La dune du Pilat est-elle menacée ?

La dune du Pilat est-elle menacée ?


Tempêtes, grandes marées, érosion, surfréquentation… Malgré son exceptionnel gabarit, la dune du Pilat ne cesse de reculer, parfois plus rapidement que le trait de côte.

Crédit photo : Christian Bachelier – Flickr

Un monstre de sable en mouvement

L’identité des plages d’Aquitaine repose en partie sur le cordon dunaire, qui représente un piège à sable permettant non seulement de freiner l’érosion, mais aussi d’empêcher l’ensablement de la forêt de pins maritimes.

La constitution de ces dunes dépend d’abord du rôle joué par l’océan. Il dépose sans relâche le sable sur les plages, que le vent se charge ensuite de pousser vers la forêt. Les premiers obstacles, comme la végétation (de type chiendent des plages), facilitent enfin l’accumulation du sable et génèrent, au fil du temps, des dunes bordières.

« Amortisseur de l’énergie marine, « piège à sable » qui protège l’arrière-pays, réservoir de biodiversité, le massif dunaire est une composante originale et attractive du paysage » indique à ce titre le site de l’Observatoire de la Côte Aquitaine.

À l’entrée du bassin d’Arcachon, l’impressionnante dune du Pilat répond aux mêmes phénomènes naturels. Sa dimension exceptionnelle s’explique avant tout par la proximité du banc d’Arguin, composé d’îlots sableux qui constituent une formidable réserve de sable fin.

La dune adopte par ailleurs une forme asymétrique. La face exposée à l’océan révèle une pente douce. Les grains de sable, poussés par le vent depuis le banc d’Arguin, remontent en effet cette pente pour atteindre le sommet de la dune et se déverser sur l’autre face, à la pente beaucoup plus raide.

Haute de près de 110 mètres, frôlant les 3 kilomètres de long pour 616 mètres de large, la dune du Pilat témoigne de 4000 ans de variations climatiques. Aujourd’hui, sous l’effet des vents dominants et des marées, elle continue de se déplacer vers l’Est, grignotant chaque année quelques mètres de forêt. Le versant Ouest subit quant à lui la pression de l’océan, surtout lors des épisodes de tempête.

L’érosion comme adversaire… ou partenaire

Le 2 mars dernier, Le Monde publie un article au titre évocateur : « La moitié des plages du monde pourraient disparaître d’ici à la fin du siècle ». La journaliste, Audrey Garric, cite ainsi le rapport du GIEC, dont les résultats « montrent que l’érosion des plages sableuses, déjà importante aujourd’hui, va s’aggraver à l’avenir. Une étude parue en 2018 estime que près d’un quart d’entre elles subissent un retrait supérieur à un demi-mètre par an. »

La principale raison est liée au réchauffement climatique, qui accélère la montée des eaux. Les phénomènes de grandes marées et les épisodes récurrents de tempête contribuent également à abîmer le littoral.

En France, un quart des côtes est touché par l’érosion, selon l’étude Eurosion publiée en 2004. Plus localement, les tempêtes hivernales de 2013 et 2014 ont fortement érodé la côte sableuse aquitaine, et particulièrement en Gironde. Par endroit, le trait de côté a reculé de plus de 20 mètres.

Si les moyens de lutte se révèlent à court terme particulièrement coûteux et modérément efficaces, la prise de conscience du caractère immuable de l’érosion peut aussi correspondre à une décision politique. À Lacanau, l’équipe municipale considère sérieusement le projet d’une relocalisation, consistant à acquérir puis à détruire les immeubles du front de mer avant qu’ils ne soient touchés par l’océan.

Une telle démarche de repli stratégique s’avère bien sûr impossible pour la dune du Pilat, pourtant confrontée elle aussi à l’érosion de sa plage, principalement sur la partie Nord. Le littoral situé plus au Sud semble en revanche moins touché ces dernières années, même si la prudence s’impose.

Ainsi, en décembre 2019, les grandes marées et les fortes tempêtes ont généré une importante érosion du littoral de La Teste-de-Buch et créé de nouvelles falaises de sable. La plage de la Corniche, au pied de la dune, n’a certes pas été impactée, mais la grosse houle de février 2020 a emporté les protections en béton et contribué à l’effondrement des perrés.

Conséquences des fortes tempêtes de décembre 2019. Ici, plage de la Lagune, non loin de la dune – Crédit photo: Eric Constantin, Twitter ONF Aquitaine

Un (trop) grand succès touristique

La dune du Pilat peut être considérée comme le site emblématique de Gironde. Ce véritable iceberg de sable attire chaque année plus de deux millions de visiteurs et près de 16 000 touristes par jour en pleine saison.

Si son accès reste gratuit, le parking situé à proximité est en revanche payant. Le site dégagerait ainsi un chiffre d’affaires de 13 M€, complété par la vente de souvenirs. Les recettes indirectes se chiffreraient quant à elles à plus de 150 M€, un montant astronomique justifiant pour certains de préserver la manne touristique, voire même de l’amplifier. Il est ainsi prévu de construire un second parking, pour une capacité d’accueil de 1600 places (contre 750 aujourd’hui).

C’est pourtant la dune elle-même qu’il conviendrait de préserver davantage. Malgré son imposante présence, elle intègre un écosystème complexe et fragile.

« C’est difficile à quantifier, mais on sait que le tourisme de masse a un impact. Le sable s’envole dès qu’il y a du vent, mais en présence de touristes, c’est encore pire » constate Jacques Storelli, ancien président de l’association de défense et de promotion de Pyla-sur-Mer, interrogé dans l’émission Capital (juillet 2019).

Aux alentours, le flux incessant des voitures contribue également à dégrader l’environnement, les véhicules se garant sur le bas-côté de la route, parfois sur une distance supérieure à un kilomètre. Sans même évoquer le risque d’incendie…

Mener une action publique de sauvegarde du site

Attaquée par les éléments naturels et menacée par la surfréquentation, la dune du Pilat nourrit depuis déjà longtemps la réflexion des pouvoirs publics. En 1940, l’État décide de protéger une partie du site contre l’urbanisation du littoral. Le périmètre de protection est d’ailleurs étendu en 1994, permettant le classement de près de 7000 hectares du massif forestier environnant.

Plus récemment, une proposition de loi tendant à réguler l’hyper-fréquentation des sites naturels et culturels patrimoniaux a été adoptée au Sénat et soumise à l’Assemblée nationale. Son vote définitif représenterait un outil précieux pour les maires concernés, qui seraient autorisés à mieux réguler le flux des touristes.

« Il y a eu une époque où nous courions après le tourisme… sauf que les hyper-fréquentations ne peuvent plus être d’actualité » déclare ainsi Jérôme Bignon, le sénateur à l’origine du texte de loi, à France 3 Nouvelle-Aquitaine. Son collège Hervé Gillé, sénateur de Gironde, ne dit pas autre chose : « On assiste aujourd’hui à la création de spots touristiques qui subissent des pressions environnementales importantes alors que ce sont des sites sensibles. »

De son côté, le Conservatoire du littoral mène depuis quelques années une ambitieuse opération de nationalisation de la dune du Pilat et de sa forêt proche. La tâche s’annonce ardue puisque le site se compose en partie de 177 parcelles privées, qu’il convient d’identifier puis de racheter. Aujourd’hui, plus de la moitié a déjà été acquise. Quelques réticences se font jour lorsque ces propriétés accueillent des cabanes de résiniers rénovées au fil des ans et servant de logement estival.

D’autres initiatives sont également à l’étude, à l’instar de celle consistant à privilégier la navette entre la dune et un parking relais, situé plus en retrait. Pour l’ancien maire de La Teste, Jean-Jacques Eroles (battu aux élections municipales de 2020), la mise en place d’un système de quota permettrait de limiter le nombre de touristes, dans la même idée que la proposition de loi soumise au vote du Parlement.

Contrer l’érosion en crachant du sable

Enfin, la préservation du site passe aussi par les opérations de réensablement des plages du Pilat menées tous les deux ans. La drague « Côtes de Bretagne » aspire près de 200 000 m3 de sable déposés sur le banc du Bernet avant de les projeter sur les 4 kilomètres de littoral.

« Même si cette opération permet effectivement de lutter contre l’érosion, notre mission est d’abord de maintenir les usages sur le plan d’eau. Il s’agit d’abord de maintenir la navigation pour les pêcheurs et les ostréiculteurs qui empruntent cette voie pour aller à Arguin, car il y a des secteurs où vous ne passeriez plus en bateau, tellement le secteur s’ensable. Deuxièmement, cette opération permet de réinstaurer un sentier du littoral, pour que l’on puisse continuer à longer la plage. Et le troisième usage, c’est bien entendu l’activité balnéaire » explique Isabelle Laban, directrice de la communication du Siba, à Mickaël Bosredon, du journal 20 Minutes (10/02/1968).

Un recul inéluctable

Que les amoureux de la dune se rassurent : il est peu probable qu’une tempête, aussi puissante soit-elle, vienne décapiter notre gros tas de sable préféré. Au pire, quelques mètres disparaîtront, rapidement reconstitués au gré des rafales de vent, à même de charrier les volumes de sable du banc d’Arguin.

Non, la menace (ou peut-être faudrait-il écrire la fatalité) prend ici la forme du recul que concède la dune chaque année. En 50 ans, ce recul s’est établi à plus de 200 mètres. « Aujourd’hui, sa fixation n’est plus envisagée. Sa progression est inéluctable et participe à son caractère remarquable. Aucune action entreprise ne pourra limiter l’avancée dunaire. Malgré de nombreuses tentatives passées pour la stabiliser, la dune du Pilat reste mobile et « roule » sur elle-même » précise Le Syndicat mixte en charge du site.

L’Observatoire de la Côte Aquitaine assure pour sa part un suivi topographique depuis 2009 en vue d’alimenter une base de données au fil des années. Le travail permettra d’obtenir une vision en trois dimensions de l’évolution de la dune et d’identifier les déplacements des volumes de sable pour affiner la prédiction de son « déplacement ».

Inexorablement, la dune recule et avale un peu plus de forêt chaque année – Crédit photo: Lena Glockner – Flickr

Au final, la célèbre dune du Pilat ne constitue pas l’infranchissable barrière que laisserait deviner sa taille. Moins forte que l’érosion, soumise aux tempêtes, fragilisée par l’hyper-fréquentation, elle concède chaque année quelques mètres de littoral, au grand dam des gérants de campings situés à ses pieds.

Sans aucune possibilité de la stabiliser, l’action fataliste des pouvoirs publics se limite finalement à sa préservation à long terme, au cœur d’une nature rendue plus sauvage et selon un tourisme redevenu raisonnable.


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Grattons bordelais : la grâce du gras

Grattons bordelais : la grâce du gras


Élaborée par une charcutière de Lormont à la fin du 19e, la recette des grattons a rencontré rapidement un succès franc et gourmand.

Crédit photo : Ville de Lomont

Un plat traditionnel régional et même international

Alors non, bien sûr, les grattons (il paraît que la forme plurielle s’impose) ne sont pas originaires de Bordeaux. Cette charcuterie conçue à partir de morceaux de porc cuits dans la graisse est appréciée depuis longtemps dans de nombreux pays. Aux Pays-Bas ou en Belgique, on l’appelle knabbelspek ; en Thaïlande, son nom est khaep mu; au Mexique, c’est un chicharrón et aux États-Unis, on parle de prok rinds.

Comme on peut s’en douter, les grattons trouvent aussi une origine lointaine dans nos régions, notamment en Angoumois, en Auvergne, dans le Morvan ou en région lyonnaise.

Selon différentes sources, le terme « grattons » serait tiré du verbe « gratter », geste apparemment nécessaire pour racler les derniers petits morceaux de viande grillée restés collés au fond de la marmite.

Si les grattons du monde entier s’appuient sur la même matière première et le même mode de cuisson, c’est la recette qui, au final, fait toute la différence. Et il semblerait que celle élaborée par la charcuterie Gaudin à Lormont (Gironde) ait su s’imposer auprès des gastronomes de la ville et de Bordeaux, de l’autre côté de la Garonne. On pourrait même parler de reconnaissance nationale.

Gloire et honneur à Justine Gaudin

La date précise de la première commercialisation des grattons n’a pas été retenue par l’histoire. Elle se situerait à la fin du 19e siècle. En revanche, aucun doute possible quant à leur provenance : la charcuterie Gaudin, à Lormont, dans la proche banlieue bordelaise.

rue du général de gaulle lormont
Bas de l’actuelle rue du Général de Gaulle, à Lormont. C’est ici que se situait la charcuterie Gaudin. Crédit photo: Google Street View

Le commerce est fondé en 1875 par Bernard Gaudin. Grâce à son épouse Justine, il profite assez rapidement d’une jolie notoriété, en raison de la recette savoureuse de grattons que cette dernière vient d’élaborer.

Les clients disent leur satisfaction, le bouche-à-oreille fonctionne à plein et la réputation du plat ne tarde pas à se diffuser dans les rues de la capitale girondine. Chaque dimanche, de petites embarcations traversent la Garonne pour déposer des Bordelais enjoués sur la rive du fleuve, où fleurissent les guinguettes. On y déguste bien sûr l’alose, pêchée dans l’estuaire, mais aussi, et de plus en plus, les grattons de Justine Gaudin, que l’on sert chauds et comme plat principal.

Le plat s’installe durablement dans les habitudes bordelaises, pendant près d’un siècle. En 1971, André Gaudin, le dernier charcutier de la famille, cède son fonds de commerce à Yves Ducos. Ce dernier exige que la vente s’accompagne de la divulgation de la fameuse recette élaborée par Justine, ce qui lui est accordé. De fait, la fabrication des grattons se poursuit jusqu’au début des années 2000.

Une autre version indique que la charcuterie fut reprise par l’apprenti Robert Pelin la même année, c’est-à-dire en 1971, date de départ à la retraite d’André Gaudin.

Aujourd’hui, Lormont n’accueille plus aucun artisan charcutier.

« Une recette et un goût inimitables »

C’est en ces termes élogieux que s’exprime Denis Miklou, le patron du Café du Printemps, fondé par sa grand-mère et situé à proximité de l’ancienne charcuterie.

Justine Gaudin apportait tout son talent à la fabrication des grattons. Sa première préoccupation consistait à choisir les meilleures pièces de jambon, d’épaule et de longue pour la partie maigre. Le gras de porc se composait quant à lui de couenne et de barde.

Le gras, coupé en dés, était cuit à petit feu dans un faitout non couvert. Aux trois quarts de la cuisson, la charcutière incorporait la partie maigre et ajoutait du sel, du poivre et des épices. Le secret ? Obtenir une texture légèrement confite en fin de cuisson.

Surtout, Justine Gaudin faisait en sorte de ne pas broyer ni de hacher la viande, mais de la découper finement au couteau. Les grattons bordelais étaient d’ailleurs reconnaissables aux tranches de jambon et d’épaule qui se détachaient du blanc du gras.

Après quelques heures de repos, la charcutière filtrait sa préparation dans une passoire et la moulait en terrine, en forme de cône. C’est d’ailleurs cet aspect un peu singulier qui constituait la signature finale et permettait d’identifier au premier coup d’œil les véritables grattons de Lormont !

Les grattons ont-ils vraiment disparu ?

Si la dynastie charcutière des Gaudin s’est éteinte, la fabrication du plat n’a pas été complètement abandonnée. Il serait intéressant, à ce titre, de savoir si les artisans ont pu avoir accès à la recette originale, qui doit toujours être disponible, quelque part.

Visuellement, les grattons évoluent assez vite vers une couleur grise, en raison de la présence de sel et donc de l’absence de tout conservateur. Gustativement, ils se rapprochent des rillettes, même s’ils développent une saveur quelque peu différente.

Aujourd’hui, on les consomme frais, sur une tranche de pain de campagne.

grattons bordelais
Prêt à faire tourner le cône ? Crédit photo : La Charcuterie Bordelaise

Quelques artisans continuent d’assurer la fabrication de ce plat si précieux, à l’instar de la boucherie Ribeiro au marché des Capucins de Bordeaux. D’autres marchés de la région le proposent aussi, à l’instar de Cenon, Gradignan ou Bordeaux Bastide. Bien sûr, on ne citera pas les produits industriels, par respect à l’égard de Justine Gaudin.

Enfin, les cordons bleus pourront s’attaquer eux-mêmes à la recette, publiée dans l’ouvrage « Connaître la cuisine bordelaise », de François Martin (Éditions Sud-Ouest) et disponible à cette adresse.


Mise à jour du 16 mars 2022 : Depuis quelques mois, l’épicerie fine de Lormont, Les Bonnes Choses d’Aurélie, propose à nouveau les grattons à la vente. Le produit est préparé selon la recette originale.

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Quelle est la propriété des boues thermales de Dax ?

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Quelle est la propriété des boues thermales de Dax ?


Réputées depuis l’Antiquité pour leur action bénéfique sur l’arthrose ou les rhumatismes, elles soulagent près de 60 000 curistes chaque année.

C’est pour votre bien – Crédit photo: Grand Dax, Tourisme et Thermalisme

Comme un don de la nature

Il n’est pas un Dacquois qui ne connaisse pas la légende de sa ville, d’ailleurs symbolisée par une statue située sur la place de la Cathédrale.

Lors de l’occupation romaine, un légionnaire en garnison à l’endroit où allait bientôt se dresser la ville d’Aquae Tarbellicae (puis Dax !) se désolait de voir son vieux chien souffrir de ses rhumatismes. La mort dans l’âme, il prit la décision de le jeter dans l’Adour, soucieux d’abréger ses douleurs.

À son retour de campagne, quelques mois plus tard, quelle ne fut pas sa surprise de voir son compagnon à quatre pattes se précipiter vers lui, visiblement ragaillardi. Le chien avait en effet dérivé le long de la rivière, jusqu’à s’immobiliser dans des flaques de boue pour y retrouver une seconde jeunesse.

La réputation des boues thermales de ce petit coin de Gaule s’envola à travers tout l’Empire romain, contribuant à édifier une cité thermale toujours active aujourd’hui.

Le Dr Maurice Delmas, dans son ouvrage « Dax, ses eaux, ses boues, ses indications thérapeutiques » publié en 1898, apporte un semblant d’explication : « Séparée en deux parties bien distinctes par un fleuve, l’Adour, la ville de Dax est surtout remarquable par l’abondance et la haute thermalité de ses sources. Plus de vingt millions de litres d’une eau à 6o° centigrades sortent journellement des griffons des différentes sources. On peut donc dire d’une façon pittoresque que Dax est arrosée extérieurement par un fleuve froid, l’Adour, tandis que sous elle passe un torrent d’eau chaude. L’eau minérale hyperthermale a été de tout temps la cause de la notoriété de la cité de Dax ; c’est elle qui donne naissance aux boues végéto-minérales si justement appréciées dans le traitement des manifestations rhumatismales. »

À boue (bien) portant

À quoi tient donc ce miracle géologique ? Eh bien, il dépend d’abord de la rencontre du limon déposé sur les berges de l’Adour et de l’eau thermale souterraine, qui remonte par endroit. Des excavations boueuses se forment ensuite, elles-mêmes soumises au doux climat de la région, propice à l’émergence de l’algue bleue. Cette cyanobactérie, aussi vieille que notre bonne terre, utilise le soleil pour générer du dioxygène selon le mécanisme de photosynthèse.

fontaine chaude dax
La célèbre Fontaine chaude de Dax, avec son eau à 64°C – Crédit photo:  AubdaX — Travail personnel – CC BY-SA 4.0

La microalgue qui apporte toute sa spécificité à la boue dacquoise appartient à la famille des Clostridium bifermentans, bactéries du cycle du soufre. « Ces bacilles Gram+ » anaérobies transforment les sulfates de l’eau minérale en sulfures. La transformation donne à la boue une coloration foncée et une odeur caractéristique » nous apprend ainsi le rapport de l’ENSP consacré aux boues thermales (Gwladys François, Anne Micollier, Isabelle Rouvié – 2005).

C’est d’ailleurs cette coloration particulière qui donne à la boue le nom de péloïde, tiré du grec : pélos (noirâtre) et eidos (aspect).

Et voilà, le péloïde constitue le cœur de l’activité thermale de Dax depuis déjà de nombreux siècles, selon la même recette : limon, eau chaude thermale, algue bleue.

Des bienfaits concrets et pérennes

L’application du péloïde chaud sur le corps du curiste promet un effet décontractant et le soulagement des couleurs. « Grâce à leurs propriétés stimulantes, les boues ont un effet bénéfique sur les échanges au niveau du cartilage, mais aussi sur le tonus musculaire. Leurs propriétés résolutives vont résorber les inflammations articulaires chroniques ou les lésions dégénératives des articulations. Les propriétés sédatives vont participer à la détente des contractures musculaires » précisent les auteures du rapport de l’ENSP Rennes.

Le péloïde génère une relaxation immédiate des muscles contracturés. La chaleur et l’action biochimique assouplissent la peau, permettent la dilatation des pores et contribuent au passage transcutané des éléments actifs (c’est là qu’on retrouve notre cyanobactérie).

Il s’ensuit, on le devine aisément, un sentiment de bien-être, surtout chez les personnes souffrant d’arthrose, de rhumatisme. Ces dernières, au terme de leur séjour thermal, retrouvent davantage de facilité à se mouvoir et réduisent leur consommation médicamenteuse.

La boue thermale vient également en aide aux curistes sujets à la fibromyalgie, à l’ostéoporose. On l’utilise aussi dans des cas de traumatologie et à la suite de chirurgie orthopédique.

Indispensable Régie municipale des eaux et des boues

À Dax, le péloïde est considéré comme une ressource très précieuse. Sa gestion revient à la Régie municipale, qui assure toutes les étapes du processus, de l’extraction à la vente en sacs de 10 kg aux établissements thermaux.

Cette première opération de prélèvement s’effectue en été, période au cours de laquelle l’accès aux carrières est rendu plus facile. Il s’avère nécessaire de creuser entre 2 et 9 mètres avant d’accéder au limon fossile, situé les alluvions.

Le limon est ensuite mélangé à l’eau thermale, tamisé et placé dans le fermenteur. On y ajoute ensuite la microalgue, désormais cultivée sous serre pour renforcer ses éléments actifs. Cette étape de maturation se déroule sur six jours.

Enfin, le péloïde est conditionné puis livré aux établissements dacquois.

La Régie, soucieuse de la pérennité de sa matière première, a initié depuis déjà quelques années une politique de développement durable. Le limon utilisé est récupéré puis redéposé sur son lieu de forage. Les carrières font quant à elles l’objet d’aménagements paysagers.

Il s’agit après tout d’un juste retour à la nature pour cette boue que l’on dit unique au monde, capable de soulager les corps fatigués depuis l’Antiquité.

L’airial, modèle autarcique

L’airial, modèle autarcique


Enraciné dans la culture gasconne, l’airial peut être défini comme un îlot de vie au cœur de la lande puis de la vaste forêt de pins maritimes.

Airial de Bouricos, à Pontenx-les-Forges – Crédit photo: Jibi44, CC BY-SA 4.0

Un patrimoine landais

S’il s’avère assez difficile de dater avec précision la naissance des premiers airiaux, certainement au Moyen-Âge, il est plus évident de déclarer qu’ils symbolisent l’identité du territoire appelé à devenir le département des Landes.

L’étymologie du mot « airial » apporte en ce sens de précieuses informations. Il est dérivé du latin « area », qui désigne une surface, un sol uni ou même un emplacement pour bâtir. En gascon, le terme s’apparente à « airiau » ou « ayrial ».

L’airial landais apparaît donc comme une oasis au cœur d’un environnement de prime abord hostile.

Ainsi, avant la vaste campagne de plantations de pins initiée au XIXe siècle, l’airial accueille quelques fermes, situées à proximité l’une de l’autre et entourées par la lande marécageuse. L’activité y est essentiellement agropastorale.

C’est un lieu de (sur)vie, souvent boisé, agrémenté de quelques champs cultivés permettant aux communautés de se nourrir. Du fait de la pauvreté du sol, l’activité est essentiellement tournée vers l’élevage de moutons.

Vers les années 1850, le projet ambitieux suivi par François Jules Hilaire Chambrelent modifie en profondeur la physionomie du territoire. L’ingénieur initie en effet la plantation de pins maritimes, particulièrement bien adaptés au sol sablonneux. Son initiative, reprise par bon nombre de propriétaires locaux et saluée par l’empereur Napoléon III, permet de donner naissance à la gigantesque forêt des Landes de Gascogne.

De fait, l’airial s’adapte. L’espace boisé disparaît au profit d’une clairière recouverte d’une pelouse impeccable, où subsistent des chênes pédonculés et tauzins. Les quelques maisons d’habitation s’entourent de dépendances, de bâtiments à vocations diverses et de potagers.

De l’importance de la communauté

L’émergence rapide et massive de la forêt landaise bouleverse profondément la vie des bergers. L’activité d’élevage et de pâturage des moutons disparaît progressivement au profit de celle de gemmage et d’exploitation du bois, beaucoup plus rémunératrice.

L’airial se réorganise, de manière communautaire et parfaitement structurée. Au centre s’installe la maison de maître, dévolue au propriétaire et à sa famille. Non loin, les maisons (ou « oustaus ») plus modestes reviennent aux métayers.

« Le métayage est une association de personnes dans lequel l’un apporte la totalité de la terre ainsi que tout ou partie de l’exploitation, tandis que l’autre apporte son travail et le complément éventuel du capital d’exploitation » écrit à ce propos Pierre Fromont (1896-1959), professeur d’économie rurale.

Sur place, les maisons d’habitation s’entourent de nombreuses dépendances (bergerie, grange, hangar…). On y trouve également d’autres équipements et surfaces utiles à la vie de la communauté : puits, four à pain, poulailler, loge à cochon, ruches, potagers…

Même s’ils forment un quartier, les airiaux ne peuvent pas être considérés comme des villages ou des hameaux. Isolés au sein de la gigantesque forêt, ils n’intègrent aucun commerce, église ou mairie et restent étrangers à la notion de bourg.

Cet isolement encourage sûrement l’esprit communautaire et d’entraide. Ainsi, le maître des lieux n’hésite pas à partager le four à pain avec ses métayers. Chacun contribue à l’entretien des potagers, où poussent des pommes de terre, du chanvre et des plantes médicinales. Les femmes se regroupent pour filer la laine. Les hommes partagent l’entretien des machines à outils.

Les saisons s’accompagnent de leurs festivités, comme la « tuaille » du cochon ou la célébration de la fête de la Saint-Jean, auxquelles tout le monde participe.

De fait, les habitants de l’airial ont su développer au fil du temps une véritable organisation autarcique.

Découvrir un airial aujourd’hui

Malgré leurs siècles d’existence et leur remarquable capacité d’adaptation, les airiaux ont fini par s’éteindre au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, victimes d’un modèle économique révolu.

Le patrimoine a fort heureusement subsisté. Il en resterait ainsi quelques milliers entre Adour et Garonne.

Certains ont été acquis par des propriétaires privés, coupables de restaurations hasardeuses, sans nuance, à base de béton.

D’autres ont été conservés ou reconstitués, à l’instar du célèbre écomusée de Marquèze à Sabre. Sur place, le public se plonge corps et âme dans la micro-société de l’airial, tout en profitant des expositions, des diverses animations et des conférences. Depuis 1969, l’écomusée contribue grandement à la pédagogie autour de la vie des landes.

Enfin, des airiaux plus modestes jalonnent différents circuits touristiques, que l’on parcoure en VTT ou à pied.

Les amoureux de patrimoine traditionnel peuvent même passer leurs vacances dans des écogîtes, nés cette fois d’une restauration réussie. Repos et tranquillité absolue garantis !


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Les pommes de terre sarladaises

Les pommes de terre sarladaises, le bon goût de la simplicité


Accompagnement incontournable de tout plat périgourdin qui se respecte, les pommes de terres sarladaises ne nécessitent que quelques (bons) ingrédients et un minimum de vigilance en cuisine.

Une histoire floue

Feuilleter quelques vieux livres de recettes périgourdines nous met devant le fait accompli : les pommes de terre sarladaises n’y figurent pas. Passé le choc, que l’on tente d’apaiser en finissant cul sec son verre de Pécharmant, on se rassure comme on peut en repérant la recette des pommes de terre confites, qui ressemble peu ou prou à celle qui nous intéresse aujourd’hui.

Les pommes de terre sarladaises (ou à la sarladaise) sont populaires parce qu’elles sont simples à préparer, parce qu’elles accompagnent un large choix de viandes (même si le canard arrive en tête) et parce qu’elles suscitent généralement la joie des convives.

Bon à… savoir :

Afin d’éviter une douloureuse surprise en fin de cuisson, on choisira des pommes de terre à chair ferme (Amandine, Belle de Fontenay, BF15, Charlotte…), plus adaptées à la cuisson en sauteuse. Chez le marchand (ou au supermarché), ne pas hésiter à sélectionner les pommes de terre fermes au toucher, sans trace de verdissement ou de germination.

Le secret des pommes sarladaises repose en grande partie sur l’utilisation de la graisse de canard, que l’on trouve assez facilement en pot ou en conserve sur les étals. La graisse se conserve très bien au frigo. Elle est riche en acides gras mono-insaturés, favorables à la prévention du cholestérol et des risques cardiovasculaires, à la condition bien sûr de ne pas en abuser.

Puisqu’on vous le dit ! Vous noterez au passage le très bel assortiment de noix du Périgord (AOC) sur cette magnifique image publicitaire.

La recette

Les ingrédients (pour 4 personnes) :

  • 800 g à 1 kg de pommes de terre
  • 5 cuillères à soupe de graisse de canard (ou d’oie)
  • 1 gousse d’ail hachée
  • Persil frais ciselé
  • Sel et poivre

Préparation :

Après avoir épluché, bien lavé et bien séché les pommes de terre, les couper en fines tranches de 5 mm. On peut éventuellement s’aider d’une mandoline.

Verser la graisse de canard dans la poêle à fond épais, faire chauffer à feu moyen et y déposer les rondelles de pomme de terre.

Laissez cuire 10 minutes, en remuant régulièrement.

Augmenter un chouia le feu et couvrez pour 10 minutes supplémentaires. Pendant cette dernière étape, les pommes de terre vont commencer à attacher, ce qui est un peu le but si l’on souhaite obtenir ce délicieux croustillant. Mélanger délicatement à plusieurs reprises afin que chaque tranche puisse dorer.

Salez et poivrez.

Ajouter l’ail et le persil, mélanger bien (mais doucement !) pour que les pommes de terre puissent s’en imprégner, laisser sur le feu encore une minute et servez immédiatement.

Vos invités applaudissent à tout rompre lorsque vous déposez le plat sur la table. Ils deviennent hystériques en apercevant les magrets de canard que vous avez également préparés.

Qu’est-ce qu’on boit avec ça ?

De préférence un vin rouge du Sud-Ouest, comme un Médoc, un Bordeaux, un Saint-Estèphe et même un Madiran si on est au cœur de l’hiver.


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Église Sainte-Catherine, les briques de la dévotion

Église Sainte-Catherine, les briques de la dévotion


Grâce à son architecture singulière, le célèbre monument de Villeneuve-sur-Lot finit toujours par attirer l’œil des visiteurs, même celui des plus profanes.

Crédit photo: Mossot – Own Work

Une construction récente

La première initiative revient à l’abbé Grenouilheau au milieu du 19e siècle. L’ecclésiastique souhaite en effet construire une nouvelle église en remplacement de celle édifiée à Villeneuve depuis le 13e siècle, qui accuse le poids du temps.

Le projet semble rester dans les cartons pendant quelques décennies, avant d’être repris par Georges Leygues, député de la circonscription puis ministre. Passionné d’art et de littérature, attaché à sa région natale, ce dernier sollicite Jules-Édouard Corroyer, architecte des Monuments historiques et élève de Viollet-le-Duc, pour dessiner les plans.

Le style néogothique envisagé dans la première mouture du projet est abandonné au profit du romano-byzantin. L’architecte n’hésite d’ailleurs pas à faire preuve d’audace dans ses choix. Il privilégie ainsi la brique industrielle locale, impose des planchers métalliques et même un dallage en ciment !

Le chantier débute en 1898 et se poursuit pendant près de 40 ans. Sa supervision revient à Gaston Rapin, architecte de la ville, après la mort de Corroyer en 1904. Rapin s’écarte un peu des plans originaux pour apporter des notes plus régionales à la décoration du porche et du clocher.

En 1909, Georges Leygues, qui vient d’hériter d’une somme importante, finance la poursuite du chantier, soumis à une nouvelle interruption lors de la Première Guerre mondiale.

L’église est consacrée en 1937. Depuis cette date, elle participe pleinement à l’identité de Villeneuve-sur-Lot.

Un plan inspiré des basiliques du haut Moyen-Âge

Le monument se compose d’une nef à bas-côtés entourée de chapelles en hémicycle. « L’économie du plan est simple, épurée, efficace, dégageant un ample espace lumineux et monumental. L’harmonie se joue sur les rythmes ternaires, la géométrie des cercles, la polychromie des matières » peut-on lire dans l’excellent guide du Lot-et-Garonne publié aux éditions Le Festin.

Les chapiteaux sont sculptés par Antoine Bourlange, l’artiste s’inspirant de ceux des églises de Moissac et de Toulouse.

À l’extérieur, la voussure blanche du portail se détache nettement de la façade orangée, selon une esthétique agréable à l’œil et plutôt chaleureuse.

Bâti en 1911, le clocher apporte sans nul doute cet aspect monumental au bâtiment. Haut de 55 mètres, et bien visible de la campagne environnante, sa partie supérieure adopte une forme octogonale, à l’instar du clocher de la basilique Saint-Sernin de Toulouse.

Vitraux 100% d’origine

C’est l’une des forces, mais aussi l’une des incongruités, de l’église Sainte-Catherine. Ses vitraux sont ceux de l’ancienne église, récupérés avant la disparition du bâtiment. La modernité du lieu et des matériaux aurait pu supposer la création de vitraux contemporains, mais point du tout. Par honnêteté, il convient de préciser que les trois verrières du chœur reviennent au peintre Félix Gaudin (1851-1930).

Les vitraux Renaissance ont quant à eux été remontés tout le long des bas-côtés. La première série, dite verrière de la Passion, a été réalisée vers 1530. L’identité de l’auteur ne serait pas confirmée, ce qui n’enlève rien à la beauté de son œuvre. On y découvre, entre autres, la flagellation du Christ, sa descente de croix ou l’épisode de la Résurrection.

Les autres vitraux seraient postérieurs, probablement du XVIe siècle. Parmi les quelques représentations, celle des anges ensevelissant Sainte-Catherine mérite une attention toute particulière.

La décoration intérieure de l’église laisse découvrir, en sa nef, une imposante fresque représentant une procession de 70 saints. L’œuvre est réalisée par Maurice Réalier-Dumas, ami de Georges Leygues et lui aussi originaire de Villeneuve.

La procession des saints – Crédit photo: Jacques Mossot

Rapide conclusion

L’église Sainte-Catherine s’impose comme un magnifique monument. Elle est le fruit de la volonté d’un homme politique majeur de son époque, Georges Leygues, soucieux du patrimoine de sa ville et de sa région.

Outre son imposante présence, elle révèle la perception de la religion catholique à la fin du 19e et au début du 20e siècle auprès de la population locale, essentiellement paysanne. Renouvellement d’un lieu saint mieux adapté ? Argument politique ? Sincère implication dans la vie locale ?

Toutes les interrogations sont les bienvenues.

En conclusion, l’église Sainte-Catherine complète fort bien le patrimoine de Villeneuve-sur-Lot, bastide construite en 1264. Le monument impose naturellement sa présence, laissant presque à penser qu’il appartient à la longue histoire de la ville.


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L’art de l’apéritif en Dordogne

L’art de l’apéritif en Dordogne


Premier volet de notre série consacrée aux spécialités apéritives conçues et fabriquées dans le Sud-Ouest. Aujourd’hui, c’est la Dordogne qui nous ouvre son buffet.

Crédit photo : Château de Monbazillac

NB Cet article n’est pas un publirédactionnel. Aucune rétribution n’accompagne la citation des produits ou la publication des liens hypertextes, précisés à seul titre informatif.

Valeur sûre du bien-manger, le Périgord se doit quand même de maîtriser l’art de l’apéritif. Il donne en quelque sorte un premier aperçu du festin qui attend le convive, lui ouvre gentiment l’appétit, installe un moment de convivialité et, surtout, l’initie aux produits locaux qui accompagnent aussi la cuisine traditionnelle.

Il va sans dire que l’abus d’alcool est dangereux pour la santé. Il convient donc de découvrir ces apéritifs avec la modération qui s’impose.

La noix comme ingrédient incontournable

En Dordogne, on le sait, la noix intervient dans de nombreux plats et desserts. C’est fort logiquement qu’on la retrouve dans les boissons apéritives.

Ainsi, le célèbre Sarlanoix®, de la Distillerie du Périgord, s’impose presque naturellement sur les tables périgourdines. Créé pour rendre hommage aux énoiseuses il y a 150 ans, le doux breuvage est élaboré à partir de la macération d’écorces de noix vertes dans de l’eau-de-vie, à laquelle on ajoute du vin blanc moelleux.

Son goût sucré et ses arômes de noix pourraient inciter à renouveler sa dégustation, mais on reste vigilant. Le Sarlanoix s’affiche quand même à 16% d’alcool, ce qui n’est pas rien.

En concurrence, la Distillerie La Salamandre propose un produit équivalent, mais estampillé bio.

Le Quinquinoix, vieilli cinq ans en fût de chêne, mérite aussi d’être cité, même si sa zone de production se déporte légèrement vers la Corrèze.

La Dordogne, c’est aussi la terre de la truffe et de la châtaigne. Une enquête rapide nous confirme qu’elles entrent également dans la composition d’apéritifs locaux, à l’instar du Truffier (fabriqué par la Distillerie La Salamandre). Conçu sur la base d’un mélange d’infusion de truffes du Périgord et de vin liquoreux, on le déguste bien frais. Il peut aussi se justifier dans un cocktail original ou parfumer une sauce dédiée à un filet de poisson.

Quant à la châtaigne, au goût robuste s’il en est, elle se révèle également en macération, selon la même recette que la truffe. La production de cet apéritif revient aux deux distilleries précédemment citées

L’identité du Monbazillac

Le célèbre vin blanc liquoreux, produit non loin de Bergerac, contribue en tout premier lieu à la réputation de la Dordogne en matière vinicole.

S’il est apprécié pour accompagner un foie gras, un poulet à la crème ou un roquefort, il l’est tout autant à l’apéritif.

La récolte intervient lorsque la pourriture noble, ou plutôt la flétrissure, envahit le raisin. Le dessèchement des grains, sous l’effet du champignon botrytis cinerea, entraîne une concentration des sucres et des acides naturels. Le cahier des charges impose d’ailleurs une richesse en sucre au moins égale à 221 grammes par litre de moût.

Cette saveur sucrée dont peut s’enorgueillir le Monbazillac, sans même mentionner son bouquet d’arômes de miel ou de fleurs, participe grandement à son succès.

Servi frais, le vin se veut agréable à boire, même s’il développe un goût puissant que contrebalance une certaine suavité.

Ne pas oublier les brasseurs locaux, enfin !

À l’instar de nombreux autres départements, la Dordogne a profité de l’émergence d’une nouvelle génération de brasseurs, soucieux de qualité et de proximité.

Ainsi, la brasserie La Margoutie, située à Blis et Born, propose une bière bio, non filtrée, non pasteurisée et refermentée en bouteille. La gamme s’étend de la bière blanche à la bière noire, en passant par la blonde, l’ambrée et la brune. De quoi contenter tous les amateurs.

bouteilles de bière la Margoutie
Crédit photo: Brasserie La Margoutie

C’est dans le joli et surélevé village de Limeuil que s’est installée la brasserie artisanale La Lutine. L’entreprise est d’ailleurs ouverte au public toute l’année, ce qui permet de rencontrer les trois gérants et de découvrir leur production, dont la bière à la noix ou même la bière à la spiruline. Comme il se doit, la production est bio.

La Brasserie la Chavagn’, localisée près de Coly, se distingue quant à elle par sa production de craft beers et de bières fruitées, dont celle à la framboise fraîche de Corrèze.

Enfin, la BAM (Brasserie Artisanale de Marsac) repousse les limites en proposant depuis le mois de mai 2020 une bière au… chocolat.

Sans alcool, l’apéro est plus fol

Les enfants, les femmes enceintes ou toutes celles et tous ceux qui n’apprécient pas l’alcool doivent aussi passer un bon moment.

Ainsi, la Ferme du Puy, spécialisée dans la fabrication artisanale de jus de fruits biologiques en Périgord-Limousin, propose un jus de pommes bien équilibré dans son rapport sucre/acidité. On y trouve aussi d’autres mélanges de jus de pommes avec des fruits rouges, comme la fraise, la framboise et le cassis. La ferme a également créé le Pom’Kibul, un pétillant de pomme qui devrait plaire aux enfants.

Et pourquoi ne pas se laisser tenter par un sirop de verveine, de sarriette, de lavande et même de citronnelle chinoise ? C’est précisément la spécialité de l’horticultrice Catherine Perez, installée dans le Lot. Ses produits, estampillés « Le jardin de Cathy », offrent une large gamme de saveurs plutôt originales, comme la menthe/chocolat, le basilic ou la mélisse. On peut bien sûr les déguster coupés à l’eau fraîche, mais aussi les utiliser en pâtisserie ou lors de la fabrication de drôles de sorbets.

Qu’est-ce qu’on grignote avec tout ça ?

Franchement, peut-on envisager de partir à la découverte de ces boissons locales en ouvrant un sachet de cacahouètes industrielles ? Non et non. Un petit assortiment de toasts délicatement recouverts d’un foie gras fermier semble déjà mieux convenir.

Le Périgord étant le pays de la noix, il peut être judicieux de privilégier tout simplement des cerneaux, qui plus est s’ils bénéficient de l’AOC.

cerneaux de noix
Cerneaux de noix du Périgord – Crédit photo :  Le Sillon fruits secs

Si l’on décide mettre la main à la pâte, de délicieuses recettes sont disponibles sur Internet, comme le Cabécou du Périgord aux trois couleurs ou les mignardises au foie gras et à la truffe.

On trouve enfin dans le commerce des produits tout prêt, à l’instar de l’en-cas de canard aux queues d’écrevisses ou des petites saucisses de Toulouse confite et leur truffe noire du Périgord.

L’apéritif local, qui privilégie les producteurs de proximité, constitue un agréable préambule au repas, lui-même dédié au même territoire. En Dordogne, la diversité des ressources et le long savoir-faire des artisans encouragent plutôt cette goûteuse ambition.

Références citées dans l’article:

SarlanoixQuinquinoixTruffier
Monbazillac
Brasserie La MargoutieBrasserie La LutineBrasserie la Chavagn’Brasserie Artisanale de Marsac
La ferme du PuyLe Jardin de Cathy
Noix du Périgord
Cabécou du Périgord aux trois couleursMignardise foire gras et truffe
En-cas de canard aux queues d’écrevissesPetites saucisses de Toulouse confite et leur truffe noire du Périgord


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La noix du Périgord, de l’huile d’éclairage à l’appellation

La noix du Périgord, de l’huile d’éclairage à l’appellation


Première région productrice de noix en Europe, le Périgord perpétue un savoir-faire séculaire, justement récompensé par l’AOC et l’AOP.

Quelques mots d’histoire, vite fait

Disons-le franchement : l’homme de Cro-Magnon n’était pas vraiment réputé pour le soin apporté au ménage de sa grotte. Cette absence de rigueur domestique a au moins représenté l’opportunité de retrouver des coques de noix datant de plus de 17 000 ans dans les habitats de la vallée de la Vézère, preuve que nos ancêtres s’en régalaient déjà.

De fait, la noix s’impose parfois dans l’histoire locale. Les paysans l’utilisent pour payer leurs dettes jusqu’au Xe siècle. Au XIIIe siècle, les moines de l’abbaye citersienne de Dalon reçoivent de l’huile de noix comme acquittement des baux. Un siècle plus tard, les noix sont considérées comme une importante source de revenus par certains châtelains.

Néanmoins, la noix a somme tout connu une histoire relativement discrète de longs siècles durant. Comme l’écrit Pierre Guillaume, professeur émérite en histoire contemporaine à l’Université de Bordeaux 3, dans l’excellent ouvrage Les produits des terroirs aquitains (Revue de l’Agenais – 2009) : « La noix et les variations de sa production n’ont pas marqué l’histoire comme ce fut le cas pour le blé et autres céréales ou, plus tard, en Irlande notamment, pour la pomme de terre. L’explication de cette discrétion tient au fait que la noix n’a été traditionnellement pour les producteurs qu’une ressource d’appoint et qu’elle n’a jamais constitué pour les consommateurs le fond de leur alimentation. Elle n’a ainsi jamais eu l’importance qu’ont pu avoir, dans les régions de production et de consommation, l’olive ou même la châtaigne. »

Aux XVIIIe et XIXe siècles, l’huile de noix est surtout utilisée pour l’éclairage ou la fabrication de savons. En cuisine, les réticences sont plus nombreuses, notamment à cause de sa propension à rancir rapidement en cas d’exposition à la lumière et à la chaleur. De plus, l’huile n’est pas adaptée à la cuisson, « ce qui explique qu’elle soit absente de tous les livres de cuisine puisque son utilisation ne se conçoit que pour les salades » précise encore Pierre Guillaume.

Il n’en demeure pas moins que l’huile de noix rencontre un certain succès commercial, en profitant de l’activité foisonnante du port de Bordeaux, où est organisée l’exportation vers l’Angleterre, l’Allemagne ou encore les États-Unis.

Le XIXe siècle est moins souriant. En 1830, les températures hivernales polaires ravagent les noyeraies. L’apparition de nouvelles huiles (colza…) ne contribue pas à dynamiser les ventes, pas plus que l’utilisation massive des lampes à pétrole, qui remplacent celles alimentées en huile de noix.

Les producteurs reviennent progressivement au fruit basique et commencent à exploiter son cerneau. À la fin du XIXe siècle, les États-Unis commandent des quantités importantes de noix du Périgord et du Dauphiné.

« V’nez énoiser, qu’y disaient. Ce sera drôle, qu’y disaient. » – « Tu me casses les noix, Joséphine, et, bizarrement, ça fait pas avancer le travail. »

Dans les années 1950, de nouvelles noyeraies sont plantées. Il est décidé d’introduire dans le Sud-Ouest la franquette du Dauphiné, une noix jugée plus résistante. Elle concerne aujourd’hui plus de 70 % de la récolte locale.

Quatre variétés de noix…

Même si la franquette s’impose de plus en plus auprès des producteurs, la noix du Périgord comprend quatre variétés distinctes, qui contribuent à sa renommée.

On trouve d’abord la marbot, très précoce, à la coque mince et fragile, que l’on vend fraîche et que l’on consomme assez rapidement. Son goût est très fin.

La rustique corne (ou corne du Périgord) est une noix réputée fort goûteuse. On la reconnaît grâce à la taille moyenne de sa coque et à la blancheur de son cerneau. On peut la conserver plus longtemps que la marbot.

La grandjean (ou grosjean) offre une coque bien plus imposante que la rustique corne. On peut facilement extraire le cerneau, que l’on dit très parfumé. Au goût, la grandjean présente un soupçon d’amertume.

Enfin, la franquette, originaire de Notre-Dame-de-Losier, en Isère. Introduite il y a une soixantaine d’années dans le Sud-Ouest, elle se présente sous la forme d’une grosse coque. Ses qualités gustatives ne sont plus à démontrer et les amateurs apprécient son arrière-goût de noisette.

… Et quatre régions de production

Si la noix du Périgord est historiquement liée à sa région naturelle, la zone de production comprend aujourd’hui le Quercy (dans le Lot) et les départements de la Corrèze et de la Charente. Le regroupement de ces terroirs a permis de développer 7 500 hectares de vergers, qui se développent sur des sols argilocalcaires du secondaire.

Une attention toute particulière a été portée aux lieux d’implantation. Ainsi, les vallées non gélives et les coteaux ne dépassant pas 500 mètres d’altitude ont été privilégiés, offrant aux noyers les conditions idéales de croissance. Des investissements importants ont été réalisés, afin d’encourager l’exportation des noix vers différents pays européens, mais aussi contrer la suprématie de la Chine et des Etats-Unis, qui produisent chaque année 540 000 tonnes de noix en coque (sur une production mondiale de 1 million de tonnes). La France produit quant à elle 30 000 tonnes par an, dont 15 000 tonnes issues du Dauphiné et du Périgord…

Un produit récompensé par l’AOC

La noix du Périgord, c’est bon et on peut la déguster de mille et une façons. La noix fraîche, par exemple, est un vrai régal. Récoltée à maturité dès la mi-septembre, séparée de son brou (chair du fruit), on peut l’acheter aussitôt et la consommer rapidement.

La noix sèche, plus facilement accessible dans le commerce, présente autant d’arguments gustatifs. On la récolte dès le début du mois d’octobre, lorsqu’elle tombe naturellement des arbres. Lavée puis passée dans des séchoirs d’air chaud, elle se conserve sur une plus longue durée, pour peu qu’on l’entrepose dans un endroit frais et sec.

Le cerneau de noix du Périgord (ou amande) ne demande aucun effort puisqu’il a déjà été extrait de la coquille. On peut le manger comme ça, brut de décoffrage, ou l’utiliser comme accompagnement de salades, fromages et desserts.

Cette constante quête de la qualité, menée depuis des années par les producteurs, a (enfin) été récompensée en 2002, lorsque l’Appellation d’Origine Contrôlée a publié son décret permettant ainsi à la noix du Périgord de rejoindre le cercle très fermé des produits de qualité. En 2004, l’AOP est venue confirmer ce savoir-faire.

Les passionnés ne manqueront pas d’emprunter, au moins une fois dans leur vie, la route de la Noix du Périgord, qui permet de partir à la découverte de son terroir. Ils trouveront sur leur chemin des producteurs, des restaurants, des marchés locaux ou des musées consacrés à ce petit fruit à coque.


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Pourquoi le roi Léon s’appelle-t-il Léon ?

Pourquoi le roi Léon s’appelle-t-il Léon ?


Personnage indétrônable des fêtes de Bayonne, le roi Léon ouvre chaque jour les festivités, bien installé sur le balcon de l’Hôtel de Ville.

roi léon
Une nouvelle journée de fête commence – Crédit photo: Fêtes de Bayonne

Une création relativement récente

Quiconque a déjà revêtu la belle tenue blanche et rouge avant de s’abandonner à la foule et (surtout) à la fête l’apprécie et le respecte. Pour tous les autres, le bonhomme s’entoure de mystère. Mais qui est donc le roi Léon ? Et pourquoi s’appelle-t-il Léon ?

Pour rappel, les fêtes de Bayonne ont vu le jour en 1932, lancées par un groupe de copains de l ’Aviron ayant l’habitude de festoyer à Pampelune. En 1947, le maire confie pour la première fois les clés de la ville aux festayres. La fête ne cesse de gagner en réputation, son programme s’élargit et se diversifie.

Ce n’est qu’en 1987 que le roi Léon fait son apparition. L’initiative en revient à André Lascoumes et Jacky Barenot, de la peña Or Konpon. « Nous avons eu l’idée de nous inspirer des géants de nos voisins de Vitoria Gasteiz (ville du Pays basque espagnol), chez qui une poupée est devenue une sorte d’icône des fêtes locales » explique André Lascoumes au Journal Sud-Ouest (31/08/2017).

Ras-le-bol de la reine des fêtes

Si le projet de la mascotte est acté, il convient de lui donner un nom.

Les deux amis, bien intégrés à la vie bayonnaise, ne peuvent ignorer l’existence de Raphaël Dachary, surnommé Léon, figure incontournable des fêtes dans les années 50. Commis-vendeur chez un commerçant de la ville, simple d’esprit, interprète passionné d’art lyrique, Léon fut encouragé par ses copains à concourir au titre de « roi de Bayonne ». Le souhait des jeunes Bayonnais était avant tout de mettre fin au règne de la reine des fêtes, nommée systématiquement chaque année.

Au terme du concours officiel, qui réunit 14 candidats, Léon Dachary fut proclamé « roi des fêtes de Bayonne » et c’est tout auréolé de gloire qu’il ouvrit les festivités en 1949.

On retient donc que sans l’existence de ce surnom, le roi des fêtes de Bayonne se serait appelé Raphaël.

Raphaël dachary, le vrai roi des fêtes de Bayonne.
Un livre, publié aux éditions Atlantica, est consacré à Raphaël Dachary, inspirateur du roi Léon

Le roi mérite un visage

Les premières esquisses du roi Léon sont l’œuvre de Jacky Barenot, ensuite confiées à Jean Duverdier, dessinateur de presse, collaborateur régulier de Sud-Ouest ou d’Anglet Magazine.

L’artiste le décrit de cette manière aux journalistes de France 3 Aquitaine en 2015 : « Il est un peu comme un gros gamin, un peu comme Obélix sans avoir sa force. Il représente la fête, la bonhommie. Il est aussi un peu naïf. Il lui arrive des histoires dues à sa naïveté. C’est quand même fou de constater l’engouement des familles et des enfants qui viennent le voir. Ils ont adopté le personnage et ses couleurs. »

Il est vrai que le personnage, doté d’un gros nez rouge et d’une belle coiffure blonde, attire immédiatement la sympathie, peut-être grâce à son sourire jovial.

Le même rituel chaque année

Chaque matin, à 11 heures précises, les géants de la cour du roi fendent la foule pour venir réveiller leur bon roi et l’inciter à ouvrir la fête.

Le rituel s’accompagne même d’une chanson, « Debout Léon », que reprennent toutes les personnes présentes. Dès les premières notes, le souverain daigne quitter ses appartements pour venir saluer ses sujets.

Du haut de ses 4 mètres, bien installée sur le balcon, la grande marionnette domine la fête jusqu’au bout de la nuit.

On dit le roi sensible à la bonne humeur, au rythme des bandas, aux chansons improvisées et aux éclats de rire. Il est devenu indétrônable dans son rôle et symbolise plus que jamais l’âme festive des Basques.

Côtes du Marmandais : des vins méconnus et précieux

Côtes du Marmandais : des vins méconnus et précieux


La région de Marmande, réputée pour ses tomates charnues et savoureuses, pourrait l’être davantage grâce à ses vins.

Le jour se lève sur le vignoble: Crédit photo: Cave du Marmandais

Catalogué parmi les vins du Sud-Ouest

C’est le destin de tous les vignobles régionaux qui n’entrent pas dans le périmètre de Bordeaux. Leur existence propre, leur histoire, leur particularité et leur qualité dépendent en premier lieu d’une classification générique et un peu floue. Il convient donc de se pencher sur la carte viticole pour mieux identifier la trentaine d’appellations AOC et/ou AOP du Sud-Ouest, parmi lesquelles figure presque modestement celle des Côtes du Marmandais.

Elle rejoint d’ailleurs les autres appellations du Lot-et-Garonne, à l’instar du Brulhois, de Buzet et des Côtes de Duras, permettant au département de s’imposer comme une terre viticole à part entière.

logo côtes du marmandais

Un vignoble à la superficie modeste

Si le vignoble bordelais s’étend sur près de 118 000 hectares, celui des Côtes du Marmandais ne dépasse pas les 1320 hectares, agencés sur les deux rives de la Garonne.

On dit de la rive gauche qu’elle est terre de Gascogne. Son paysage se compose de vastes plaines et de collines à pente douce. Le sol repose sur une grave perméable que viennent enrichir des couches d’argile, des marnes bleues et grises et des gros sables, propices au drainage.

La rive droite, ou terre de Guyenne, se distingue par ses coteaux abrupts, dont la géologie révèle des épaisseurs de molasses argilocalcaires.

À chaque nature de sol correspondent des cépages particuliers, qui contribuent à considérer les deux rives comme deux terroirs distincts et complémentaires.

Avant tout, la variété des cépages

« Le Marmandais est caractérisé par des vins d’assemblage. Nous ne pouvons pas faire du Marmandais en monocépage, il faut forcément associer au minimum deux cépages. » Interviewé pour le site Vins et Variations, Fabien Tarascon, vigneron, résume bien l’esprit qui prévaut en terre lot-et-garonnaise.

Ici, les cépages sont nombreux et variés. Le cabernet franc, le cabernet sauvignon et le merlot, qui représentent 85% de l’encépagement, doivent aussi compter avec le malbec, la syrah, le fer servadou et le gamay.

Si tous contribuent peu ou prou à apporter cette touche particulière aux vins locaux, l’abouriou peut se targuer d’être le chef de file de l’assemblage et la mascotte du Marmandais.

Cépage endémique, sauvé et choyé par les producteurs, « il peut accoucher de vins très fruités, aux parfums de baies noires (cassis, mûre, myrtille), parfois enrobés de notes boisées à la suite d’un élevage en barriques assez fréquent. La bête demande à se patiner avant d’être bue, elle est musclée et ses épaules peineraient à passer la porte du palais. Fine sur la rive droite, elle gagne en charpente sur les graves » écrit fort joliment Ophélie Neiman dans Le Monde (25/08/2019).

Même s’il ne représente que 10% de la production, le blanc se nourrit des cépages sémillon, sauvignon blanc et sauvignon gris.

Le rôle central joué par la Cave du Marmandais

L’AOC, obtenue en 1990, a-t-elle contribué à installer progressivement la Cave du Marmandais, née de la fusion de la Cave du Cocumont (rive gauche) et de la Cave de Beaupuy (rive droite) ?

Il n’empêche que depuis 2003, elle regroupe 90% de la production locale, assurée par une centaine de vignerons. Cette concentration ne perturbe pas la qualité intrinsèque des vins ni la subtilité de l’assemblage. Le rôle de la coopérative consiste avant tout à installer les Côtes du Marmandais parmi les appellations dignes d’intérêt et à assurer une meilleure communication auprès du public.

Une petite dizaine de producteurs indépendants poursuit la même démarche, convaincus du potentiel de leurs vins. Ainsi, Elian Da Ros mène un combat sans répit en faveur de l’excellence depuis son installation en 1998. Ses vins sont aujourd’hui inscrits sur la carte de 120 restaurants étoilés et continuent d’être recherchés par des amateurs du monde entier.

« J’ai commencé à vendre mes vins à des sommeliers qui avaient la niaque, comme moi. Ils ont apprécié que je leur propose quelque chose de différent. Ce sont vraiment eux qui ont été la clé de la reconnaissance de mes vins. Les jeunes chefs, surtout, ne sont pas des buveurs d’étiquette, ils n’ont pas d’a priori » déclare-t-il à Laure Gasparotto, du Monde (19 juin 2019).

Aucun complexe face aux bordeaux

« Les vins produits ici ont leur typicité et c’est comme ça qu’on les aime. Vouloir essayer d’élaborer un vin typé « bordeaux » est selon nous une erreur, peut-être pas d’un point de vue commercial, mais très certainement d’un point de vue de l’intérêt gustatif. » Ce court passage tiré du site spécialisé Le Guide Vigne-Vin semble résumer l’esprit qui prévaut chez les vignerons marmandais.

La richesse des cépages autorise il est vrai la revendication d’une production singulière. Elle naît de la liberté de création lors de la phase d’assemblage.

« Nous avons une grande diversité de profils de vins. Nous pouvons aller sur des vins croquants, des vins copains, mais aussi des vins plus structurés » déclare à ce titre Fabien Tarascon.

Même discours chez Emmanuelle Piovesan, vigneronne elle aussi : « Il y a une trame au Marmandais, mais qui est en fait très diverse. On va trouver des choses très différentes chez les mêmes producteurs, entre les cuvées, ou d’un vigneron à l’autre. Je pense que c’est presque à l’infini au niveau de ce que l’on peut faire. »

Des critiques plutôt flatteuses

En rouge, les vins affichent une robe intense et profonde. « En bouche, c’est un vin à l’attaque franche, à la matière dense et à la structure fine, une belle rondeur qui enveloppe le tout, pas de lourdeur, car l’acidité et de très grande qualité. Les tanins sont fermes, fins, mais sont là pour donner au vin une tenue et pour le maintenir dans le temps, car c’est un vin qui est prédisposé à la garde » indique le site Guide Vigne-Vin.

Pour le Guide Hachette des Vins, « la matière est ronde, ample, sans excès, avec une sensation tannique bien équilibrée. »

Le rosé laisse pour sa part exprimer des notes de fruits rouges et impose des tannins dotés d’une vraie personnalité.

Le blanc profite des arômes propres au sauvignon, avec des notes d’agrumes, de pamplemousse ou encore de tilleul. À l’instar du rouge et du rosé, l’attaque en bouche se veut plutôt costaude, mais toute en rondeur.

Enfin, le dernier argument en faveur des Côtes du Marmandais est peut-être celui de leur prix. Une invitation supplémentaire à les découvrir et, sans nul doute, à les apprécier.


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