des vins de Tursan (AOC), que l’on servait déjà à la table des empereurs romains.

On y trouve également de nombreuses rivières, qui prennent naissance à partir de l’Adour et de ses affluents.

La Chalosse, située plus à l’ouest, offre des paysages remarquables, composés de bois de feuillus, de vallées, de coteaux, de rivières (le Louts et le Luy) et de larges prés au sol argileux. Grâce au bocage, le pays dévoile une alternance de terres cultivées et de bosquets, composant de magnifiques panoramas.

Le littoral

Le littoral landais se prolonge sur plus d’une centaine de kilomètres, bordé d’un imposant massif dunaire, constamment surveillé et entretenu par l’homme afin de renforcer sa fixation et éviter que le sable ne s’engouffre vers l’intérieur des terres.

Au nord du département, à hauteur de Mimizan, les dunes sont dites anciennes et de forme parabolique, formées lorsque le niveau de la mer était plus bas que celui d’aujourd’hui. Elles offrent les conditions de pousse idéale aux fougères et arbousiers.

Plage de Mimizan – Crédit photo : Office Intercommunal de Tourisme de Mimizan

Viennent ensuite les dunes plus récentes et longitudinales, qui se sont élevées au fur et à mesure de la progression de l’océan, plus « mobiles » selon les passages venteux

Les villages historiques du littoral, dont l’activité était essentiellement axée vers l’exploitation forestière et la culture viticole (vin de sable), ont vu au cours du XXe siècle apparaître des stations balnéaires, attirées par le potentiel de ces longues plages. Chaque année, des dizaines de milliers de touristes viennent profiter du sable blond, du soleil chaud et de l’agréable fraicheur de l’océan Atlantique, oubliant parfois le danger que représentent les baïnes, dont la force du courant constitue un piège redoutable et souvent mortel.

Derrière les dunes s’impose la majestueuse forêt de pins maritimes, où l’on trouve quand même des chênes-lièges ou pédonculés. C’est le décor parfait pour une gentille randonnée en VTT sur l’une des innombrables pistes cyclables mises à la disposition du public.

On trouve également tout au long de la bande littorale de très nombreux plans d’eau, nés de la barrière que constituent les dunes aux rivières côtières. Des dizaines d’étangs et de lacs agrémentent ainsi les paysages, du sud au nord, où l’on trouve et apprécie les étangs de Cazaux et Sanguinet (idéaux pour la baignade des enfants), de Biscarrosse, le lac d’Aureilhan et le courant de Contis. Au sud, le lac de Soustons, le courant d’Huchet ou encore le lac marin d’Hossegor (considéré comme « un joyau serti dans l’ombre et la clarté », selon le poète Maurice Martin) s’offrent à la vue ébahie des visiteurs.

Éléments d’histoire des Landes

Éléments d’histoire des Landes


De la sculpture de la Dame de Brassempouy à la visite de l’empereur romain Auguste aux thermes de Dax, de la formidable saga de la famille d’Albret à la naissance de la forêt des Landes de Gascogne, le département affiche une histoire mouvementée et passionnante.

Des fouilles et des merveilles

Si la Dordogne doit beaucoup à l’abbé Breuil (1877-1961), surnommé à juste titre le pape de la préhistoire, le territoire des Landes a pu révéler ses richesses archéologiques grâce à la volonté et à l’abnégation de Jacques-François de Borda d’Oro (1718-1814), mathématicien et naturaliste, passionné de préhistoire, collectionneur de silex taillés et auteur d’une œuvre abondante sur les fossiles et les fondements de la paléontologie locale (1500 pages au moins à lire et sans aucune vidéo publiée sur YouTube. Dur).

Le mouvement initié par Borda d’Oro est repris par différentes personnalités, dont le capitaine Pottier (1836-1886), qui découvre en 1870 les abris préhistoriques de la falaise du Pastou, à Sorde-l’Abbaye, longtemps habités par les Magdaléniens.

Des fouilles plus minutieuses entreprises en 1874 révèlent la présence de quatre gisements : Duruthy, Grand Pastou, Petit Pastou et Dufaure. On y trouve les restes d’une trentaine de squelettes humains, au côté desquels gisent des outils en silex, en os et en bois de renne, des pointes de sagaie et des harpons, également fabriqués à partir de bois de cervidé.

Le gisement de Duruthy en particulier fait la joie des archéologues lorsqu’ils découvrent divers objets d’art, dont des éléments de parure, notamment ceux fabriqués à partir de dents d’ours et de lion, décorés et percés.

Près d’un siècle plus tard, entre 1958 et 1987, le professeur Robert Arambourou, chargé de recherche au CNRS, organise différentes fouilles dans les abris. Elles permettent de mettre à jour des trésors du Magdalénien, dont la célèbre statuette en grès d’un cheval agenouillé.

À quelques dizaines de kilomètres de Sorde-l’Abbaye, à Brassempouy, une découverte majeure va secouer le petit monde de l’archéologie. En 1894, Joseph de Laporterie et Édouard Piette recueillent plusieurs fragments en ivoire de statuettes féminines, dont la tête à capuche ou dame de Brassempouy, l’une des plus anciennes représentations de visage humain. La pièce n’est pas impressionnante par sa taille (36 millimètres de haut et 19 millimètres de large) mais par son histoire (-25 000 ans) et surtout par son élégance et la finesse de son travail. La bouche et les yeux ne sont pas gravés. En revanche, le menton, le nez et les arcades sourcilières sont en relief. Le quadrillage qui orne son crâne peut faire penser à une représentation capillaire.

L’œuvre a ému de nombreux scientifiques et écrivains tout au long des décennies et montré que les hommes et femmes de cette période étaient capables d’une vraie sensibilité artistique. Elle est aujourd’hui conservée au musée des Antiquités nationales de Saint-Germain-en-Laye.

Il semblerait que le territoire fût privé de présence humaine pendant de longs millénaires après la période glaciaire, jusqu’au Néolithique final.

Les archéologues ont retrouvé des pièces de l’âge du Bronze, comme des bracelets, des pointes de lance et des haches, ainsi que des traces de premières enceintes à bestiaux. Les découvertes relatives à l’âge du Fer correspondent essentiellement à des tumuli, qui abritent des pots de terre cuite enfermant des cendres humaines. Ces tumuli sont, entre autres, situés dans les régions de Pomarez, de Vicq d’Auribat ou d’Arboucave.

Conquête romaine, invasions barbares et occupation anglaise

À l’instar des autres départements de l’Aquitaine, la très longue période entre l’époque gallo-romaine et le Moyen-Âge ne fut pas forcément la plus joyeuse pour les Landes.

Avant l’invasion de l’Aquitaine par le général Crassus, en 56 av. J.-C., le futur département est occupé par quelques tribus d’origine celto-ibérienne : les Tarbelli dans la région de Dax et de l’Adour, les Tarusates dans le pays de Tartas, les Bercorates et les Aquitaniens au Nord de l’Adour, les Élusates et les Sotiates aux frontières du Gers et du Lot-et-Garonne.

La présence romaine est plus difficilement lisible dans les Landes que dans d’autres territoires du Sud-Ouest, à cause, peut-être, de son environnement difficile et sauvage, de la mauvaise qualité des terres empêchant de vraies ambitions agricoles et de l’omniprésence des marais. Les hommes y sont peu nombreux et les cités relativement modestes.

Selfie de l’empereur Auguste, lors de son court séjour à Dax – Crédit photo: © Marie-Lan Nguyen / Wikimedia Commons
Selfie de l’empereur Auguste, lors de son court séjour à Dax – Crédit photo: © Marie-Lan Nguyen / Wikimedia Commons

La ville de Dax (Aquae Tarbelli) échappe pourtant à la règle. Grâce à ses sources d’eau chaude, très appréciées des légions romaines, elle prend une ampleur conséquente. On y construit des thermes, un temple, des villas et autres lieux de villégiature. La visite de l’empereur Auguste, qui daigne en personne prendre les eaux avec sa fille, assure une large campagne marketing à la cité thermale, considérée comme the place to be au sein de l’Empire.

Même l’empereur Auguste daigna se rendre à Dax.

Au IIIe siècle, les Romains déploient une nouvelle organisation administrative qui, à l’échelle de l’Aquitaine, prend le nom de Novempopulanie, ou pays des Neuf Peuples. C’est une période importante pour le territoire des Landes, synonyme de multiples projets et travaux. Des voies principales sont construites entre Bordeaux et l’Espagne, permettant aux Landais de vendre des peaux, du fer, du millet ou encore du miel. Les cités se développent, à l’instar d’Aire-sur-l’Adour ou de Mont-de-Marsan, dont le nom est tiré du temple de Mars.

Des fermes d’exploitation font leur apparition. Sur le littoral, le business du coquillage se développe. De somptueuses villas sont construites dans le sud du territoire. La Pax Romana semble s’accompagner d’une vie plus prospère, agréable et mieux organisée.

Le problème avec les empires, c’est qu’ils finissent toujours par tomber, laissant planer la crainte d’un avenir un tantinet moins douillet. Ce fut précisément le cas dans les Landes comme dans les autres contrées de l’Aquitaine. Dès le Ve siècle, les invasions dites barbares se succèdent gentiment pendant quelques (très longs) siècles. Wisigoths, Gascons, Arabes, Normands… Et vas-y que je tue, et vas-y que je viole, et vas-y que je brûle et pousse-toi d’là que je m’y mette. Quel manque de tact, franchement.

Au IXe siècle, un système féodal se met en place au sein du duché de Gascogne, poussé par la nécessité de se protéger des multiples attaques des envahisseurs. Des forteresses, des « caveries », des « capacazaux » sont édifiés, au gré de la hiérarchie seigneuriale. Même l’Église s’implique dans la protection de ses ouailles en bâtissant des sauvetés, de petits asiles dédiés à l’accueil des plus miséreux.

Depuis son château de Labrit, la Maison d’Albret s’impose comme le fief le plus important de la Gascogne, dont certains membres de la famille accèderont à la royauté. Les Albret participent à la première croisade (1096-1099). Ils s’appuient sur leur relation privilégiée avec le pape Clément V, ancien archevêque de Bordeaux, choisissent de rester fidèles aux Plantagenêt ou de rallier le roi de France en fonction de la conjoncture.

En 1368, le roi Charles V marie sa belle-sœur Marguerite de Bourbon à Arnaud-Armanieu d’Albret dans l’espoir d’une alliance solide entre le royaume de France et la puissante contrée gasconne.

En 1470, les Albret héritent du comté du Périgord et de la vicomté de Limoges. Une quinzaine d’années plus tard, la Navarre rejoint le patrimoine familial grâce au mariage de Jean d’Albret et de Catherine de Foix. Parmi les treize enfants nés de cette union, Henri II d’Albret (né en 1503), roi de Navarre, épouse Marguerite d’Angoulême, sœur de François 1er. Leur fille Jeanne d’Albret entrera dans l’Histoire de France comme la future mère du roi Henri IV.

C’est l’apogée de la famille d’Albret. Après cinq siècles d’ascension, nourris de combats, d’ambitions et de calculs, ayant apporté richesse, pouvoir et vastes propriétés terriennes, la noble maison subira l’invasion du royaume de Navarre puis l’asphyxie progressive de sa puissance tout au long du XVIe.

Quelques siècles plus tôt, le mariage d’Aliénor d’Aquitaine et d’Henri Plantagenêt en 1154 a placé la Guyenne et la Gascogne sous suzeraineté anglaise. Les Landes sont dès lors administrées par le sénéchal de Gascogne. C’est une période troublée, synonyme de luttes incessantes entre rois et seigneurs locaux, entre Anglais et Français, entre Plantagenêt et Valois. Les tensions perdurent jusqu’en 1346, date du début de la guerre de Cent Ans, qui s’achèvera lors de la célèbre bataille de Castillon, en 1453. Les Anglais quittent définitivement le Sud-Ouest et le royaume de France.

Les guerres de religion d’abord, la Fronde ensuite

Le futur département paye un lourd tribut aux guerres de religion, du fait de la relation étroite entre le territoire et les Albret et de la proximité avec le Béarn, terre protestante. L’intransigeance de Jeanne d’Albret génère de fortes tensions et des combats sanglants. En 1569, la reine de Navarre fait appel au comte de Montgomery pour reprendre ses États occupés par les armées catholiques. Ce dernier s’exécute et reconquiert le Béarn, Saint-Sever, Mont-de-Marsan avec une rare cruauté, exécutant les prisonniers catholiques et brûlant des centaines d’églises, d’abbayes et de châteaux. L’intervention de Blaise de Montluc, maréchal de France et serviteur du roi Charles IX, met un terme aux ambitions du comte de Montgomery. En septembre de la même année, son armée s’empare de Mont-de-Marsan et massacre la garnison huguenote.

Blaise de Monluc, maréchal de France, pourfendeur du comte de Montgomery et des armées protestantes à Mont-de-Marsan.

L’édit de Nantes, promulgué par Henri IV en 1598, met un terme aux guerres de religion, particulièrement cruelles dans les Landes et en terres béarnaises.

Quelques décennies de quiétude relative s’installent dans le beau pays des Landes. Enfin l’espoir d’un avenir meilleur pour nos enfants ? Nan. La Fronde bouleverse le royaume de France à partir de 1648, alimentée par la crise économique, une pression fiscale sans cesse plus gourmande et la volonté du pouvoir d’imposer la monarchie absolue. Les révoltes locales se multiplient. En 1653, le colonel Balthazar tente d’envahir avec ses régiments la Chalosse, dont la défense est assurée par les troupes des seigneurs d’Aubeterre, de Candale et de Poyanne. Les combats affaiblissent la région. Entre 1663 et 1666, une nouvelle révolte chalossaise éclate à la suite de l’instauration de la gabelle. De petites bandes landaises, placées sous la protection du seigneur local, Bernard d’Audigeos de Coudures, n’hésitent pas à s’attaquer aux troupes royales, mettant à profit leur parfaite connaissance du terrain pour organiser des embuscades ou des attaques surprises.

La renaissance des Landes

Sous le Second Empire, un jeune ingénieur agronome, François Jules Hilaire Chambrelent, décide de poursuivre les travaux initiés en 1786 par Nicolas Brémontier, qui fut l’un des premiers à lancer une vaste opération de fixation des dunes littorales ou intérieures en vue de protéger davantage les terres situées à proximité de l’océan.

Chambrelent constate que le sous-sol imperméable facilite les eaux stagnantes en hiver et la sécheresse en été et contribue à rendre le sol infertile, poussant de fait les habitants à une vie difficile, pour ne pas dire miséreuse, cantonnée à l’élevage de moutons (on en comptait près d’un million en 1850 !).

L’ingénieur parvient à organiser un système de drainage des eaux superficielles, en creusant des fossés d’écoulement dans la couche d’alios. Le sol est ainsi assaini, mais n’autorise pas pour autant la culture de céréales. Le salut passera donc par la culture forestière, et particulièrement celle de pins maritimes, parfaitement adaptés à l’environnement géologique. En cinq ans, plus de 20 000 hectares se transforment, donnant naissance à la future forêt des Landes de Gascogne.

Impressionné par le succès de la démarche, l’empereur Napoléon III impose, à travers la loi du 19 juin 1857, un vaste programme d’assèchement des zones marécageuses afin de favoriser leur mise en exploitation.

Les plus curieux pourront lire le roman Maître Pierre, écrit par Edmond About en 1858, qui relate cette formidable aventure.

Une nouvelle activité économique se développe autour du pin maritime, à l’instar de l’exploitation de bois et du gemmage. Le massif forestier ne cesse de s’étendre au fil des années, marquant la fin de l’agropastoralisme et la disparition progressive du célèbre berger landais dominant son troupeau de moutons du haut de ses échasses.

La relation entre l’empereur et le département des Landes est décidément étroite puisqu’en 1861 la commune d’Eugénie-les-Bains voit le jour, en hommage à l’impératrice, habituée à passer quelques jours dans cette petite cité thermale réputée lors de ses déplacements à Biarritz.

Patrimoine et cultures en Lot-et-Garonne

Patrimoine et cultures en Lot-et-Garonne


Ici, la culture nourrit la culture. Depuis toujours, ou presque, la qualité de la terre, l’abondance de l’eau, et la bienveillance du climat ont contribué à faire de cette belle contrée du Sud-Ouest le potager et le verger de la France.

Une tradition avant tout rurale

Les activités agricoles dictent toujours le rythme de vie du département et représentent le cœur de son économie. « Les citadins n’ont jamais rompu avec la campagne et possèdent de solides racines paysannes. Si la bourgeoisie a cédé quasiment la totalité des métairies ou des biens fonciers qu’elle possédait encore, elle a acheté des maisons de maître, les fermes abandonnées par les paysans pendant la phase de concentration de la propriété agricole, pour y établir résidences secondaires ou principales. Ainsi, se poursuit l’osmose entre gens des villes et du milieu rural, renforcée par la pratique fréquente d’un double emploi » écrit Jean-Paul Charrié dans son ouvrage « Le Lot-et-Garonne » (Éditions Sud-Ouest, 2009).

L’agriculture du Lot-et-Garonne se définit avant tout par sa pluralité. Les sols, faciles à travailler, et les structures d’irrigation permettent de favoriser la polyculture.
Tout le long de la Garonne, les cultures maraîchères façonnent les paysages et fournissent des quantités de production parfois impressionnantes : 40 000 tonnes de tomates et de pommes de terre, 30 000 tonnes de melons, 25 000 tonnes de fraises, 10 000 tonnes de haricots verts.

Certaines autres cultures ne bénéficient pas de surfaces aussi importantes, mais participent à la pluralité agricole, à l’image de l’asperge, de la carotte, de la scarole, de l’artichaut et du poivron.

It’s raining vegetables, Alléluia !

Que les amateurs de la chose sucrée se rassurent, ils trouveront ici un véritable paradis grâce aux 16 000 hectares consacrés aux vergers : pommes, poires, prunes, melons, kiwis, raisins, pêches et même des noisettes, dont la production ne cesse d’augmenter.

Le Lot-et-Garonne est aussi une terre de vins, et de bons vins. Les efforts menés par les caves coopératives ont permis d’attribuer l’AOC à quatre vignobles : les Côtes de Duras (1937), les Côtes de Buzet (1975), les Côtes du Marmandais (1990) et les Côtes de Brulhois en 2011.

En conclusion, même si le nombre de chefs d’exploitation est passé de 65 000 à la fin du XIXe siècle à 10 000 à l’aube du XXIe siècle, en raison de la mécanisation, du passage des micro-exploitations à des exploitations plus importantes (42 hectares en moyenne), la tradition agricole reste vivace et humaine en Lot-et-Garonne. Aujourd’hui, 80 % des exploitations sont individuelles et les agriculteurs continuent de préférer, à un niveau respectable, la polyculture plutôt que la spécialisation.

Le pays des bastides et des… pigeonniers

Si le Sud-Ouest est le pays des bastides, le Lot-et-Garonne contribue grandement à cette réputation, avec pas moins de 42 cités en son sein.

Les bastides ont été essentiellement édifiées lors de la guerre de Cent Ans, sous l’impulsion des rois de France et d’Angleterre. Construites sur un même élan, en quelques courtes années, généralement au sommet d’une colline pour mieux surveiller l’environnement, elles ont été à l’avant-garde de l’agencement urbain, en privilégiant un plan qui soit le même partout. Les rues, tracées depuis la halle, se devaient d’être rectilignes, parallèles et perpendiculaires, se coupant à angle droit. Cette astuce géométrique était justifiée par la nécessité faite aux cavaliers de parvenir rapidement aux murs d’enceinte afin de bloquer toute velléité d’intrusion des envahisseurs.

Perchée sur sa colline, la bastide de Monflanquin – Crédit photo : Karen – Flickr

Les habitants devaient respecter la charte de coutumes, mais bénéficiaient de nombreux avantages : participation à la gestion de la ville, allègement des impositions, protection contre les invasions, vie sociale plus dense grâce à la place centrale où les gens aimaient à se retrouver.

Aujourd’hui, les bastides apportent aux paysages du Lot-et-Garonne cette petite touche de magie qui les rend différents. Ainsi, la bastide de Laparade, bâtie à 200 mètres sur un plateau dominant le Lot, offre l’un des plus beaux panoramas du département.

La halle et l’église fortifiée de Villeréal sont typiques du renouveau architectural qui dicta l’édification des bastides. L’église permettait d’accueillir les habitants en cas d’attaque et une vingtaine de défenseurs, postés au sommet des tourelles d’angle. La halle est intéressante grâce à son étage supérieur, utilisé comme comme local municipal.

La bastide de Vianne impressionne par son mur d’enceinte toujours debout, ses tours de défense et ses courtines. Sa création, décidée par le sénéchal du roi d’Angleterre au XIIe siècle, a été justifiée par la volonté de défendre un territoire agricole particulièrement riche.

Autre élément indissociable du patrimoine agricole lot-et-garonnais : le pigeonnier. Le département en dénombre plus de 6 000, ce qui n’est pas rien. Jusqu’au Moyen-Âge, en avoir un était considéré comme un privilège mais, au terme de la Révolution française, leur usage se développe à grande échelle.

La vocation du pigeonnier est d’élever les volatiles appréciés pour leur chair, mais aussi de récupérer leur fiente, appelée colombine, un engrais de premier choix. De plus, le pigeonnier permet d’enfermer les pigeons lors de la période des semailles et de les protéger contre les attaques de rats.

Dans le Lot-et-Garonne, les pigeonniers peuvent dévoiler différentes formes architecturales : pigeonnier à arcades, pigeonnier accolé, pigeonnier auvent.

« Les différents styles et la diversité des formes en font un élément très particulier du décor des campagnes. Si celui de Mézin est sur colonnes de pierre et dispose d’un mur à pan de bois, les autres, avec un étage, utilisent plus fréquemment la brique et la pierre. À Castillonnès, le pigeonnier est de forme ronde. Ceux de Douzains dans le Duraquoi ou de Ferrensac ont une forme carrée » écrit Jean-Paul Charrié dans son livre.

Nature et paysages du Lot-et-Garonne

Nature et paysages du Lot-et-Garonne


« Entre Agen et Marmande, c’est un paysage aussi beau que l’Italie; le charme des coteaux, la couleur de la terre, le costume, jusqu’au langage, évoquent les rives de Florence et de Sienne. Le Lot-et-Garonne est la Toscane de la France. » Stendhal

Glou glou

Comme son nom l’indique, le Lot-et-Garonne est un département ouvert aux cours d’eau, assez nombreux sur le territoire si on y ajoute les rivières Baïse, Gers, Dropt, Séoune…

Si ces jolis cours d’eau façonnent le paysage, contribuent à lui donner son cachet particulier et constituent une richesse agricole, ils suscitent également une crainte bien légitime lorsque les inondations font leur apparition. La Garonne est, à ce titre, une maîtresse indomptable. Bien chargé en eau des Pyrénées et du Massif central, gonflé par le Lot en amont, le fleuve, dont le lit mineur souffre de son étroitesse, donne régulièrement naissance à des crues importantes, notamment lorsque la fonte des neiges a été massive dans les zones montagneuses. Le Lot n’épargne pas non plus son proche environnement, principalement au niveau de la vallée de Castelmoron-sur-Lot.

Ces débordements réguliers ont poussé les hommes à bâtir leurs cités sur la rive droite, en prenant soin d’anticiper une certaine hauteur de construction, comme l’illustrent les communes de Port-Sainte-Marie, Aiguillon et Tonneins. De nombreuses fermes ont quant à elles été construites sur des monticules.

Cette abondance d’eau apparaît être un argument de premier ordre lors des chaudes journées d’été. Grâce à un vaste système d’irrigation, les agriculteurs peuvent prétendre assurer une riche production sans trop de contraintes, asseyant de fait la réputation du Lot-et-Garonne comme territoire agricole incontournable du pays.
Il serait pourtant hasardeux de réduire le département à une seule et vaste exploitation. Moins populaire que sa voisine la Dordogne auprès des touristes, le Lot-et-Garonne affiche de solides arguments de séduction, tant par la beauté de ses paysages, l’authenticité de ses villages que par la richesse des pays qui le composent.

L’Agenais

À proximité d’Agen, coincé entre la Garonne au Sud et le Lot au Nord, le pays de Serres offre des paysages composés de plateaux calcaires donnant naissance à de petits ravins, de vallons encaissés et d’échines. Nombreuses y sont les petites exploitations agricoles à l’architecture périgourdine ou quercynoise. On y découvre aussi de fort jolies chapelles romanes, parfois isolées.

L’environnement du pays de Serres est propice à la faune, parmi laquelle il n’est pas rare d’observer le circaète (ou aigle des serpents), qui revient chaque année, le faucon crécerelle, le hibou petit duc ou, chez les mammifères, la genette, ce petit carnivore ô combien discret, habitué des bois, que l’on confond parfois avec un chat sauvage.

Plus au nord de la capitale lot-et-garonnaise, le pays du Brulhois (ou Bruilhois) affiche une multitude de vallons, terrasses et coteaux, emplacements parfaits pour les vignes dédiées aux cépages de tannat, de malbec, de fer servadou et d’abouriou dont on tire le vin noir, dû à sa robe très sombre.

L’Albret

À l’ouest du département, sur la rive gauche de la Garonne, coincé entre la Gironde et les Landes, le pays d’Albret présente un contraste paysager entre les collines de la région de Nérac, dédiées à la culture céréalière, et le plateau landais, qui prolonge la forêt de pins maritimes des Landes de Gascogne.

Nous sommes ici au cœur d’un territoire dédié aux plaisirs du palais, où pousse la vigne, où cacardent les oies, où grandissent les veaux sous leur mère et où volent les palombes.

La longue histoire de l’Albret se rencontre à travers ses cités et bastides (Nérac, Lannes, Vianne, Barbaste), ses châteaux, ses anciennes tanneries, ses moulins fortifiés et églises romanes.

C’est une invitation franche à remonter le temps et découvrir une terre toujours un peu secrète, dont on peut s’imprégner en naviguant sur la Baïse, sans trop de bruit.

Le Marmandais

Au nord-ouest du département, non loin du pays de l’Entre-Deux-Mers en Gironde, le Marmandais revendique une riche tradition vinicole, la vigne occupant les coteaux depuis l’époque romaine. On y cultive aussi la célèbre tomate de Marmande, des fraises, melons, prunes d’ente et autres fruits, les vergers étant très nombreux sur cette terre fertile.

La beauté du Marmandais repose sur la diversité de ses paysages, qui passe de la plaine de la Garonne aux vastes étendues de la forêt landaise. C’est aussi la ribambelle de petites communes installées le long du fleuve, chacune exhibant ses atouts architecturaux, comme les maisons à colombage de Clairac, la façade des quais de Tonneins, le château péager de Couthures-sur-Garonne…

Vallée de la Garonne vers Cocumont au lever du soleil – Crédit photo : Guillaume Conan – CC BY-SA 2.5

Le pays du Dropt

C’est tout au nord du Lot-et-Garonne que se situe le pays du Dropt, ou plutôt la vallée du Dropt, au relief peu marqué, non loin de la Guyenne et du Périgord. On connaît ce petit pays essentiellement grâce à ses vignobles de Duras, qui façonnent le paysage. Il faut néanmoins parler des vastes forêts de châtaigniers, où les amateurs traquent des cèpes, des bois et des nombreux vergers.

Le paysage est reposant, incitant à la promenade, avec l’ambition de découvrir les nombreux villages moyenâgeux, où se tiennent chaque semaine des marchés assez extraordinaires. Les petits producteurs locaux proposent des pâtés faits maison, des poulets dodus et fermiers, des champignons à peine cueillis ou des écrevisses gesticulantes.

La découverte du pays du Dropt doit impérativement se faire à pied ou sur la selle d’un bon vélo afin de s’arrêter à tout moment devant les vieilles maisons à empilage, fort nombreuses dans la région, dans les petites rues des bastides, face aux pigeonniers restaurés. C’est aussi l’occasion de rencontrer les gens du coin ou de marquer une (longue) pause à la terrasse ensoleillée d’un bistrot typique, jamais loin d’un château ou d’une église remarquable.

Le pays du Lot

La région présente elle aussi un éventail de paysages très diversifiés. Des villages tels que Pujols et Penne d’Agenais ont été édifiés au sommet des coteaux, dominant la rive gauche du Lot.

Au Nord de la rivière, les bastides, à l’image de Monflanquin, forment un horizon vallonné, duquel se détachent les silhouettes des églises ou des tours d’angle.

La vallée du Lot est quant à elle réputée pour ses nombreuses cultures fruitières, en particulier celle de la prune d’ente, également commercialisée sous la forme du pruneau d’Agen après séchage.

La faune et la flore

La moyenne Garonne, entre les terrasses du fleuve et la plaine inondable, reste un lieu fréquenté par les poissons migrateurs, comme la lamproie marine, la truite de mer, la grande alose ou encore le saumon. On y trouve également des anguilles et des esturgeons, de taille moins impressionnante qu’il y a un demi-siècle.

En outre, le département offre plus de 500 hectares ouverts à la pêche, où les amoureux de la canne peuvent chatouiller la tanche, la carpe, le brochet et le goujon.
Plus au sec, les forêts de chênes sont habitées par quelques mammifères, dont des sangliers, des lièvres et lapins, des cerfs et chevreuils et même des visons d’Europe.
En levant les yeux, et selon les saisons, on peut apercevoir différentes espèces migratrices, à l’image du pigeon ramier, que l’on appelle palombe dans le Sud-Ouest, et dont la chasse, en octobre, suscite généralement une explosion de RTT ou de congés maladie.

Les autres oiseaux notables sont le héron cendré, de plus en plus sédentaire, le balbuzard pêcheur et le milan noir, un rapace qui considère le Lot-et-Garonne comme une bonne terre de drague.

Enfin, la région gasconne sait se faire belle en exhibant une grande variété de plantes et fleurs gracieuses, à la faveur de l’éclectisme géologique (argile, sable, calcaire…).

Pied de Tulipe œil de soleil (Tulipa agenensis) – Crédit photo : Zachi Evenor and MathKnight – CC BY 3.0

Il convient de citer en premier lieu une star locale, la tulipe agenaise, d’une belle couleur écarlate, introduite par les Romains il y a plus de 2 000 ans. Surnommée « l’œil du soleil » en raison de l’étoile jaune en son cœur, la fleur est malheureusement menacée d’extinction, à cause des pratiques horticoles et de la cueillette sauvage. Elle est aujourd’hui protégée.

Parmi les autres fleurs, les orchidées sauvages ravissent les botanistes et les amateurs de belles choses. On trouve des hybrides assez précieux, comme l’orchis pourpre, qui aime pousser sur les coteaux calcaires et les pelouses sèches. Nous pouvons aussi citer l’orchis brûlé ou l’ophrys mouche.

Les chênes pédonculés, très nombreux il y a quelques siècles, ont subi un rabotage de leur superficie, au profit des exploitations agricoles et des pins maritimes. Ils résistent cependant et continuent de former de vastes forêts, associés par exemple aux chênes sessiles, comme cela est observable dans la région du Mas-d’Agenais.

Les territoires du département se composent de nombreuses autres variétés d’arbres, tels le châtaignier, l’érable de Montpellier, le saule blanc et le genévrier.

Éléments d’histoire du Lot-et-Garonne

Éléments d’histoire du Lot-et-Garonne


C’est dans le Lot-et-Garonne que l’on trouve l’une des rares tribus gauloises, les Sotiates, à avoir eu le courage de combattre frontalement les redoutables armées de César. Astérix ne serait-il pas un peu Aquitain ?

Un passé très ancien

La présence de l’homme est avérée depuis fort longtemps en terres lot-et-garonnaises. Les fouilles archéologiques menées à l’est du département, dans les vallées de la Lémance et de la Lède, ont révélé des restes humains et des fragments d’outils datant du Paléolithique, notamment à la grotte de Monsempron.

L’abri du Martinet, à Sauveterre-la-Lémance, découvert en 1922 par Laurent Coulonges, renferme un habitat du Magdalénien final, au sein duquel une centaine de pointes de silex, des outils en os, des poinçons et des lissoirs ont été retrouvés.

L’Agenais s’impose à l’âge du Bronze (-7000 à -500) comme une terre d’échanges des savoirs techniques entre peuplades continentales et atlantiques.

Bien des siècles plus tard, ce sont les tribus gauloises qui occupent le territoire, parmi lesquelles les Nitiobroges, d’origine celte, installés dans la région d’Aginnum (Agen). Leur existence est prospère.

Au sud de la confluence du Lot et de la Garonne, les Sotiates, protobasques, sont parfaitement bien organisés. Ils ont bâti leur site fortifié à l’emplacement de l’actuelle commune de Sos, battent leur monnaie et sont considérés comme de redoutables guerriers.

Quelques vestiges de la période celtique sont encore visibles, notamment des dolmens et des peulvens non loin de Tournon et d’Agen ou encore les ruines d’un temple druidique dans la région de Nérac.

Drachme « à la tête bouclée du Causé » frappé par les Sotiates – Crédit photo: Par cgb — CC BY-SA 3.0

Lors de l’invasion romaine, menée en 56 av. J.-C. par le général Publius Crassus, les Sotiates sont l’une des rares tribus d’Aquitaine à opposer une vive résistance à l’ennemi. Malgré leur courage, ils ne parviennent pas à remporter la bataille contre les légions romaines, qui ont reçu l’aide des Nitiobroges, et doivent battre en retraite dans leur oppidum. Ils font preuve une nouvelle fois d’héroïsme en organisant une résistance désespérée. Leur bravoure est d’ailleurs mentionnée dans la Guerre des Gaules de Jules César himself.

Peut-être pris de remords pour leur collaboration un peu hâtive avec les Romains, les Nitiobroges décident de soutenir Vercingétorix et envoient leur cavalerie combattre à Gergovie.

Comme partout en Aquitaine, la Pax Romana s’accompagne de transformations importantes et d’une meilleure organisation. Des voies sont construites le long de la Garonne, d’autres permettent de relier Agen à l’Atlantique et à la Méditerranée ou encore de placer Astaffort sur la route qui part des Pyrénées jusqu’à Périgueux.

Le commerce se développe, tout comme les cités. Certains historiens considèrent qu’Agen était la deuxième ville d’Aquitaine, riche d’un théâtre, d’un amphithéâtre et de superbes villas. Le Mas d’Agenais profite de son statut d’étape fluviale et devient une cité prospère, réputée pour son marché.

Les rives de la Garonne, du Lot et de la Baïse accueillent des demeures prestigieuses, à l’image de la villa Bapteste à Moncrabeau, composée d’une quarantaine de pièces, de deux cours intérieures (dont l’atrium), d’une écurie et même d’un oratoire. On trouve un bâtiment tout aussi remarquable à Castelculier, dont la superficie dépasse le millier de mètres carrés. De quoi rendre le séjour de belle-maman plus supportable. C’est aussi ça, la Pax Romana.

La fertilité du sol justifie la construction de vastes exploitations agricoles et contribue grandement à la prospérité du territoire.

Enfin, si les voies romaines ont facilité le transport des hommes et des marchandises, elles ont aussi permis de diffuser les fondements du christianisme, qui se développe dans les campagnes jusqu’au VIIe siècle. Un siège épiscopal s’établit à Agen dès le IVe siècle, placé sous la tutelle de l’évêque Phébade, ce dernier menant combat contre le pouvoir politique romain et surtout contre l’arianisme (thèse émise par le théologien alexandrin Arius, supposant que le fils de Dieu est avant tout humain, même s’il dispose d’une part de divinité).

À l’instar des autres départements de l’Aquitaine, les invasions barbares vont quelque peu bousculer la vie tranquille du Lot-et-Garonne. Les Barbares sont les premiers à venir détruire et brûler les belles villas, mais comme ils sont sympas, ils en laissent quelques-unes à leurs successeurs, que sont les Vandales, les Suèves ou encore les Wisigoths. Ces derniers s’installent durablement dans le Sud-Ouest, jusqu’à ce que Clovis ne les en chasse définitivement en 507.

L’histoire est parfois un peu confuse

Après quelques siècles de troubles, de rattachements au royaume de Neustrie ou à celui de Bourgogne, de mainmise des Carolingiens ou d’invasion sarrasine (732), l’Agenais profite de la reconstitution de l’Aquitaine par Charlemagne après la bataille de Roncevaux pour s’établir comme un comté indépendant à part entière, placé sous la gouvernance d’Ermiladius. Les Normands empruntent les voies navigables du territoire et sèment mort et destruction, peut-être soutenus par le roi Pépin, ce dernier n’acceptant pas que le comté ne soit pas soumis à l’Aquitaine.

Du XIIe au XIVe siècle, il faut être solidement accroché à l’actualité locale pour savoir à qui appartient le comté, rattaché au gré des guerres de conquête aux comtes de Toulouse, à la couronne de France ou aux rois d’Angleterre.

En 1317, les intrigues papales et la perte de pouvoir des notables locaux provoquent une césure entre le diocèse d’Agen et l’abbaye de Condom, érigé en évêché, entretenant une vraie confusion administrative et judiciaire.

Quelques années plus tard, en 1323 précisément, l’incident de Saint-Sardos va constituer le point culminant des tensions entre Anglais et Français et allumer la mèche de la guerre de Cent Ans. Depuis le règne de Philippe le Bel, roi de France, les ducs d’Aquitaine sont considérés comme des vassaux, et surtout pas comme les représentants de la couronne anglaise. Cette nouvelle influence française est très, très mal perçue par les Plantagenêt, qui estiment que la Gasconne est leur terre pleine et entière.

C’est donc avec un certain énervement qu’ils apprennent la volonté de construire une nouvelle bastide, à proximité de Montpezat. Le 13 octobre 1323, un envoyé de Charles IV érige un mât portant la cotte d’armes du roi de France. Quand même très remonté, le seigneur de Montpezat détruit le chantier et donne l’ordre de pendre le pauvre messager au mât.

En réponse, le roi de France confisque le fief et envoie son oncle Charles de Valois occuper le pays. Les territoires sont conquis assez facilement, les garnisons anglaises n’offrant qu’une faible résistance. Après avoir confisqué l’Agenais, Charles IV décide néanmoins de laisser aux Anglais une grande partie de leur possession. Il n’en demeure pas moins que l’épisode de Saint-Sardos a contribué à nourrir la future de guerre de Cent Ans, qui allait éclater quelques années plus tard, en 1337, poussant les Anglais à quitter définitivement les contrées du royaume de France, au terme de la bataille de Castillon en 1453.

L’Agenais rejoint la couronne de France en 1472, à la mort de Charles de Valois, frère de Louis XI et duc de Guyenne.

Nérac entre dans l’Histoire de France

Le pays retrouve enfin la quiétude et une certaine prospérité. De nouveaux habitants, originaires du Saintongeais, du Poitou, mais aussi et surtout d’Italie, viennent s’y installer. Les Italiens, en partie composés de prélats posent leurs bagages au siège épiscopal et promeuvent les nobles valeurs de la Renaissance, particulièrement bien accueillies à Nérac, cité où Marguerite de Navarre, sœur de François Ier et mère de Jeanne d’Albret, a installé une cour et encouragé l’expression culturelle.

Le château de Nérac accueille, parmi les nombreuses personnalités sensibles aux arts, aux lettres et à la religion, des humanistes acquis aux idées de la Réforme, à l’image de Clément Marot, Jean Calvin et Théodore de Bèze.

Château de Nérac – Crédit photo: Thomas Conté – Flickr

Doucement mais sûrement, le protestantisme, encouragé par le château de Nérac, se diffuse parmi la population, notamment auprès des professeurs et des milieux judiciaires. En 1525, les premières condamnations au bûcher sont décidées à Agen, mais cette vague de répressions ne met pas un terme au développement de la Réforme. En 1561, après que les protestants se soient organisés et pris les armes, la guerre civile éclate. De nombreux massacres sont commis de toutes parts, des remparts détruits, des maisons brûlées.

Jeanne d’Albret, fervente partisane de la Réforme, n’aide pas à apaiser la tension, soutenue par son fils, Henri de Navarre, pourtant né et baptisé catholique mais sensibilisé dès son plus tendre âge à la doctrine calviniste.

Dans un souci de retrouver une certaine sérénité, la reine mère, Catherine de Médicis, organise le mariage de sa fille Marguerite de Valois, catholique, et d’Henri de Navarre le 18 août 1572. Entre les deux tourtereaux, il ne semble pas que ce soit l’esprit Meetic – #I love your imperfections- qui prédomine.

Cela tombe plutôt bien en fait, car l’actualité s’emballe. Quelques jours après le mariage, le 24 août, survient la terrible nuit de la Saint-Barthélemy, au cours de laquelle plus de 3 000 protestants sont massacrés à Paris. Cet évènement tragique suscite la rupture entre la cour et les Albret. Henri est contraint de se convertir au catholicisme et il est assigné à résidence à la cour de France. Le 5 février 1576, il parvient à s’enfuir et à gagner l’Agenais puis le château de Nérac.

Sa belle-maman (qui est quand même la reine mère) et sa femme le rejoignent en octobre 1578. Le voyage n’est pas seulement sentimental. Catherine de Médicis souhaite rencontrer les chefs protestants et trouver un compromis, signé l’année suivante à Bergerac. Ainsi, les protestants obtiennent onze places de sûreté au terme de ce que l’on appelle les conférences de Nérac.

Pour Henri, malgré ses déchirements entre valeurs protestantes et impératifs catholiques, la vie à Nérac est plutôt agréable. Chasse, jeux, sorties, soirées en boîte (à l’époque, on parlait de bal) dictent ses journées. Le futur roi a pris l’habitude de papillonner de-ci de-là, additionnant les conquêtes et les déclarations d’amour éternelles en fin de soirée alcoolisée. Il ne pense même pas mettre un terme à ses légères aventures malgré la présence de son épouse à ses côtés. Cette dernière prend la mouche et réserve une place TGV (Transport Garanti aux Valois) en direction de Paris.

En 1589, Henri devient roi de France, reconnu par son cousin et beau-frère Henri III, sur son lit de mort. Après quelques années d’apprentissage du pouvoir, de batailles gagnées et d’une réelle volonté d’apaiser les tensions entre protestants et catholiques qui fragilisent le royaume, il promulgue l’Édit de Nantes, rédigé à Nérac, en 1597. L’Agenais, mais aussi d’autres terres du royaume, renoue avec des périodes plus apaisées, hélas de courte durée puisque les agitations reprennent dès 1621, sous le règne de Louis XIII.

La révocation de l’Édit de Nantes par Louis XIV en 1685 pousse près de 10 000 protestants à fuir le territoire de l’Agenais et à s’installer en Hollande, terre d’accueil. Ces départs massifs vont contribuer à appauvrir différentes cités, comme Nérac, Tonneins et Clairac, où les protestants occupaient des postes clés de l’économie locale.

Le promeneur peut parfois apercevoir aux abords de son chemin des cyprès isolés. Ces arbres ont été plantés pendant la répression à proximité des tombes des protestants, les cimetières catholiques leur étant interdits. Les cyprès n’avaient pas vocation à rendre hommage aux défunts, mais à indiquer au paysan la présence d’une tombe afin d’éviter que la charrue ne détruise l’endroit.

Prospérité et Révolutions

Après ces siècles d’invasions, d’occupation, de guerres, de destructions et de mort, le territoire entame le XVIIIe siècle sous de meilleurs auspices (hospices, serait-on tenté d’écrire).

Le canal des Deux-Mers, ouvert en 1681, vient enrichir et compléter les cours d’eau du futur département, voies de communication fondamentales pour acheminer vers l’Atlantique et la Méditerranée les denrées agricoles, diverses et nombreuses en ces terres fertiles.

De grandes manufactures, essentiellement dédiées au textile, font leur apparition. Certaines fabriquent les voiles destinées aux navires du port de Bordeaux, qui assurent une activité commerciale importante pour l’ensemble du royaume de France.

En 1790, alors que la Révolution chamboule quelque peu l’organisation du pays, le département du Lot-et-Garonne voit le jour, dont les contours sont finalement assez proches de l’Agenais. Quelques coups de rabot interviendront néanmoins en 1808, lors de la création du Tarn-et-Garonne, qui récupère les cantons de Montaigu, Valence d’Agen et Auvillar.

Le département échappe à l’essor économique né de la révolution industrielle, comme bon nombre de territoires méridionaux, en raison notamment de l’absence de ressources naturelles (fer, charbon…) nécessaires au fonctionnement des premières usines. L’industrie du textile entame son déclin et seules les productions agricoles semblent résister au nouvel ordre économique, ce qui n’empêchera pas un exode rural à la seconde moitié du XIXe, après l’arrivée du blé américain sur le territoire, terrible concurrence, et surtout l’apparition de la crise du phylloxéra.

Patrimoine et cultures en Gironde

Patrimoine et cultures en Gironde


La diversité des pays et des traditions qui compose la Gironde donne parfois l’impression que le département regroupe en son sein des univers bien distincts.

Un habitat qui contribue à l’identité girondine

La présence millénaire de la vigne a représenté une forte influence sur l’organisation sociale des Girondins. Au XVIIIe siècle, quand les salariés agricoles se contentaient de maisons modestes, généralement composées de deux pièces (salle commune et chambre), les propriétaires et autres bourgeois bordelais épris de soudaine passion viticole faisaient édifier de belles demeures et même des petits châteaux, ayant souvent servi de modèle à des maisons moins prestigieuses pour des raisons de publicité et d’affichage sur les étiquettes des bouteilles.

Parmi les bâtiments remarquables, il convient de citer les chartreuses, bâties par les notables bordelais à la recherche d’une villégiature confortable en pleine nature, mais sans être pour autant trop éloignée de la ville et du monde des affaires.

La chartreuse est édifiée sur un étage, sur la base d’un rez-de-chaussée surélevé. Sa façade affiche de hautes fenêtres et un fronton triangulaire qui marque l’entrée principale. Souvent, des escaliers à double révolution permettent d’accéder à la terrasse ou à l’entrée, apportant indéniablement une touche de majesté à l’ensemble.

Le parc entourant les chartreuses se doit d’être grandiose, parfaitement entretenu et d’influence anglaise. On y accède en poussant des portails un peu revendicatifs de la position sociale du propriétaire.

Dans la zone des Landes, l’habitat a subi une évolution, due en grande partie à l’apparition de nouvelles activités, comme la récolte de résine ou le commerce de bois. Les propriétaires ont progressivement abandonné leurs logis traditionnels construits en torchis et colombages, récupérés par les métayers, au profit de solides maisons en pierre.

Chaque pays du département aborde une architecture différente, au regard de l’environnement et des ressources naturelles à proximité. Le Pays de Buch respecte la tradition landaise, avec des maisons dont l’auvent, dit estandad, protège la façade. Dans le Nord du Bazadais, les moellons extraits des carrières de la vallée du Ciron sont utilisés pour édifier les demeures.

Villa à Arcachon – Crédit photo: Henry de Saussure Copeland – Flickr

Le patrimoine architectural de la Gironde dépend aussi d’Arcachon et du style inimitable de ses maisons. La ville, habitée par des pêcheurs, s’est transformée sous le Second Empire en station balnéaire prisée par la bourgeoisie et l’aristocratie européennes.

De magnifiques villas voient le jour, dont l’architecture, pour le moins variée, s’inspire de différents styles : néogothique, néoclassique, mauresque, colonial, etc. On y trouve même des chalets suisses. Les toitures sont généralement à large débord, ornementées de lambrequins dentelés.

Chaque villa est affublée d’un nom, parfois original et empreint d’humour : Silence de la mer, Giroflée, Nénette, Fantaisie, la Joconde…

À Bordeaux, les fameuses échoppes contribuent grandement à l’identité de la ville. Les premières sont construites au XVe siècle à destination des commerçants et des artisans. Trois siècles plus tard, sous le Second Empire, elles sont dédiées à l’habitation des employés et ouvriers.

Les échoppes sont des maisons basses, la plupart du temps d’un seul niveau, édifiées en pierre de taille, dont la façade varie de 5 à 10 mètres et la longueur dépasse souvent la vingtaine de mètres.

La cave, à laquelle on accède par un escalier pour le moins abrupt, est une pièce vitale où l’on conserve le vin, le jambon, le charbon, le bois.

À l’arrière, on trouve souvent une cour ou un jardin de quelques dizaines de mètres carrés, qu’un mur de séparation protège du voisinage.

Souvent considérées comme identiques, contribuant à rendre les rues monotones, les échoppes révèlent pourtant des décors de façade originaux, composés notamment de moulures sculptées autour de la porte et des fenêtres et de fort jolies corniches au sommet des murs.

On en dénombre plus de 10 000 à Bordeaux. Réhabilitées et réagencées pour répondre au confort moderne, elles constituent aujourd’hui un logis apprécié des citadins.

Une longue tradition de pêche et d’ostréiculture

La géographie de la Gironde a toujours été une invitation à la pêche : littoral atlantique, estuaire de la Gironde, Garonne et Dordogne, bassin d’Arcachon, lacs, étangs, rivières… Fort logiquement, l’activité s’est développée au cours des siècles, pratiquée par des professionnels mais aussi par de nombreux amateurs, chacun considérant que l’accès à l’eau et à ses ressources est un droit traditionnel.

Néanmoins, la raréfaction des ressources a changé les règles. Au début du XXe siècle, la pêche à la sardine représente une activité économique à part entière du bassin d’Arcachon. Les pinasses parcourent la petite mer intérieure dès le printemps et les prises faites au filet, que l’on appelle aussi la chardinèira, sont nombreuses. Pas moins de sept conserveries s’établissent à Gujan-Mestras.

L’une des conserveries de sardines situées à Gujan-Mestras au début du 20e siècle.

Aujourd’hui, l’activité a quasiment disparu et les conserveries ont toutes fermé. On continue quand même de fêter la sardine chaque été à Gujan, en souvenir des temps prospères.

Longtemps pratiquée aux abords du littoral, la pêche à la senne reposait sur une organisation bien rodée et permettait de récupérer des volumes conséquents de poissons sans pour autant atteindre le large.

Un groupe d’hommes marchait le long de la plage, avec la mission de repérer les éventuels bancs de poissons. Sur l’eau, la pinasse accompagnait cette marche à quelques mètres. Dès que le signal était donné par le groupe terrestre, les marins se rapprochaient du sable afin de donner la corde du filet aux marcheurs. La pinasse se plaçait alors à l’arrière du banc en vue d’initier une manœuvre d’encerclement jusqu’à gagner une nouvelle fois le rivage. Ensuite, les hommes de la pinasse et ceux de la plage tiraient les deux bouts du filet et ramenaient ainsi leur précieux butin au sec.

Force est de constater que ces pêches artisanales, encore pratiquées il y a quelques décennies, ont disparu au profit d’une activité plus professionnelle. La flottille du port d’Arcachon privilégie aujourd’hui la pêche au chalut de fond et aux filets.

Sur le bassin, quelques dizaines de professionnels continuent d’assurer leur activité. Les espèces les plus pêchées sont la daurade royale, le bar commun, la seiche, le mulet ou encore la sole. Il convient d’ajouter que les coquillages (coques, palourdes…) constituent les stocks les plus importants.

Sur l’estuaire, la pêche vise avant tout les espères migratrices, comme l’alose, la lamproie, le maigre, la pibale ou encore l’esturgeon, au gré des saisons correspondant à leur présence dans les eaux girondines.

Le bar, le carrelet, la crevette grise, la sole et le mulet sont également pêchés.

Les techniques utilisées passent notamment par l’utilisation du tramail, un filet lesté à trois rangs de mailles. Les poissons sont capturés dans le filet intérieur et sont retenus par les grandes mailles du filet extérieur.

La technique la plus emblématique de l’estuaire est celle dite du carrelet, nom du filet carré, monté sur deux cerceaux et suspendu à une armature, elle-même fixée sur le ponton d’une cabane surélevée. Le pêcheur descend le filet, patiente quelques minutes puis le remonte, à l’aide d’un treuil, en espérant avoir fait quelques prises.

Les excès de la pêche humaine et la pollution des eaux ont contribué à la raréfaction des ressources. L’esturgeon européen a quasiment disparu de l’estuaire, la pibale se fait de plus en plus rare, tout comme l’alose et la lamproie.

Face à cette situation inquiétante, différentes démarches politiques ont été initiées. A la question posée par un sénateur, le ministère de l’Écologie a répondu (JO Sénat du 3/01/2013) :

« Les principaux acteurs concernés par la gestion de ces espèces, les pêcheurs professionnels et amateurs, marins et fluviaux, les hydroélectriciens, les agriculteurs, les associations de protection de l’environnement, associations « grands migrateurs » ont été réunis afin d’établir une stratégie nationale de gestion des poissons migrateurs amphihalins, qui a été validée fin 2010. Cette stratégie insiste sur la nécessité d’agir sur la qualité des milieux et la continuité écologique. »

Enfin, quand on parle de la Gironde, on pense quand même un peu à ses délicieuses huîtres du bassin d’Arcachon, que l’on savoure avec un bon p’tit vin blanc de l’Entre-Deux-Mers.

Dégustation des huîtres au village de L’Herbe (Cap-Ferret) – Crédit photo : O.S. pour FranceSudOuest

L’ostréiculture se développe lors de la seconde moitié du XIXe siècle. Jusqu’à cette période, on se contentait de cueillir l’huître sur les bancs naturels, sans trop se soucier de la reproduction ou de l’élevage.

Il est vrai qu’elle jouissait déjà d’une solide réputation depuis déjà quelques siècles. Jacques-Auguste de Thou, premier Président du Parlement de Paris, écrit dans ses Mémoires en 1620 (attention, français d’époque dans son jus) :

« Ces Meffieurs firent dreffer une table pour dîner fur le rivage ; comme la mer étoit baffe, on leur aportoit des huîtres dans des paniers ; ils choififfoient les meilleures & les avalloient fi tôt qu’elles étoient ouvertes ; elles font d’un goût fi agréable & fi relevé qu’on croit refpirer la violette en les mangeant. »

Un siècle plus tard, la surexploitation pousse le Parlement de Bordeaux à interdire la pêche pendant trois ans, de 1750 à 1753. Décision politique judicieuse. Les bancs se reconstituent, générant une nouvelle pêche déraisonnable.

En 1848, l’espèce est menacée et, progressivement, l’idée d’élevage se met en place, renforcée par l’innovation de Jean Michelet, maçon de son état, qui met au point la technique de chaulage. Elle consiste à enduire les tuiles rangées dans un collecteur de chaux et de sable. Ainsi, l’ostréiculteur peut retirer les jeunes huîtres sans aucun risque.

L’ostréiculture prend réellement son essor. De nombreux pêcheurs artisanaux abandonnent leur activité et se convertissent à l’élevage de la gravette. Cette espèce doit cependant cohabiter quelques années plus tard avec l’huître portugaise, apparue sur les côtes girondines à la suite de cargaisons jetées à l’eau par un bateau de commerce en 1868. La portugaise remplace progressivement la gravette.

Au début des années 1970, une épizootie décime quasiment tous les bancs d’huîtres du bassin. La portugaise disparaît à son tour, au profit de la crassostrea gigas, importée du Japon. Cette espèce est toujours commercialisée.

Aujourd’hui, l’ostréiculture arcachonnaise se déploie à travers 23 ports, impliquant plus de 300 entreprises et un millier d’emplois, pour un chiffre d’affaires annuel de 40 M€. La surface ostréicole s’étend sur 2 000 hectares. La production avoisine les 20 000 tonnes annuelles.

Les nostalgiques de la gravette se consoleront un peu en apprenant qu’elle n’a pas complètement disparu et qu’il est toujours possible de se régaler de son arrière petit goût de noisette qui fit sa réputation.

Nature et paysages en Gironde

Nature et paysages en Gironde


La Gironde profite de sa large superficie, la plus importante de France, pour présenter aux visiteurs ébahis sa ribambelle de paysages et de pays. Petit tour d’horizon.

L’estuaire

L’estuaire de la Gironde est le plus vaste d’Europe occidentale, confluent de deux fleuves, la Garonne et la Dordogne, joignant leur cours au Bec d’Ambès. L’origine montagneuse des deux cours d’eau (Pyrénées pour le premier, Massif central pour le second), qui charrient en leur profondeur graves, limons et galets, explique cette couleur si particulière de la « mer de Bordeaux » ou encore la « mer de Garonne ».

Long de 75 kilomètres, doté d’une largeur pouvant atteindre par endroits les 12 kilomètres et couvrant une superficie de 635 km², l’estuaire est composé de paysages variés et différents selon que l’on se trouve sur la rive gauche ou droite.

Sur la rive gauche, les marais, très en aval, s’imposent dans le paysage du Bas-Médoc, avant de laisser la place à de larges vignes, qui profitent allègrement du bienfait des plaines alluviales pour donner naissance à l’un des meilleurs vins au monde.

Sur la rive droite, le territoire est plutôt composé de collines et de falaises. Les vignes y sont moins importantes.

Vue depuis Carluet – Crédit photo : Tristan – Flickr

Le charme de l’estuaire, ce sont aussi ses îles qui, parfois, au gré des crues, naissent ou disparaissent. Nombreux sont ceux à pleurer encore l’île de Croûte, mangée par l’eau en 2004. Fort heureusement, à la faveur de la tempête Klaus (si l’on peut dire) en 2009, l’île sans nom (ou île de Cordouan) est apparue grâce à l’accumulation des sédiments sur une surface de quatre hectares.

D’autres îles connaissent une situation géologique plus stable, à l’image de l’île Verte, forte de ses 790 hectares, où s’est posé jadis un petit village de près de 500 âmes. Le Conservatoire du littoral a pu acquérir une quarantaine d’hectares en 2001, dédiés aux oiseaux migrateurs. On continue d’y produire du vin, d’excellente réputation, sous l’appellation Bordeaux supérieur.

L’île de Patiras mérite également le coup d’œil. Située au milieu de l’estuaire, entre Cussac et Blaye, on dit qu’elle servit de lieu de retraite au pirate Dimitri de Monstri. Au Moyen-Âge, l’île accueillit les lépreux de la région.

Les champs de maïs occupent aujourd’hui une bonne partie de son territoire, même s’il subsiste encore quelques vignes.

Le milieu naturel d’exception que représente l’estuaire de la Gironde est propice au développement d’une faune importante et variée. Parmi les poissons migrateurs, il convient de citer l’alose et la lamproie, espèces emblématiques des lieux, que l’on pêche au printemps. La pibale, le maigre et encore l’esturgeon européen ont adopté cet univers aquatique, profitant malgré eux des mesures de sauvegarde mises en place pour empêcher leur disparition.

Les marais de l’estuaire sont des sources de nourriture de première importance pour la centaine d’espèces d’oiseaux migrateurs (aigrette, héron cendré, cigogne blanche, linotte mélodieuse…) qui traverse cette région chaque année. Ces zones humides sont également des lieux de reproduction et d’hivernage.

L’estuaire accueille de nombreuses autres espèces animales, parmi lesquelles le vison d’Europe, la cistude ou encore le crapaud à couteaux, dont le nom est lié à ses tubercules à l’extrémité de ses pattes lui permettant de s’enfouir dans le sable pour passer l’hiver tranquillos.

Enfin, selon les études menées par le Conservatoire Botanique National du Sud Atlantique, près de 400 espèces de végétaux ont été recensées localement, dont l’angélique des estuaires et le sénéçon à feuille de barbarée, aujourd’hui protégé.

Le vignoble

Au regard de la superficie qu’il occupe en Gironde depuis déjà un très long moment, le vignoble peut finalement être considéré comme un paysage à part entière. Du Nord du Médoc au Sud-Est de la région des Graves, les vignes, parfaitement entretenues et alignées, se déploient sur 120 000 hectares et permettent, chaque année, la production de six millions d’hectolitres de vin, des chiffres assez réconfortants.

Six régions viticoles apparaissent sur la carte : le Médoc, les Graves, le Sauternais, l’Entre-deux-Mers, le Libournais et enfin le Blayais et Bourgeais.

Sur la rive gauche de l’estuaire puis de la Garonne, les vignes du Médoc, des Graves et du Sauternais profitent de reliefs peu marqués. Sur la rive droite de la Dordogne, le vignoble de Saint-Émilion et de Pomerol s’étire sur des terres plus vallonnées, à flanc de coteaux. Cette petite astuce naturelle permet de drainer le surplus d’eau après une bonne pluie, empêchant ainsi les racines de s’asphyxier.

Exploitation du Château Tayac – Appellation Côtes de Bourg contrôlée. Crédit photo: put_the_needle_on_the_record

À chaque région vinicole correspond un ou plusieurs cépages, en fonction de la nature du sol. Ainsi, le Médoc, les Graves et le Sauternais, plus à l’Ouest, profitent d’un sol graveleux acide, propice au cabernet sauvignon. Pour le Blayais, le Libournais et l’Entre-Deux-Mers, où le sol est essentiellement argilocalcaire, le cépage roi est le merlot.

D’autres cépages sont néanmoins utilisés, mais sur des surfaces plus restreintes : le villard noir, le petit verdot, le malbec ou encore le carmenère. Pour le vin blanc (20 % de la production vinicole), les viticulteurs privilégient le sémillon, le sauvignon ou encore l’ugni blanc.

On se doute aisément que l’univers des vins de Bordeaux est vaste et parfois complexe. En fonction de la région, de la nature des sols, du relief des paysages, du choix des cépages ou du savoir-faire séculaire, des dizaines d’appellations ont vu le jour (Saint-Estèphe dans le Médoc, Pessac-Léognan dans les Graves, Premières-Côtes-de-Bordeaux dans l’Entre-Deux-Mers, etc.). Nous vous faisons grâce de la classification des grands crus classés ou du classement des crus bourgeois du Médoc.

Les amateurs de bon vin et de jolis paysages sont chaque année plus nombreux à se laisser tenter par l’œnotourisme, afin d’affûter leur palais et d’aller à la rencontre des producteurs. Pour tous ceux qui auraient trop affûté leur palais et rencontré trop de producteurs, les opportunités d’hébergement sur la route des vins se multiplient. À moins que l’on ne préfère s’endormir à la belle étoile, en chantonnant : « Auprès de ma vigne, qu’il fait bon, fait bon dormir ! »

Les Landes de Gascogne

À l’Ouest de la Garonne, et courant jusqu’au littoral, les Landes de Gascogne occupent une superficie de 1,5 million d’hectares, dépassant allègrement la frontière entre Gironde et Landes.

Les millions de pins qui constituent la forêt ne sont pas le fruit d’une évolution naturelle, mais le résultat de la volonté d’un ingénieur tenace du Second Empire, François Jules Hilaire Chambrelent (FJH pour les intimes), soucieux de poursuivre le travail initié par Nicolas Brémontier en 1786. Brémontier, lui-même ingénieur, fut l’un des premiers en France à lancer une vaste opération de fixation des dunes littorales ou intérieures. Pour ces dernières, il fait planter des milliers de pins maritimes, protégés par des genêts.

Quelques décennies plus tard, Chambrelent pousse l’expérience plus loin. Il constate que le sous-sol imperméable, constitué de sables agglutinés par des sucs végétaux, est à l’origine des eaux stagnantes, surtout en hiver, lorsque les précipitations sont importantes. De fait, cette inondation hivernale et la sécheresse provoquée par les chaleurs d’été rendent le sol infertile. La végétation est composée de bruyères, de genêts et d’ajoncs.

Fort logiquement, l’ingénieur en chef en déduit que l’écoulement de ces eaux superficielles doit être la première étape de l’assainissement des sols. Hélas, la déclivité du terrain est très faible sur l’ensemble du territoire des Landes. La solution passe par le creusement de fossés de 50 à 60 cm de profondeur, en fonction des irrégularités du sol, suivant un « plan bien parallèle à la pente générale du terrain ». Ainsi, l’eau s’écoule régulièrement et le sol est enfin assaini.

Le problème de drainage réglé, FJH comprend que la culture de céréales n’est pas envisageable à court terme. Il faudrait, pour la rendre possible, ajouter au sol sableux un mélange d’argile et de calcaire. Qui plus est, les cultivateurs ne sont pas nombreux dans cette région pauvre et hostile. En revanche, la culture forestière, notamment de pins maritimes et de chênes, apparaît être une alternative crédible.

Ses premières expériences sont couronnées de succès et suscitent l’intérêt des propriétaires locaux. La célèbre forêt des Landes de Gascogne est en train de naître, et à une vitesse surprenante. En cinq ans, plus de 20 000 hectares sont transformés, modifiant le paysage et les habitudes ancestrales des habitants, finalement ravis de ne plus subir un environnement qui les pousse à la misère.

Séduit, l’Empereur Napoléon III en personne, à travers la loi de 1857, impose des travaux d’assainissement à grande échelle.

La culture des pins génère de nouvelles activités très lucratives, comme le gemmage et l’exploitation du bois, contribuant à améliorer les conditions de vie des villageois. Les bergers disparaissent progressivement, les échasses sont de moins en moins utilisées.

Créée et maîtrisée par l’homme, la forêt est paradoxalement une invitation à redécouvrir et à s’imprégner de la nature. Profondes, mystérieuses lorsque la brume s’invite, parfois monotones en raison de la prédominance du pin maritime (80 % de la surface), les Landes de Gascogne offrent pourtant une multitude de milieux naturels à celui qui prend le temps d’observer.

La rivière L’Eyre serpente dans cet univers particulier, dévoilant par endroits un tout autre décor, nourri de frênes, de catalpas et de peupliers. Les rives sont mangées par l’osmonde royale, une grande fougère, et les roseaux. Ici, c’est le territoire du héron cendré, du martin-pêcheur, de la foulque macroule, du bécasseau royal et d’une centaine d’autres espèces d’oiseaux migrateurs ou sédentaires.

La forêt se compose également de vallées luxuriantes, de clairières de cultures, d’airials ou se regroupent quelques maisons traditionnelles.

Éléments d’histoire de la Gironde

Éléments d’histoire de la Gironde


De la présence humaine dès l’Aurignacien à la série de décapitations des députés girondins au terme de la Révolution française, la Gironde est quand même en droit de revendiquer une Histoire pour le moins touffue.

Les premières sociétés

À l’instar de la Dordogne, les ressources naturelles de la Gironde (abris sous roche, nombreux cours d’eau, vastes forêts pleines de délicieux gibiers) ont favorisé l’installation de nos ancêtres dès l’ère préhistorique.

Si le patrimoine est moins copieux que celui découvert en terres périgourdines, il présente un intérêt historique certain, ne serait-ce que grâce à la proximité des basses vallées de la Dordogne et de la Garonne. Ainsi, la grotte de Pair-non-Pair, près de Bourg-sur-Gironde, découverte en 1881, a révélé la présence de milliers d’outils en silex, d’objets en ivoire et d’ossements d’animaux, datant de l’Aurignacien (-30 000). Mieux, une soixantaine de figures gravées orne les parois, représentant des cervidés, des mammouths, des bovidés ou encore des félins.

En terres médocaines, à proximité de Soulac, les archéologues ont retrouvé des silex aziliens datant de 9 000 à 8 000 av. J.-C. Il semble d’ailleurs que les hommes se soient durablement installés pendant quelques millénaires sur la façade atlantique, trouvant dans cet environnement maritime une source continuelle de nourriture (poissons, crustacés, gibier) et la garantie d’un joli bronzage doré grâce aux vastes plages qui n’étaient pas encore, ô luxe suprême, sujettes à une surfréquentation touristique.

Dans la région de Pauillac, les hommes de l’âge du Bronze (1 500 avant J.-C.) habitaient des campements à proximité du fleuve.

Le dolmen de Curton, à Jugazan, forme un autre précieux témoignage de la Préhistoire, et plus précisément du Néolithique. Découvert en 1904 par l’abbé Labrie, inscrit au titre des Monuments historiques en 1995, le dolmen abritait huit corps inhumés. L’abbé a également constaté la présence d’un mobilier funéraire, composé de coquillages troués, d’une hache et même d’un vase. Le site, bien conservé, peut toujours être visité aujourd’hui.

Autre vestige digne d’intérêt : l’allée couverte de Roquefort, à Lugasson. D’abord étudié par l’abbé Labrie en 1922, le site a fait l’objet de nouvelles analyses en 1971. Il a été occupé par les hommes il y a environ 6 000 ans (Néolithique). À l’instar du dolmen, l’allée était dédiée aux rites funéraires et servait de sépulture collective.

On trouve aussi quelques menhirs en Gironde, dont le plus remarquable est celui dit de Peyrefitte, à Saint-Sulpice-de-Faleyrens. Probablement érigé entre 2 600-2 300 av. J.-C. (Néolithique récent), il affiche une hauteur respectable de 5,20 m pour une largeur de 3 m.

Tribus gauloises et invasions

En Gironde, deux tribus principales se partageaient le territoire : les Vasates et les Bituriges Vivisci. Les premiers sont un peuple aquitain, proto-basque dont la capitale, Cossio, est connue aujourd’hui sous le nom de Bazas. Les Bituriges Vivisci (ou Bituriges déplacés) sont quant à eux d’origine celtique, ayant quitté la région de Bourges entre la fin de la guerre des Gaules et le règne d’Auguste. Cette peuplade se subdivise en plusieurs entités à travers la Gironde : les Boïates dans le pays de Buch, les Belendi dans celui de Belin et enfin les Medulli, installés à Burdigala (Bordeaux).

Lors de la conquête romaine, les Vasates tentent de résister aux légions de César mais les Bituriges se soumettent sans trop de difficulté, en 56 avant J.-C., à l’autorité de Rome.

Contrairement aux Pétrocoriens installés en Dordogne, les tribus gauloises de la Gironde n’envoient aucun homme prêter main-forte à Vercingétorix lors de la bataille d’Alésia (- 52). Au contraire, Vasates et Bituriges, conscients d’habiter une région qui contrôle entre autres le commerce de l’étain, denrée précieuse, anticipent rapidement les bienfaits de la Pax Romana. À titre d’exemple, la grande voie romaine reliant Arles à Toulouse est prolongée jusqu’à Burdigala, offrant un axe de communication majeur avec les autres contrées.

Doucement mais sûrement, l’organisation et la culture romaines s’imposent. Sous le règne de l’empereur Vespasien (69-79), Burdigala devient une cité importante et acquiert le statut de capitale de province. Quelques décennies plus tard, la ville s’impose comme la métropole de la seconde Aquitaine, un vaste territoire. Afin de confirmer son essor commercial, de nouvelles routes sont pavées, en direction de Périgueux, Agen et Dax.

L’amphithéâtre de Burdigala, appelé Palais Gallien, fut érigé au IIe siècle. Il pouvait accueillir plus de 20 000 personnes.

Tout va donc pour le mieux dans le meilleur des mondes. Burdigala prospère et se fait belle, notamment grâce à la construction de son amphithéâtre Gallien, de ses thermes, temples et palais, sans oublier la spécialité romaine, les aqueducs. Aux alentours, on procède aux premières plantations de vignes, en privilégiant le cépage vitis biturica, l’ancêtre du cabernet. Le commerce de l’étain de Cornouailles, du bois, de la résine et encore des vins méditerranéens prend son essor. Burdigala est alors considérée comme la « petite Rome ».

Les premiers missionnaires envoyés de Rome suscitent quelques agacements, à l’image de Martial de Limoges (ou Saint-Martial), fondateur de l’église d’Aquitaine, en mission dans le Bordelais vers 250 afin d’évangéliser cette région tout acquise aux dieux romains. Il est inutile de préciser que son accueil n’est pas des plus chaleureux. Néanmoins, il pose les premiers jalons de la religion chrétienne, officielle à partir de 325.

Le personnage emblématique de cette douce époque est sans conteste le poète et universitaire Ausone (310-395), dont la vivacité d’esprit et les qualités oratoires ont dépassé le seul périmètre de Burdigala. On vient de tout l’Empire pour l’écouter et l’empereur Valentinien le convoque à Trèves en 364, où il devient le précepteur du jeune Gratien.

Amoureux fou de sa ville natale et de sa région, Ausone est un épicurien, amateur des huîtres du Médoc, des gibiers et surtout des vins de propriétaires. « Temperat ingenuos qua laeta Aquitanica mores » : L’Aquitaine où s’adoucit la rudesse des mœurs primitives… Les femmes ressentent quelques douces chaleurs à son passage dans les rues de Burdigala, avec l’ambition secrète de partager la couche d’Ausone.

Le Ve siècle siffle le coup d’envoi des invasions diverses et variées. Ce sont d’abord les Vandales qui pillent Bordeaux en 409 et s’installent dans la région, où ils ne resteront que deux années. Viennent ensuite les terribles Wisigoths, maîtres du sud-ouest de la Gaule dès 475. Fort heureusement, Clovis, à la tête des Francs, remporte la bataille de Vouillé en 507 et transperce le cœur d’Alaric II, poussant les guerriers germaniques à reculer jusqu’en Espagne.

Les invasions se succèdent pendant quelques siècles. Musulmans, Carolingiens, Gascons et encore Normands livrent les terres girondines et la cité de Bordeaux aux tueries, pillages, incendies, destructions et autres joyeusetés.

La bataille de Castillon, une date clé de l’Histoire de France

Aliénor d’Aquitaine épouse en 1152 le fougueux Henri Plantagenêt, duc d’Anjou, couronné roi d’Angleterre deux ans plus tard. Elle lui offre en dot son joli duché, qui passe de fait sous domination anglaise. Il le restera pendant près de trois siècles, poussant le royaume de France à initier les premières luttes de reconquête.

Les princes anglais viennent s’installer en Aquitaine. Soucieux de ne pas exacerber les tensions des populations locales, notamment en Gironde, ils autorisent les premières franchises communales, permettant aux villes d’instaurer leur propre gouvernement, d’élire leurs magistrats et de se défendre librement.

Le commerce du vin est resplendissant. Deux fois l’an, 200 voiliers transportent le précieux nectar des quais de Bordeaux vers l’Angleterre.

La « période anglaise » de l’Aquitaine est marquée par de nombreux troubles. Le fils d’Henri II, Richard Cœur de Lion, se comporte en maître abusif. Il pille les richesses du duché, mate les nobles gascons, est accusé à multiples reprises de viols et de meurtres.

En 1337, les rivalités persistantes entre Français et Anglais, entre la dynastie des Plantagenêt et celle des Valois aboutissent à la guerre de Cent Ans avec, en ligne de mire, la mission de récupérer la Guyenne.

En 1362, le roi Édouard III transforme l’Aquitaine en principauté et la confie à son fils aîné Édouard Plantagenêt, dit le « Prince noir ». Ce dernier impose des impôts importants à tous ses sujets pour maintenir son train de vie. Le comte d’Armagnac, Jean 1er, s’y oppose résolument, livre bataille et quémande le soutien du roi de France, Charles V.

Les tensions entre les royaumes d’Angleterre et de France ne cessent de croître. Au gré des conflits locaux, les terres d’Aquitaine sont prises puis rendues aux Anglais.

En 1451, l’armée royale de Charles VII vient de reconquérir la Normandie et se dirige vers la Guyenne, où elle s’empare des villes de Blaye, Libourne, Castillon, Saint-Emilion et Bordeaux. En réponse, le roi d’Angleterre Henri VI envoie une armée, placée sous les ordres de John Talbot. Il reprend Bordeaux en 1452, permettant de réactiver les réseaux commerciaux entre les deux pays.

Fort marris, les Français décident de tendre un piège à proximité de Castillon, le 13 juillet 1453. Les frères Jean et Gaspard Bureau, respectivement trésorier général de France et grand maître de l’artillerie, profitent de la géographie des lieux pour installer stratégiquement les troupes. Le millier d’hommes de la cavalerie bretonne se planque sur la colline d’Horable. Jean Bureau fait installer 300 canons mobiles sur la plaine de Colle.

Lorsque Talbot et ses hommes arrivent à Castillon, au matin du 17 juillet, ils ne perçoivent pas clairement les positions de l’armée française. Les assauts qu’il ordonne sont systématiquement repoussés. Surtout, ils sont tombés dans le piège imaginé par Jean Bureau, qui positionne ses canons sur les troupes anglaises et les quelques milliers de Gascons. Les premiers tirs sont dévastateurs.

Les soldats anglais, dans la force du désespoir, parviennent néanmoins à lancer plusieurs assauts mais ignorent que la cavalerie bretonne, toujours en retrait, est sur le point d’intervenir. C’est le coup de grâce.

Les Anglais ont bien mangé ce jour-là. Miniature ornant un manuscrit des Grandes Chroniques de France, fin du XVe siècle, British Library.

Plus de 4 000 Anglais perdent la vie. John Talbot et deux de ses fils sont également tués. De leur côté, les Français ne déplorent qu’une centaine de tués et de blessés. Cette large victoire permet à la Guyenne de redevenir française et, surtout, de mettre fin à la guerre de Cent Ans.

Le 14 octobre de la même année, le roi Charles VII parade dans les rues de Bordeaux, sous les acclamations inquiètes des habitants, qui ont quand même soutenu la cause anglaise.

Les premières décisions ne tardent d’ailleurs pas à être prises : Bordeaux perd ses privilèges, des dizaines de seigneurs de la province sont condamnés à l’exil et le roi déploie des garnisons dans toute la Guyenne, au cas z’où les Anglais émettraient le souhait d’un come-back.

La traite négrière au XVIIIe siècle

Dès l’époque gauloise, Bordeaux a su tirer parti de sa situation géographique privilégiée et parfois même de ses envahisseurs pour s’imposer comme une ville commerciale de renom.

Au XVIIIe siècle, la ville profite d’une vraie prospérité, notamment grâce à l’activité de son port, passerelle privilégiée vers l’Espagne et les colonies. La production vinicole annuelle avoisine les 200 000 tonneaux, dont plus de la moitié est exportée en Angleterre.

La capitale de la Guyenne va considérablement augmenter ses activités de négoce autour de la traite des esclaves africains. Le « trafic triangulaire » est somme toute assez simple. Les armateurs bordelais envoient des navires sur la côte ouest-africaine (principalement en Guinée et au Sénégal), chargés de denrées et de bibelots, qu’ils échangent contre le « bois d’ébène », les esclaves. Ces derniers, entassés comme des animaux pendant la traversée de l’Atlantique, sont vendus à prix d’or dès leur arrivée aux Antilles (Cuba et Saint-Domingue), à la recherche d’une main d’œuvre importante pour répondre aux attentes des grandes villes européennes. Les voiliers reviennent ensuite à Bordeaux, les cales débordant de sucre, de bois précieux, de cuir ou encore de café.

Très rapidement, Bordeaux devient la deuxième ville négrière du royaume de France, derrière Nantes et à niveau égal avec La Rochelle, suscitant l’admiration d’Étienne François de Choiseul, ministre, qui écrit en 1768 : « Le Roi étant informé que les négociants du port de Bordeaux se livrent avec beaucoup de zèle au commerce de la Traite des Nègres, qu’il résulte des états qui lui ont été présentés que, depuis le 30 avril 1767 jusqu’au 30 octobre de la même année, ils ont armé sept navires pour la côte de Guinée, qu’ils en ont actuellement six autres en armement pour le même objet ; et que si la traite était favorable, ils pourraient introduire 5 190 nègres aux colonies […] ils jouiront de l’exemption du droit de livres par tête. »

De fait, de nouvelles fortunes, souvent rapides, se font jour à Bordeaux. Les prises de position de Montesquieu contre l’esclavagisme ne pèsent pas lourd face aux puissants acteurs du négoce bordelais. Ces derniers défendent leurs intérêts jusqu’à Paris en 1789.

Le mouvement abolitionniste est néanmoins amorcé, grâce à des personnalités comme André-Daniel Laffon de Ladebat. Ce dernier, commissaire député de la Guyenne, prononce son discours à l’Assemblée, le 13 août 1789, sur « la nécessité et les moyens de détruire l’esclavage dans les colonies ».

L’esclavage est définitivement interdit en 1817, après la déportation de 150 000 hommes, femmes et enfants organisée par les négriers bordelais. Certains d’entre eux poursuivront leur activité clandestinement pendant quelques années.

La naissance des Girondins (pas l’équipe de foot)

La création du département de la Gironde intervient en 1790, au détriment de la province de la Guyenne. Des tensions apparaissent localement, certains souhaitant une séparation du Bazadais et du Bordelais, d’autres espérant la formation d’un nouveau département entre la Gironde et les Landes.

Les principaux acteurs de la Révolution à Bordeaux, tels Roland, Brissot, Vergniaud, Guadet, Gensonné, acquièrent une solide réputation, qui dépasse rapidement le périmètre de la cité gasconne, notamment grâce à leur éloquence et leur idéalisme politique. Issus de la bourgeoise, occupant des fonctions d’avocat, de professeur ou de journaliste, on les surnomme les Brissotins ou les Rolandins. C’est à Lamartine que l’on doit le terme de Girondins, au XIXe siècle.

Ils constituent le groupe parlementaire majoritaire à l’Assemblée législative en 1791. Adaptes de la pensée voltairienne, épris de liberté politique, ennemis jurés des partisans de la monarchie constitutionnelle, les Girondins défendent avant tout les valeurs de la bourgeoisie, sans vouloir se soucier des démarches initiées en faveur des couches de la population les plus défavorisées. Ils ne partagent aucunement les revendications et les attentes du peuple révolutionnaire.

Membres du club des Jacobins, ils siègent à gauche de l’Assemblée, où ils développent leurs arguments contre les immigrés (discours du 31 octobre et du 9 novembre 1791) puis contre les prêtres réfractaires (discours du 29 novembre).

En mars 1792, le roi Louis XVI appelle plusieurs d’entre eux à occuper différents ministères. Ils contribuent à faire adopter la déclaration de guerre contre l’Autriche un mois plus tard, soulageant ainsi leur soif de combat à l’encontre des dynasties européennes.

Majoritaires à l’Assemblée, occupant les ministères clés, les Girondins alimentent la colère des Montagnards, parmi lesquels Danton, Robespierre et Marat. À leurs yeux, les velléités guerrières sont susceptibles de fragiliser le mouvement révolutionnaire français.

Les revers militaires, le véto du roi à deux décrets révolutionnaires, le départ un peu précipité des trois ministres, les difficultés économiques et l’aveuglement dont ils font preuve face aux attentes populaires poussent les Girondins, fragilisés, à adopter une ligne politique plus ferme.

Lors de la mise en place de la Convention nationale, qui succède à l’Assemblée législative le 21 septembre 1792, ils siègent à droite, face aux Montagnards, avec lesquels, néanmoins, ils abolissent la royauté et proclament l’instauration de la première République. Les tensions entre les deux groupes se font vives.

L’insurrection populaire du 10 août 1792 est un désaveu cinglant pour les Girondins. Ils se retirent du club des Jacobins et ne peuvent s’opposer à la création du Tribunal révolutionnaire et du Comité du Salut public entre mars et avril 1793.

Les Montagnards préparent le coup de grâce et encouragent les sans-culottes « à se mettre en insurrection contre les députés corrompus ». Le 2 juin, les Girondins sont chassés de la Convention. Certains tentent d’initier une révolte fédéraliste contre les Montagnards, rapidement réprimée. Le cri de Vergniaud : « Hommes de la Gironde, levez-vous ! » poussé le 5 mai n’est pas entendu.

Le député girondin Pierre Victurnien Vergniaud, décapité le 31 octobre 1793.

Le Tribunal révolutionnaire juge et condamne à mort vingt-et-un députés, guillotinés le 31 octobre. D’autres exécutions suivront tout au long de la Terreur, jusque sur la place Gambetta de Bordeaux, qui vit tomber la tête du député Elie Guadet en 1794.

En mémoire à ses héros, la ville fait ériger, un siècle plus tard, l’impressionnant Monument aux Girondins, colonne toujours fièrement dressée sur la place des Quinconces.

Le festival international des Menteurs de Moncrabeau

Richesses du Sud-Ouest Traditions Lot-et-Garonne

Le festival international des Menteurs de Moncrabeau


À Moncrabeau, avoir le nez qui s’allonge n’est pas forcément source de réprimande. Ce serait au contraire un signe de respect, d’intégration et, oui, disons-le, d’admiration.

Crédit photo: Académie des Menteurs

Près de trois siècles d’approximation et d’exagération

L’adorable village gascon niché à la frontière du Lot-et-Garonne et du Gers a en effet la réputation d’être la capitale mondiale des menteurs, et ne s’en cache pas (pourquoi le devrait-il, après tout ?). L’affaire, si elle prête à sourire, est sérieuse. L’Académie des Menteurs veille au grain, ou plutôt au respect de la tradition qui, mine de rien, peut afficher ses presque trois siècles d’histoires incroyables, de témoignages singuliers, d’affirmations grandiloquentes et de confessions à la limite de la sincérité.

La tradition est née en 1748, comme l’atteste la « pierre de vérité », qui trône au-dessus du fauteuil des menteurs. Habitués à se réunir sous la halle pour discuter de tout et de rien, les bourgeois aimaient se raconter les histoires du quotidien et les indiscrétions de voisinage, commentaient les travaux agricoles, discutaient la vie politique locale.

Comme cela est souvent le cas lorsqu’on se retrouve régulièrement entre amis, et en l’absence d’une actualité originale ou riche en évènements, la conversation finit par tourner un peu en rond. Alors, dans le souci de rendre leur récit digne d’intérêt et de conserver l’attention de leur auditoire, les habitants de Moncrabeau commencèrent par exagérer quelques passages de leur histoire. Puis quelques autres. La surenchère aidant, ils introduisirent des éléments narratifs inhabituels. Puis quelques autres. Après quelque temps, certains s’aperçurent à leur grande surprise que les trois quarts de leur récit étaient sortis de leur imagination, comme ça, presque naturellement, provoquant un grand intérêt et un certain amusement de l’assistance.

La tradition des Menteurs venait de naître à Moncrabeau. Et Moncrabeau venait d’entrer dans l’Histoire.

L’Académie des Menteurs ? Une institution.

Aussi séculaire soit-elle, la tradition doit être respectée et protégée. C’est le rôle bienveillant de l’Académie des Menteurs. Composée de quarante membres, habillés d’un costume rouge et blanc qui impose le respect, d’une parité parfaite, elle veille à la pérennité et au rayonnement des menteries, qui dépasse depuis déjà longtemps les simples limites de la Gascogne ou du Sud-Ouest.

Car il n’est pas question ici de parler seulement de mensonge, ce serait faire offense à tout le village de Moncrabeau, mais de menterie. La différence est subtile, et pourtant fondamentale. Selon le site officiel de l’Académie, une « menterie est un savant mélange de vérité, mensonge et humour, [qui] doit durer de cinq à six minutes et doit être entendue par tout public. Ce n’est en aucun cas une tribune politique, ni confessionnelle. On pourrait même donner le terme de Gasconnade à la définition de la menterie ».

Selon la tradition locale, qui s’appuie sur une observation très juste, les dentistes, journalistes, avocats et politiciens reçoivent automatiquement le brevet de menteur et sont considérés derechef comme des citoyens d’honneur, ce qui donne encore plus de force à la réputation de Moncrabeau.

Toujours active, l’Académie organise tout au long de l’année différents évènements (loterie, banquets, concours de belote…) pour se rappeler au bon souvenir de chacun et, accessoirement, assurer un minimum de trésorerie nécessaire à son fonctionnement et à l’organisation du festival international des Menteurs chaque été.

Le plus grand festival du monde, parole de Gascon

Cela fait déjà plus de quarante ans que le Festival des Menteurs de Moncrabeau est invariablement organisé le premier dimanche d’août. Ici, point besoin de stars de cinéma ou d’éphémères vedettes de la télé-réalité pour susciter l’intérêt du public puisque c’est le thème même du festival que l’on vient applaudir.

« Cette délectation du palais et du plat de la langue à l’exagération, la fable, la forfanterie, démontre annuellement la substance profonde de notre esprit, qui déroute les Américains, intrigue les Japonais et désole les Anglais. Il trouve sa couleur dans la subtile différence qui sépare la tromperie de la menterie. Pour mesurer l’épaisseur de la nuance, l’expérience nécessaire se compte en années, voire en générations, ravivées par le sel distribué aux princes candidats par l’Académie de Mont des Chèvres. Et quelle consécration, quel symbole quand un de nos conseillers généraux fut sacré roi puis roi des rois dans cet autre pays de la relativité » écrit avec talent Bruno Rapin dans le livre « Lot-et-Garonne, de l’an mil à 2050 » (éditions Fayard).

Le protocole est simple et immuable. Après la messe des Menteurs, qui ouvre officiellement le concours, chaque candidat vient s’asseoir sur le fauteuil de pierre, installé sur la place du village. Faisant face aux membres de l’Académie et au public, il dispose au maximum de six minutes pour déclamer son histoire abracadabrantesque, qui doit cependant être perçue comme la plus vraisemblable possible.

Ensuite, chaque Académicien, équipé d’une salière et d’une cuillère en bois, « attribue de deux à dix cuillérées de sel en fonction de sa menterie ; deux petits pages recueillent le sel auprès du jury à l’aide d’un sac de jute qui est remis aux Ingénieurs des poids et mesures pour la pesée », comme l’explique le site officiel de l’Académie.

Le candidat dont la menterie a suscité la plus grosse quantité de sel est désigné Roi des Menteurs. Il est à noter que ce système de vote bat à plates coutures tous les appareils électroniques de dernière génération puisque la désignation du meilleur menteur peut parfois se jouer au gramme près !

La Reine ou le Roi prend alors place sur une chaise à porteurs afin de recevoir les félicitations et les sifflets d’admiration de la foule tout le long des ruelles du village. Les autres candidats peuvent se consoler un peu en recevant le brevet de menteur qui leur permet de « travestir la vérité en tous temps et en tous lieux ! ». C’est pas rien.

En 2014, la Québécoise Yolaine Carrier a été couronnée (1 610 grammes de sel). Serveuse de son état au bar Le Sacrilège du quartier Saint-Jean de Québec, elle s’est appuyée sur les brèves de comptoir de son établissement pour raconter au public médusé qu’un bateau de transport touristique, navigant sur le Saint-Laurent, propose à ses clients d’observer un animal marin mi-homme, mi-phoque lorsqu’il n’est pas possible d’apercevoir des requins ou des baleines.

En 2015, le Néracais Pierre Gallio a retrouvé la chaise à porteurs pour la cinquième fois (1 510 grammes contre 1 400 grammes en faveur de son dauphin). L’homme a conquis son auditoire en détaillant sa prise de fonctions municipales à la tête de la petite commune Aquisou Bien, en suivant deux objectifs majeurs : « Faire passer la LGV dans la commune sur l’ancienne voie ferrée et implanter un aéroport qui s’appellera Notre-Dame-des-Glandes. »

L’Académie des Menteurs de Moncrabeau peut s’appuyer sur la participation fidèle de la Royale Moncrabeau de Namur, qui envoie chaque année des représentants dans le Lot-et-Garonne et vient au complet tous les deux ans. Les ambitions internationales du festival passent aussi par la future coopération avec les Italiens de la ville de Piastre, « contrée où une autre académie d’affabulateurs vénère Pinocchio », comme le précisent Michael Ducousso et Paulette Guerini dans La Dépêche du Midi (3 août 2015).

Le Festival international des Menteurs est surtout l’occasion de retrouver le goût des mots, de se laisser surprendre par des affirmations définitives qui laissent la place au doute, de redécouvrir les instants un peu magiques d’une veillée, qui rassemblait jadis les habitants du village lorsque les écrans n’existaient pas.


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Pratique :

Adresse et contact : Académie des Menteurs, Rue Cocu Saute 47600 Moncrabeau – Tél. 05 53 97 32 25 – Web: www.academiedesmenteurs.fr
Accès : Village de Moncrabeau, situé sur la D930 entre Nérac au nord et Condom au sud.
Date: Le premier dimanche d’août, au cœur du village, place de la Halle.

Informations touristiques

Informations touristiques

Cour intérieure à Lectoure – Crédit photo: FranceSudOuest

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